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Venise fait souvent parler d'elle pour son carnaval... et ses inondations. Celles-ci sont de plus en plus fréquentes. Elles sont causées par de fortes maréesmarées dont l'importance serait amplifiée par la hausse du niveau des mers et donc le réchauffement climatique. En réponse à ce problème, les autorités locales ont donc développé le projet Mose, un système de digues flottantes pouvant bloquer, en cas de besoin, l'entrée excessive d'eau dans la lagune.
Le nombre d'inondations dépend également d'un autre facteur. Pendant plusieurs dizaines d'années, de l'eau souterraine a été puisée sous la ville, fragilisant ainsi ses structures naturelles de soutènement. Durant le XXe siècle, Venise s'est enfoncée de 120 mm sous le niveau des eaux de la lagune. Conscientes du problème, les autorités ont donc interdit tout pompage d'eau souterraine à partir de 1970. Cette décision semblait avoir porté ses fruits car l'affaissement de la Sérénissime a été qualifié de « stabilisé » en 2000. Malheureusement, il n'en est rien.
La lagune de Venise (au centre de l'image) vue depuis le satellite Aster. Les points d'entrée de l'eau dans la lagune sont visibles. Ils pourront bientôt être obturés par des digues flottantes en cas de grosse marée. © Nasa/GSFC/Meti/Ersdac/Jaros et U.S./Japan Aster Science Team
Le naufrage de Venise causé par la tectonique des plaques
Venise continue de couler et commence même à pencher en direction de l'est. En réalité, la ville ne représente qu'une petite partie des zones en cours d'affaissement. Toute la lagune est concernée ! Ces nouveaux résultats ont été obtenus en combinant des observations satellite et la technologie GPSGPS. Ils sont publiés par Yehuda Bock, du Scripps Institution of Oceanography (SIO-UCSD), dans la revue Geochemistry Geophysics Geosystems (G3).
La ville continue son immersion progressivement malgré les efforts de l'Homme pour une bonne raison. Des processus naturels liés à la tectonique des plaques ou au compactage du sol entrent également en jeu. Il est difficile voire impossible de trouver des solutions pour lutter contre un événement géologique majeur en cours depuis des millions d'années. Venise se trouve sur la plaque adriatique. Or, celle-ci subduit actuellement sous l'Apennin, son affaissement est donc tout à fait normal et naturel. Le tassement du sous-sol est également inévitable. Les constructionsconstructions possèdent un certain poids et reposent sur un sol marécageux.
Deux technologies, GPS et Insar, ont été utilisées pour étudier la déformation de la croûte terrestre à Venise et sous sa lagune. Le global positioning system fournit des données d'élévation absolue. La Synthetic Aperture Radar Interferometry (Insar) procure des informations sur l'élévation relative, en comparant la position d'un point par rapport à un autre. Dans le cas présent, le satellite RadarSat-1 fut utilisé pour réaliser des mesures. Les données ont été récoltées entre 2000 et 2010.
Toutes les îles ne sont pas affectées de la même manière
Dans l'absolu, Venise s'affaisse de 1 à 2 mm par an ! En apparence, rien de bien grave pour beaucoup de spécialistes. Mais, il faut ajouter à ces valeurs un autre paramètre : le niveau de la lagune monte de 2 mm par an. En vingt ans, Venise pourrait donc s'enfoncer de 8 cm sous le niveau de la mer.
D'autres chiffres sont fournis. Les différentes parties du bassin vénitien ne sombrent pas à la même vitessevitesse. La ville s'en sort d'ailleurs bien. Le nord et le sud du lagon s'enfoncent respectivement de 2 à 3 mm et de 3 à 4 mm par an. Les îles protégeant les lagunes pourraient perdre 5 à 20 cm d'altitude durant les quarante prochaines années. Les différences de vitesses d'enfoncement provoquent une inclinaison progressive de la ville vers l'est. La subduction de la plaque adriatique participerait à hauteur de 0,4 à 0,6 mm par an à ces résultats.
Ces nouvelles données devront être prises en compte par les différents programmes de protection de la ville contre les marées. Les digues du projet Mose vont-elles rester efficaces dans le futur ? Oui, mais elles risquent d'être plus employées que prévu.