La faiblesse du champ magnétique de la Terre, il y a 40.000 ans, a peut-être contribué à la disparition de l’Homme de Néandertal. C’est ce que suggèrent deux chercheurs français. En augmentant le flux de rayons cosmiques, cette faiblesse aurait aussi fait augmenter indirectement l’intensité du rayonnement ultraviolet, générateur de mélanomes.
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Les régions occupées par Néandertal à différentes époques en Europe sont en rouge. BP signifie Before present donc avant aujourd'hui. © Actualisée d'après Bocquet-Appel and Demars, 2000
On ne sait toujours pas vraiment ce qui a causé l'extinction progressive des Néandertaliens, entre 41.000 et 34.000 ans avant le présent. Plusieurs hypothèses ont été avancées, du génocide au métissage. On sait aujourd'hui que ce dernier a bel et bien eu lieu et que des gènesgènes de l'Homme de Néandertal survivent en nous. Mais cela semble bien insuffisant pour rendre compte de sa disparition.
Récemment, Jean-Pierre Valet et Hélène Valladas, respectivement de l'IPGP et du LSCE, ont fait une proposition intéressante en apportant une pièce de plus au dossier de la disparition de cet Hominine qu'était l'Homme de NéandertalNéandertal, cousin des Hommes modernes et des Dénisoviens.
Une partie de l'explication de cette disparition serait à rechercher au niveau d'une faiblesse du champ magnétiquechamp magnétique de la Terre, concomitante d'inversions magnétiques, il y a environ 40.000 ans. En effet, les deux chercheurs sont arrivés à préciser l'époque de la disparition progressive de l'Homme de Néandertal en affinant les datations au carbone 14datations au carbone 14.
Il faut savoir que la méthode de datation développée par Willard Libby en 1949 souffre d'une imprécision liée à la quantité moyenne de carbone 14 dans l'atmosphère produite par les rayons cosmiquesrayons cosmiques. Ces rayons génèrent indirectement un flux de neutronsneutrons frappant les noyaux d'azoteazote de la haute atmosphère, lesquels se transforment alors en cet isotopeisotope radioactif du carbone.
Une augmentation du flux de rayons cosmiques
Or, si le champ magnétique de la magnétosphèremagnétosphère varie, et c'est bien le cas, le flux de rayons cosmiques ne sera pas constant, engendrant des variations de la quantité de noyaux de 14C. Il faut donc constituer une courbe d'étalonnage liée à l'histoire de ces variations de champs magnétiques pour préciser les datations.
Courbe de la paléo-intensité du champ magnétique au cours du temps. Les âges sont donnés en abscisse en dizaines de milliers d'années (ka). © Valet et Valladas 2010
Hélène Valladas et Jean-Pierre Valet ont alors constaté que l'extinction des Néandertaliens s'était produite pendant une période où le champ magnétique de la Terre était dix fois plus faible qu'aujourd'hui. Il y a même eu deux inversions du champ magnétique avec les événements du Laschamp et de Mono Lake, il y a respectivement 40.000 et 33.000 ans.
La coïncidence est troublante mais comment relier véritablement ces deux phénomènes ?
Une détérioration de la couche d'ozone
Sans aller jusqu'à dire que l'un est la cause de l'autre, on peut établir une connexion par l'intermédiaire de la quantité de rayonnement ultravioletultraviolet tombant sur Terre. Normalement, la couche d’ozone nous protège en grande partie des UV-B. Mais si la magnétosphère s'affaiblie, la quantité de rayons cosmiques (en particulier les protonsprotons en provenance du SoleilSoleil) qui atteint les couches hautes de l'atmosphère, augmente. Ces particules vont déclencher des réactions chimiquesréactions chimiques en cascade qui aboutissent à la formation d'oxyde nitriqueoxyde nitrique, lequel détruit la couche d'ozone.
La population des Hominines de Néandertal étant peut-être déjà affaiblie pour des raisons encore inconnues, la multiplication des cancers de la peaucancers de la peau (comme les mélanomes) causée par cette augmentation du rayonnement UV-B pourrait avoir contribué de façon non négligeable à sa disparition.
On sait ainsi, grâce à des études sur la population de la pointe du Chili, qu'il y a un accroissement important des tumeurstumeurs et cancers de la peau, ainsi que des effets notables sur la vue et le système immunitairesystème immunitaire, en particulier chez les enfants, à cause du trou d'ozone intermittent actuel.
Une question se pose bien sûr naturellement. Pourquoi les Hommes modernes n'ont-ils pas subi le même sort ? Peut-être parce qu'ils étaient plus nombreux et répartis sur des zones géographiques plus importantes, en particulier au sud de l'Europe du Nord.