Les processus tectoniques et érosifs agissent de concert pour façonner le paysage qui nous entoure. Une nouvelle étude montre d’ailleurs à quel point les failles sont sensibles à l’efficacité des processus érosifs.
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Parmi les grands processus qui modèlent le paysage, il y a les processus tectoniques, bien évidemment, auxquels nous devons la surrection des chaînes de montagnes ou certains fossés d'effondrementeffondrement, mais il y a également les processus érosifs. Le vent, la neige, la pluie, les rivières, les variations de température mais surtout les cours d'eau - qu'il s'agisse de ruisseaux ou de fleuves -, participent en effet à l'érosion des reliefs continentaux. Alors que les processus tectoniques s'appliquent à grande échelle et ne sont visibles que sur le long terme, à l’exception du jeu régulier de certaines failles, les résultats de l'érosion sont visibles au jour le jour et peuvent entraîner d'importantes modifications du paysage sur quelques années seulement. La surface et la topographie terrestre sont ainsi constamment remodelées et façonnées.
Tectonique et érosion : deux processus fortement couplés pour modeler notre paysage
Si processus tectoniques et érosion agissent de concert pour modeler le paysage, ils interagissent également fortement. En effet, en rabotant les reliefs et en déplaçant le matériel détritique issu de l'abrasionabrasion des roches, les rivières redistribuent la charge superficielle qui pèse sur la croûte continentale. Or, cette redistribution associée à la chaîne érosion-transport-sédimentationsédimentation engendre de fortes variations de contrainte au sein de la croûte continentale, qui peuvent en retour engendrer des mouvements tectoniques. La modélisationmodélisation numériquenumérique réalisée depuis de nombreuses années sur cette thématique montre ainsi à quel point les processus de surface influencent la déformation tectonique, et vice versa. En effet, si l'érosion aide à localiser les contraintes sur certaines failles, les processus tectoniques entraînent la création de reliefs, ce qui va, de facto, favoriser l'érosion. Ces données numériques manquent cependant de calibrations réelles. Les liens entre les deux types de processus sont donc encore très mal contraints.
Dans une nouvelle étude, une équipe de chercheurs s'est ainsi attelée à modéliser la croissance des failles sous l'effet conjoint de l'érosion des rivières. L'équipe s'est concentrée sur un contexte tectonique particulier, qui est celui des zones de rifts continentaux.
Les rifts continentaux : entre processus tectoniques et érosifs
Ces régions sont soumises à une déformation extensive, qui mène à la formation d'un fossé d'effondrement (ou rift). Le rift est-africain et le bassin rhénan sont deux exemples typiques. Il s'agit du tout premier stade d’évolution menant à l’ouverture d’un nouvel océan. La formation d'un rift se caractérise par le développement de failles normales conjuguées (se faisant face), ce qui va mener à la formation un graben (fossé) : la partie centrale descend pour former un bassin dans lequel vont se déposer des sédimentssédiments, alors que les bords du fossé vont s'élever pour former un petit relief. Ce sont ce que l'on appelle des « épaules de failles ». Il s'agit d'une réponse isostatique de la croûte continentale, qui réagit à la décharge latérale. Ce contexte tectonique est relativement simple, avec la formation de structures de taille moyenne, de l'ordre de 200 kilomètres de large. La contrainte extensive est souvent localisée sur une seule faille majeure à la fois. La faille enregistrant la déformation maximale peut cependant varier au cours du temps. Il est en effet fréquent d'observer une relocalisation de la déformation sur une nouvelle faille.
Les rifts continentaux vont donc, par leur morphologiemorphologie, développer d'importants systèmes hydrologiques, avec les ruisseaux et rivières érodant les pentes et venant déposer le matériel sédimentaire dans le fond du bassin.
La morphologie des rifts continentaux est gouvernée par l’efficacité de l’érosion
En étudiant les systèmes fluviatiles dans 12 segments de rift, les chercheurs ont observé par la modélisation l'évolution des failles en fonction de l'efficacité des processus érosifs. Les résultats, publiés dans PNAS, montrent que la déformation reste localisée sur une même faille deux fois plus longtemps dans le cas d'une action érosive efficace des rivières par rapport à une action inefficace.
L'efficacité de l'érosion est associée à la rapiditérapidité du glissement sur les failles et à la résistancerésistance des roches. Une érosion peu efficace entraîne ainsi un relief plus prononcé, donc des contraintes topographiques plus importantes sur la croûte, ce qui mène rapidement à la formation de nouvelles failles en dehors du bassin. À l'inverse, plus l'érosion des reliefs formés par les failles est efficace, plus la duréedurée de vie des failles est importante. On observe dans ce cas une migration de la déformation sur de nouvelles failles à l'intérieur du bassin.
La structure finale du bassin sera donc nettement différente entre les deux cas. L'étude montre à quel point l'érodabilité et les conditions climatiques ont un impact sur la morphologie du paysage qui nous entoure.