Comme quoi le vivant a plus d’un tour dans son sac lorsqu’il s’agit de survie... Des chercheurs viennent de découvrir que les cténaires, organismes marins souvent confondus avec les méduses, sont capables de fusionner entre eux lorsqu’ils sont blessés !


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    Il est possible d'observer ces étranges créatures dans toutes les mers et océans du globe. Mais attention, leur forme et leur texture gélatineuse ne doivent pas entraîner leur confusion avec des méduses. Il s'agit en effet des cténaires, des organismes planctoniques qui se reconnaissent par leur façon de se déplacer dans l'eau grâce à des cilscils locomoteurs formant des sortes de peignes. En fonction de la lumièrelumière, ceux-ci peuvent d’ailleurs apparaître iridescents. Se présentant souvent sous la forme de poche ou de poire, ils ne sont pas urticants au contraire des méduses, même si certaines espèces peuvent posséder de longs tentacules.

    Des créatures fascinantes, dont les chercheurs viennent de percer un secret, un peu par hasard. Lorsqu'ils sont blessés, les cténaires auraient en effet la capacité à se régénérer en... fusionnant avec un autre individu ! Si le monde du vivant a su au fil du temps déployer de nombreuses stratégies de survie, celle-ci s'avère cependant unique dans le monde animal.

    Les cténaires sont souvent confondus avec les méduses. Ils sont pourtant très différents. © Kevin Raskoff, <em>Wikimedia Commons</em>, domaine public
    Les cténaires sont souvent confondus avec les méduses. Ils sont pourtant très différents. © Kevin Raskoff, Wikimedia Commons, domaine public

    Une stratégie de survie totalement originale

    C'est en étudiant ces organismes fragiles qu'une équipe de chercheurs a eu l'occasion d'observer ce phénomène en laboratoire, pour la première fois. Alors qu'ils effectuaient des observations de routine sur un échantillon de Mnemiopsis leidyi, ils se sont rendu compte qu'un individu manquait à l'appel. Impossible pourtant qu'il se soit échappé de son aquarium. Perplexes, les chercheurs ont donc inspecté de près les cténaires encore présents... pour réaliser que l'un d'eux était anormalement gros. Une analyse approfondie de ce spécimen a permis de montrer qu'il s'agissait en fait de deux individus ayant fusionné.

    Des tests ont par la suite montré que ce phénomène se produisait de manière quasi systématique lorsque deux individus « blessés » étaient mis ensemble. Les chercheurs ont alors pu observer en direct le processus de fusionfusion, qui s'avère être très rapide. En seulement 24 heures, le nouvel individu est totalement formé. L'étude publiée dans la revue Current Biology démontre d'ailleurs la qualité de la fusion des organes mais également du système nerveux.

    Test montrant la synchronisation de la contraction musculaire sur un individu fusionné. © Mariana Rodriguez-Santiago, CC by-sa
    Test montrant la synchronisation de la contraction musculaire sur un individu fusionné. © Mariana Rodriguez-Santiago, CC by-sa

    Pourtant, même s'ils ont l'airair de se comporter comme une seule entité, les résultats révèlent que le cténaire fusionné n'est pas réellement un unique organisme. Il présente en effet les signatures ADN spécifique aux deux individus d'origine.

    Les cténaires, des organismes aux capacités étonnantes

    Malgré la facilité avec laquelle il a été obtenu en laboratoire, il est cependant probable que ce phénomène ne se réalise que très rarement dans la nature, en raison de la proximité nécessaire des deux individus. Bien que nombreux dans les océans, la densité de cténaires reste faible. Ce qui explique peut-être pourquoi la fusion entre deux individus n'avait jamais été observée dans le milieu naturel jusqu'à présent.

    Cette capacité s'ajoute à d'autres déjà recensées chez ces espèces marines, décidément très surprenantes. Une récente étude révélait en effet la capacité de cténaires adultes à « rétrograder », repassant ainsi à un stade larvaire, quand les conditions environnementales sont dégradées. Un processus de rajeunissement déjà observé chez d'autres espèces, notamment chez la méduse Turritopsis dohrnii et chez le téniaténia du chienchien (Echinococcus granulosus)).

    Mais pour l'instant, les cténaires restent les seuls organismes connus capables de fusionner. Les chercheurs souhaitent désormais étudier d'autres espèces pour voir si cette capacité est partagée au sein de l'ensemble du groupe.