À l’occasion des 20 ans de Futura, Bertrand Piccard, l’explorateur et environnementaliste suisse, s’associe à la rédaction pour vous proposer, tout au long de cette journée spéciale, des sujets qui interrogent. Parmi eux, celui du stockage, en lien direct avec une notion complexe : l’efficience. Daniel Averbuch, responsable du programme stockage d’énergie à IFP Énergies nouvelles (IFPEN), Philippe Azais, responsable de programme au Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) et les experts de Réseau de transport d’électricité (RTE) ont accepté de partager avec nous leur réflexion à ce sujet.
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La plupart des explorateurs reviennent de leurs expéditions en parlant de la beauté de la nature, de la fragilité de la biodiversité et de la nécessité absolue de protéger l'environnement.
Protéger l'environnement pour la survie de l'humanité, une nécessité ancrée dans la conscience de nombreux explorateurs. Les philosophes et les religieux, de leur côté, usent plutôt d'arguments sur la nécessité de tendre vers plus de bonté, de sagesse et de morale. Les écologistes demandent davantage de frugalité et de sobriété. Les alarmistes, eux, tentent de convaincre en annonçant la catastrophe - bien réelle - qui se prépare, et qui a d'ailleurs déjà lieu en de nombreux points du globe. Les jeunes générations, enfin, nous parlent de l'angoisse due au manque de perspective pour leur futur.
Perspectives d'avenir pour les générations futures
Force est de constater que toutes ces rhétoriques, aussi pertinentes soient-elles, ne suffisent pas à améliorer la situation. Bien souvent, ces discours ne sont compris que dans les cercles d'où ils sont issus et ne prêchent que des convaincus. On voit bien que notre société, hormis la parenthèse forcée que nous impose la crise du coronaviruscoronavirus, continue irréversiblement à polluer l'atmosphère, la terre et les océans, à détruire la biodiversité, mettant ainsi en danger sa propre survie. Alors que faut-il faire pour, enfin, basculer vers une société durable, capable de subvenir à ses besoins sans compromettre ceux des générations futures ?
Il faut s'adresser aux dirigeants, ceux qui ont le pouvoir de changer la donne, en sortant des discours de vœux pieux. Car il ne suffit pas de souhaiter quelque chose, si juste que ce soit, pour que ça se réalise. À l'évidence, ce ne sont ni les explorateurs, ni les philosophes, ni les prophètes, ni les écologistes qui décident de la marche du monde. On peut le déplorer, mais cela ne change rien à l'affaire. Aujourd'hui, ce sont principalement les acteurs économiques et politiques qui tiennent le gouvernail, et ce sont eux que nous devons embarquer dans la nécessaire révolution écologique. Une chose dont je suis certain : ce n'est ni par bonté, ni par amour de la Terre, ni par altruismealtruisme que nous réussirons à les convaincre. Nous devons donc faire l'effort de nous mettre à parler leur langage : en matièrematière de profit, de création d'emplois et de réélection...
Vers une transition écologique de la société
Le passage d'une société polluante, inefficiente, basée sur la surexploitation de ressources limitées, produisant une quantité aberrante de gaspillage et créant de profondes inégalités vers une société durable et juste est l'opportunité économique et industrielle du siècle.
Imaginez un instant le potentiel que représentent :
- la constructionconstruction de bâtiments neutres en carbone et la rénovationrénovation énergétique des logements anciens ;
- la production de véhicules électriques à batterie et à hydrogène, tant sur la route et dans les airsairs, que sur les océans ;
- le développement d'une économie circulaire avec valorisation de déchets ;
- la production d'énergies renouvelables ainsi que son stockage, la transition vers une agricultureagriculture saine et responsable.
Ce sont potentiellement des milliers de milliards de dollars d'opportunités économiques pour nos entreprises, pour le secteur financier et industriel, et des millions d'emplois créés. Un rapport des chercheurs de la Commission mondiale pour l'économie et le climatclimat chiffrait que des actions ambitieuses en faveur du climat pourraient générer 26.000 milliards de dollars de gains économiques et plus de 65 millions d'emplois ! N'est-ce pas plus motivant pour les climatosceptiques que des incitations à la décroissance ? N'est-ce pas logique avant même d'être écologique ?
Une fois présentées les opportunités économiques, il est également primordial de mentionner les risques liés au statu quo : ceux qui ont massivement investi dans les énergies fossiles ont dû avoir une bien mauvaise surprise lorsque le prix du pétrolepétrole est momentanément devenu négatif le mois dernier ; et que se passera-t-il quand demain il deviendra illégal de financer des activités qui polluent l'atmosphèreatmosphère en raison des millions de morts que cela entraîne, tout comme il est interdit de financer le trafic de droguedrogue ? De nombreuses institutions financières seront dans une position désastreuse. Pour les grandes entreprises, il existe également un risque indéniable pour leur image. À l'heure des réseaux sociauxréseaux sociaux, les campagnes contre les principaux pollueurs de la planète font de gros dégâts. Rappelons-nous les campagnes contre les conditions de travail inhumaines des sous-traitants de grandes marques de sport dans les années 2000 : voyant leur chiffre d'affaires diminuer et leur image ternir, elles avaient été forcées de changer leurs pratiques.
Le combat de Solar Impulse face à l'urgence écologique
Voilà les arguments que nous devons employer pour convaincre les décideurs. C'est précisément la mission de la Fondation Solar Impulse et du Label que nous avons lancé depuis deux ans. En attribuant un label qui certifie à la fois le bénéfice économique et environnemental de solutions technologiques, nous souhaitons prouver que l'opportunité économique et industrielle de la transition écologique est bien réelle. Nous avons déjà labellisé plus de 500 solutions dans les domaines de l'eau, de l'énergie, des infrastructures, de la mobilité, des processus industriels et de la production agricole. Nous souhaitons en labelliser encore beaucoup d'autres.
Je ne crois pas que les décideurs politiques et économiques, les gens qui ont aujourd'hui le pouvoir entre leurs mains, soient fondamentalement contre la protection de l'environnement. Bien sûr, quelques-uns sont aveuglés par l'appâtappât du gain et le profit à court terme, atteints d'un égoïsme qui relève presque de la psychopathie, mais je suis convaincu que ce sont des exceptions. La vaste majorité veut bien faire, mais doit composer avec des nécessités qui ne sont pas les mêmes que celles des écologistes, des jeunes, des philosophes, et des religieux. Ils ont des emplois à créer ou à sauvegarder, des actionnaires à contenter, des électeurs à satisfaire, des usines à faire tourner... Et c'est avant tout à l'aune de ces priorités qu'ils prennent leurs décisions. Il faut donc pouvoir se mettre à leur place et leur offrir une alternative qui serve leurs intérêts immédiats et ceux de la société sur le long terme. C'est justement cela que j'appelle le passage de l'idéalisme au réalismeréalisme. Et c'est à mon sens le seul moyen de basculer notre société dans un nouveau modèle de croissance au XXIe siècle : une croissance qualitative, efficiente et rentable, plutôt que quantitative, polluante et coûteuse.
Futura a 20 ans
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