Les punaises de lit sont très présentes dans l'actualité ces derniers jours et suscitent de vifs débats. Face à cette montée en puissance, il est essentiel de comprendre ces petites créatures pour mieux les combattre. Leur prolifération pose des questions de santé publique et a des implications économiques. Quelles sont les raisons de leur retour en force et comment les éloigner efficacement ? Un sujet qui ne laisse personne indifférent.
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Les insectes pourraient bien sauver le monde... Mais, il faut le reconnaître, certains nous le compliquent un peu ... Parmi eux, la palme revient peut-être à la punaise des lits ce compagnon grand voyageur de nos habitations et voituresvoitures-lits, qui après des décennies de tranquillité, revient nous déranger sérieusement.
Ces insectes indélicats ne font pas de différence dans la qualité des habitations et s'installent partout, des hôtels de luxe aux hôpitaux, HLM et quartiers bourgeois. Suivant la plus grande partie des populations humaines modernes, ces punaises préfèrent désormais la ville.
Les punaises des lits s'invitent même à l'Assemblée nationale. Si les matelas de nos élus ne sont pas encore envahis, des députés de la France insoumise viennent de lancer une campagne pour que l'infestation de ces indélicats soient reconnue comme un problème de santé publique et demandent un encadrement des tarifs des entreprises de désinsectisation.
Qu'est-ce qui explique ce retour et ce succès dans tous nos habitats, quelles solutions pour s'en débarrasser ? Leur biologie explique-t-elle leur succès ? Au-delà de nos craintes et phobiesphobies, quel est l'impact véritable de ces hématophages ?
Que nous veulent-elles ?
Insecte hématophage, la punaise des lits (Cimex lectulariusCimex lectularius) est un petit insecte hémiptère de 6 mm doté de grandes capacités sensorielles pour détecter ses proies dans le noir ou la pénombrepénombre. Sa biologie est celle d'un parasite externe : grande féconditéfécondité (de 200 à 500 œufs par femelle), capacité de résister à la privation de nourriture (plus de trois mois sans se nourrir, voire plus), perte des ailes mais capacité à être transporté : vêtements, meubles, bagages, etc.) pour se nourrir exclusivement de sang. Autre particularité qui peut expliquer leur succès, les mâles, plutôt agressifs, pratiquent un curieux mode de reproduction en injectant directement les spermatozoïdesspermatozoïdes dans le l'abdomenabdomen de la femelle avec un organe-seringue, sans passer par les voies génitales, que l'on appelle l'insémination traumatique. Pour retrouver les femelles et plus largement leur congénères (et se regrouper), elles possèdent une écologie chimique très efficace (dont une odeur que nous pouvons sentir).
Les repas de sang sont nécessaires pour les larves pour boucler leur développement et pour les adultes pour se reproduire et pondre. La piqûre, associée à une salivesalive avec diverses propriétés, provoque des démangeaisonsdémangeaisons et des allergies, et quelquefois des phobies socialesphobies sociales. Mais rassurez-vous : malgré un nombre d'insectes pouvant être localement important, voire impressionnant, leur petite taille n'impacte qu'exceptionnellement la qualité du sang de leur hôte (pas de risque d'anémieanémie).
Du fait de son compagnonnage avec l'Homme, la punaise des lits est l'un des animaux très largement répandu dans le monde entier. Il peut vivre aux latitudes polaires (stations, bases, etc.), aux altitudes élevées (refuges, camps), dans les désertsdéserts, et... partout ailleurs.
Sous les tropiquestropiques, une deuxième espèceespèce prolifère : Cimex hemipterus, même mode de vie, même appétit pour l'humain.
Bien au chaud, dans la grotte…
Mais pourquoi donc ce satané insecte nous « aime »-t-il tant ? Hémiptère Hétéroptère de la famille des Cimicidae, cette punaise hématophage stricte ne peut se nourrir que sur des hôtes mammifères à sang chaud. Elle est pourvue de pièces buccales transformées pour piquer à travers les tégumentstéguments de son hôte qu'elle approche dans leurs nids ou leur gîtes. Toutes les espèces de cette famille (une centaine dans le monde) ont cette biologie d'hématophages et vivent au dépens d'hôte divers, oiseaux ou mammifèresmammifères comme les chauves-sourischauves-souris, dans leurs nids ou des habitats particuliers comme les grottes.
C'est là qu'intervient le climatclimat. Les premières populations humaines modernes ont dû faire face à plusieurs glaciationsglaciations des parties tempérées de notre Planète (la dernière en Europe remonte de -115 000 à -10 000 ans) et ont utilisé l'habitat cavernicole partout où cela était possible. Vivaient alors un peu partout des Cimicidae et autres parasites des chauves-souris, autres mammifères et oiseaux troglophiles.
On pense donc que c'est dans cet habitat refuge que le compagnonnage avec l'humain s'est établi. Les populations humaines ont commencé à emporter avec eux cette espèce lors de leurs déplacements puis dans leurs habitats extérieurs, et une véritable domesticationdomestication (un commensalisme pour être précis) s'est mise en place.
C'est encore une hypothèse, mais qui commence à être étayée par les résultats de la génétiquegénétique des populations actuelles : deux lignées de punaises cohabiteraient, l'une inféodée aux chauves-souris, l'autre à l'Homme. C'est la marque d'une microévolution qui n'est pas allée jusqu'à son terme : l'apparition de deux espèces différentes.
Indice supplémentaire, on commence à trouver des preuves archéologiques de la présence des Cimicidae auprès des premiers humains. Sinon, le premier Cimicidae connu a été retrouvé dans de l'ambre de Birmanie (environ 99 Ma d'années) et possédait, lui, des ailes.
Cette relative « longue » histoire n'en est peut être qu'à ces débuts car il semblerait qu'il n'y ait pas eu encore d'adaptation de pathogènespathogènes humains à ce « nouveau » vecteur. Il s'agit là d'un problème crucial : si jamais des pathogènes (virus, bactériesbactéries) étaient transmis aux humains par le biais des punaises, alors il ne s'agirait plus seulement de piqûres, certes très désagréables mais pas très dangereuses. Que nous réserve l'avenir à ce sujet ?
Pourquoi ce retour ?
Les punaises de lits ont été bien contrôlées pendant le XXe siècle grâce à l'utilisation des insecticides de synthèse, associée à l'amélioration des conditions de vie dans les habitats. Leur retour serait lié au phénomène de la résistancerésistance à ces insecticidesinsecticides. Refugiées dans quelques zones adéquates, les punaises ayant progressivement acquis cette résistance ont pu refonder des populations et repartent à la conquête de leurs anciens territoires. Un mouvementmouvement amplifié par l'accroissement des voyages. Le manque d'information, dû au problème psychologique et social que représente une infestationinfestation par les punaises des lits est une limitation à leur éradication (par exemple entre propriétaire et locataire, hôtelier et clients, etc.).
Les nouvelles stratégies de lutte
Elles sont en plein développement, y compris de nouveaux insecticides « biologiques » (par exemple des huiles essentielles).
La détection est la première étape et la discrétion de ces insectes fait que l'on recourt quelquefois à des chienschiens dressés spécialement. Ils permettent d'identifier les refuges domestiques (en général dans les chambres à coucher, autour des lits, etc.).
Le lavage à 60° minimum, la congélation, la chaleur au-dessus de 45° (par exemple lors du repassage des vêtements) sont des méthodes à utiliser. Pareil pour les meubles, si c'est possible. Il existe aussi des méthodes traditionnelles : par exemple, certaines plantes collantes sont utilisées comme adhésif pour piéger les insectes et l'on sait que les substances poudreuses (farine, diatomitediatomite, etc.) les repoussent. Un lit avec ses quatre pieds dans de la farine est ainsi protégé, mais les punaises peuvent se laisser tomber du plafond...
Dans tous les cas, des combinaisons de méthodes permettant la détection précoce, la rupture trophique (empêcher que les punaises se nourrissent et finissent par mourir de faim) et divers traitements sont à utiliser. Mais la punaise de lit est rusée : elle peut « hiberner » (processus de diapause à basse température, à partir de 16 °C) qui permet aux punaises adultes d'attendre des lendemains meilleurs.
Quant à la lutte biologique, elle semble complexe à mettre en œuvre. En effet, il semble délicat de lâcher des insectes et autres habitants des maisons comme les araignéesaraignées, scolopendres, psoquespsoques, punaise réduve masquée... pour lutter contre les punaises des lits, malgré leur efficacité avérée.
Vous l'aurez compris, les punaises de lits ne sont pas des compagnons sympathiques mais pour l'instant, ils ne sont pas des vecteurs de maladies graves. Mais c'est une situation qui pourrait changer et il vaut envisager de mieux lutter contre ces hôtes indésirables. Un dernier élément pour, quand même, leur trouver quelque utilité : la police scientifique pourrait en effet les utiliser dans les enquêtes criminelles. L'ADNADN humain peut persister jusqu'à 90 jours après un repas de sang. La punaise de lit rejoindrait alors les Experts et une nouvelle branche des sciences forensiques, l'« hématophagie forensique » naîtrait...