Le réseau souterrain formé entre les arbres des forêts par la voie de champignons mycorhiziens a gagné un fort intérêt de la part du grand public ces dernières années mais est également plébiscité par les chercheurs, ce qui a pu mener à la propagation d'informations insuffisamment supportées par les données scientifiques.


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    La popularisation du curieux phénomène de réseau forestier, parfois sous le nom imagé de « Wood Wide Web » (en référence au World Wide Web, la toile que nous utilisons pour naviguer sur InternetInternet), et l'engouement dont il a fait l'objet ont probablement amené différents communicants à exagérer, déformer et romantiser la réalité des connaissances scientifiques en la matièrematière. La propagation de certaines hypothèses séduisantes mais peu étayées est en grande partie due à des contenus médiatiques parfois enjolivés, mais c'est aussi en partie la faute des scientifiques eux-mêmes ! C'est ce que conclut une étude publiée dans Nature Ecology & Evolution et menée par Justine Karst, de l'université de l'Alberta. Celle-ci voit d'un très bon œilœil l'intérêt du grand public pour ces structures biologiques croître, mais estime qu'il est important de rétablir la vérité sur le niveau de certitude que l'on peut accorder à certaines de ces idées.

    Les hyphes recouvrent l'extrémité des racines des plantes et forment un manteau fongique. Toutes ces structures mycéliennes en communication directe avec les radicelles augmentent notamment la surface d'échange avec la terre, et facilitent l'absorption de minéraux et d'eau. © Ellen Larsson, Wikimedia Commons
    Les hyphes recouvrent l'extrémité des racines des plantes et forment un manteau fongique. Toutes ces structures mycéliennes en communication directe avec les radicelles augmentent notamment la surface d'échange avec la terre, et facilitent l'absorption de minéraux et d'eau. © Ellen Larsson, Wikimedia Commons

    Des systèmes écologiques complexes qui fascinent tout le monde

    Rappelons de quoi il est question. Les mycorhizes sont des structures symbiotiques nées de la rencontre entre les hypheshyphes filamentaires de champignons et les radicelles de plantes. Leur réalité biologique est incontestable et bien documentée, de même que celle de réseaux mycorhiziens forestiers qui peuvent connecter de multiples arbres via ces liens de mycélium. Il n'est pas question de remettre leurs existences en cause, ni celle des échanges de nutrimentsnutriments, de signaux chimiques et d'eau qui les parcourent. Ce qui est par contre relevé par l'étude, c'est l'empressement avec lequel certains chercheurs donnent du crédit à des hypothèses peu ou pas assez soutenues. 

    En effet, les scientifiques auraient tendance à citer préférablement les études qui montrent des effets positifs des réseaux forestiers qui lient plusieurs arbres, alors que les données ne permettent finalement pas d'affirmer que c'est seulement le réseau qui est bénéfique, plusieurs facteurs peuvent entrer en jeu. Cela fait longtemps que la controverse autour de cet effet est connue, mais la communauté de chercheurs semble prendre de moins en moins de précautions. 

    Le concept séduisant de réseau mycorhizien pourrait avoir inspiré le monde artistique qui l'a par la suite popularisé auprès d'une large audience, comme ici dans le film <em>Avatar</em> de James Cameron (2009). © 20th Century Fox 
    Le concept séduisant de réseau mycorhizien pourrait avoir inspiré le monde artistique qui l'a par la suite popularisé auprès d'une large audience, comme ici dans le film Avatar de James Cameron (2009). © 20th Century Fox 

    Des hypothèses populaires mais fragiles

    L'étude montre en fait que ce type de connexion entre plusieurs arbres via le mycélium pourrait même ne pas être si commun que ça ! Quant à savoir si les jeunes arbres bénéficient d'un accès à ce réseau complexe, de nombreuses études montrent des effets négatifs comme positifs, et la plupart du temps neutres. Et si vous avez déjà entendu dire que les arbres adultes envoyaient des signaux d'alertes via le réseau mycélien pour prévenir les jeunes des attaques de prédateurs tels que les insectes, sachez qu'aucune étude scientifique fiable ne montre de tels résultats. Finalement, de nombreux facteurs peuvent mener des informations attrayantes à être déformées ou affirmées avec beaucoup d'enthousiasme et peu de précautions, et il est important de garder en tête que la science est produite par des humains soumis aux mêmes biais que le reste de la population.