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L'apparition de la tectonique des plaques il y a 2,5 milliards d'années, en favorisant la dynamique interne de la Terre, aurait permis une importante remontée d'oxygène dans l'atmosphère à l'origine de la vie sur notre planète, selon une étude publiée par la revue Geochemical Perspectives. L'étude, menée par le Laboratoire Magmas et Volcans de Clermont-Ferrand, appuyée par l'université de Montpellier et le Synchrotron de Grenoble, porteporte sur la quantité d'oxygène libérée par le manteau terrestre lors du passage de la Terre primitive à la Terre moderne. L'histoire se situe donc entre l'Archéen (de -4 milliards à -2,5 milliards d'années) et le Protérozoïque (de -2,5 milliards à -544 millions d'années).
« Pendant toute la période archéenne, l'atmosphère est restée anoxiqueanoxique, c'est-à-dire dépourvue d'oxygène. À l'époque, le manteau a pu rester relativement isolé de la surface de la Terre : la croûte terrestrecroûte terrestre, formée de petites plaques instables, "flottait" sur le manteau, sans subductionsubduction profonde », explique Denis Andrault, chercheur à l'université Clermont Auvergne, à l'origine de l'étude. « Ce régime de convectionconvection primitif a progressivement été remplacé par la tectonique des plaques moderne et a favorisé le mélange entre les réservoirs du manteau terrestre ; et donc la remontée de l'oxygène stockée dans le manteau profond, en quantité de 500 à 1.000 fois supérieure à la teneur en oxygène de l'atmosphère d'aujourd'hui », détaille ce spécialiste en physico-chimiechimie des minérauxminéraux.
Le refroidissement du manteau aurait enclenché la tectonique des plaques
La teneur en ferfer ferrique (Fe3+), suggérant un excès d'oxygène dans le manteau profond, a diminué de 20 % à seulement 2 à 3 % lors de la transition ArchéenArchéen-Protérozoïque, selon cette étude. « Un excès d'oxygène s'est ainsi libéré dans l'atmosphère et la vie terrestre s'est adaptée », résume le scientifique. « C'est à peu près à cette période que la Terre a connu l'évènement de la "Grande Oxydation" [vers -2,4 milliards d'années, NDLRNDLR], une étape majeure de l'évolution de la vie. Ce type de coïncidence temporelle est rarement fortuit dans la Nature et on pense qu'on peut faire un lien entre l'évolution thermochimique de l'intérieur de la Terre et la teneur en oxygène de l'atmosphère », assure Denis Andrault.
Il s'appuie sur une deuxième étude du laboratoire auvergnat, portant sur la fusion partiellefusion partielle du manteau, publiée ce lundi dans la revue Nature Geoscience et réalisée avec le Synchrotron SoleilSoleil du plateau de Saclay (Essonne). « Lors de l'Archéen, le manteau était encore très chaud et sa fusion partielle aurait retardé l'établissement de la tectonique des plaques et la subduction de la croûte océaniquecroûte océanique durant 2,5 milliards d'années. C'est justement le refroidissement et la solidificationsolidification du manteau qui auraient induit un changement de dynamique global : l'établissement de la tectonique des plaques avec l'accrochage de la croûte terrestre et ensuite la remontée d'oxygène vers l'atmosphère », synthétise encore le chercheur.
L'article ci-dessous relate une autre explication, celle d'un effet de la sédimentationsédimentation dans les océans des matériaux venus des chaînes de montagnes nées des premières collisions de continents.
La tectonique aurait enrichi l'atmosphère terrestre en oxygène
Article de Jean-Luc GoudetJean-Luc Goudet, publié le 1er août 2008
Des collisions de continents, des chaînes de montagnes brusquement érigées puis rapidement érodées et enfin un boom planctonique : ce scénario complexe, concentré sur quelques millions d'années, expliquerait l'enrichissement de l'atmosphère terrestre en oxygène.
Au début de l'histoire de la Terre et durant deux milliards d'années, l'atmosphère ne contenait pratiquement pas d'oxygène. Puis la quantité de ce gazgaz corrosif s'est mise à grimper par à-coups jusqu'à la concentration actuelle, de 21 % en volumevolume. On considère que cette augmentation s'est réalisée en six étapes. Exprimées en années, leurs datations, de la plus ancienne à la plus récente, sont de 2,65 milliards, 2,45 milliards, 1,8 milliard, 600 millions, 300 millions et enfin 40 millions. Un septième épisode est cependant suspecté à 1,2 milliard d'années avant le présent.
Deux géologuesgéologues australiens, Ian Campbell et Charlotte Allen, viennent d'établir une corrélation entre ces évènements et des collisions de continents. Comme ils l'expliquent dans la revue Nature Geoscience, les épisodes d'enrichissement de l'atmosphère en oxygène correspondent aux moments où le mouvementmouvement des plaques tectoniquesplaques tectoniques provoquait l'affrontement de plusieurs continents. Ces télescopages ont conduit à la formation de super-continents sur lesquels de gigantesques chaînes de montagnes se soulevaient, comme le font aujourd'hui l'Himalaya, la Cordillère des Andes, les Alpes ou les Pyrénées.
Que serait la vie terrestre sans la tectonique ?
Mais quel rapport avec l'oxygène ? Pour comprendre, il faut prendre un peu de recul, regarder la planète d'assez haut et accélérer le déroulement du temps pour percevoir les mouvements géologiques. À peine surgis, ces massifs montagneux sont attaqués par l'érosion, aérienne et fluviale, qui arrache des milliards de tonnes de poussières riches en minéraux de toutes sortes, et notamment du fer. Charriées par les fleuves ou transportées par les ventsvents, elles finissent toujours par rejoindre l'océan.
Pendant des millions d'années, toutes les mers du globe reçoivent ainsi une pluie continuelle d'engrais, une aubaine pour les organismes planctoniques photosynthétiques. Les alguesalgues et les cyanobactériescyanobactéries prolifèrent de plus belle et répandent autour d'elles de l'oxygène, ce gaz qui fut longtemps un poison pour la vie. De plus, l'intense sédimentation enterre au fond des océans des massesmasses de carbonecarbone et de pyritepyrite, les empêchant de réagir avec l'oxygène libre, dont la quantité dans l'atmosphère augmentait donc d'autant.
C'est du moins le scénario proposé par les deux chercheurs qui notent une coïncidence très nette pour six des sept étapes. Selon eux, le mécanisme se poursuit. Depuis 40 millions d'années, l'érection de l'Himalaya aurait augmenté de 15 % la teneur atmosphérique en oxygène. Une autre conséquence de cette hypothèse est le rôle de la tectonique des plaques dans le développement de la vie sur Terre. Sans elle, l'atmosphère, expliquent les chercheurs, serait plus fine et plus pauvre en oxygène...