Pour les 20 ans de Futura et, en cette journée de l’énergie, Bertrand Piccard – ambassadeur des Nations unies pour l’Environnement, conseiller spécial auprès de la Commission européenne et président de la fondation Solar Impulse, endosse le rôle de rédacteur en chef pour faire un point sur les énergies renouvelables à commencer par leur impact sur l’environnement. Un envers du décor pas complètement vert.


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    « J'ai souhaité donner la parole à Frédéric BurguièreFrédéric Burguière, afin qu'il nous donne sa vision d'un bilan actuel de la production d'une énergie verteénergie verte. Il est important que toutes les opinions sur un sujet aussi important puissent être partagées ».

    C'est un fait, produire une énergie verte permet à l'utilisateur final de réduire son empreinte carbone. Toutefois, la production industrielle des équipements (éolienne, panneaux solaires, etc. impacte plus ou moins l'environnement. C'est pourquoi il est convenu de procéder à une analyse du cycle de vie (ACVACV) de ces derniers. 

    L’éolien, une production d’électricité peu impactante

    AcierAcier, matériaux composites, électronique..., les matériaux utilisés pour construire une éolienne (un mât nécessite entre 25 et 40 tonnes d'acier) sont responsables d'importantes émissions de gaz à effet de serre. Côté installation, les fondations nécessitent entre 1.300 et 1.500 tonnes de béton armébéton armé. À ces dernières, il faut prévoir la réalisation des infrastructures routières pour effectuer le montage et la maintenance de l'éolienne. Toutefois, ces points négatifs sont contrebalancés par une duréedurée d'exploitation comprise entre 20 et 25 ans et un recyclage à 98 % de la structure. À ce jour, seules les pales en matériaux composites ne disposent pas d'une filière de recyclage. Malgré tout, l'ACV du parc éolien indique que cette solution émet très peu de CO2 :

    • 12,7 g CO2 eq/kWh pour l'éolien terrestre ;
    • 14,8 g CO2 eq/kWh pour l'éolien offshore.

    Des chiffres qui placent l'éolien loin devant la géothermie, le photovoltaïque et les énergies fossiles nettement plus polluantes.

    En France, la capacité de production de l'éolien terrestre représente 18.310 MW. Une production qui devrait être de 35.600 W à l'horizon 2028 si les objectifs fixés dans le programme pluriannuel de l'énergie sont respectés. En revanche, l'éolien offshore est à la traîne. Pour la même période, il devrait être de seulement 5.200 W. © engel.ac, Adobe Stock
    En France, la capacité de production de l'éolien terrestre représente 18.310 MW. Une production qui devrait être de 35.600 W à l'horizon 2028 si les objectifs fixés dans le programme pluriannuel de l'énergie sont respectés. En revanche, l'éolien offshore est à la traîne. Pour la même période, il devrait être de seulement 5.200 W. © engel.ac, Adobe Stock

    Le photovoltaïque, une fabrication polluante qui affecte sol et eau

    Ils ont le ventvent en poupe, mais comme l'éolien, les panneaux photovoltaïques voient leur bilan être fortement alourdi par leur procédé de fabrication. Si les panneaux photovoltaïques ne contiennent pas de terres rares, les cellules photovoltaïquescellules photovoltaïques (waferwafer) sont issues de la transformation de la silicesilice en silicium cristallin. Pour ce faire, cette étape requiert encore des besoins en énergie très élevés. À ce premier inconvénient, s'ajoute un usage intensif de produits chimiques (acétoneacétone, peroxyde d'hydrogèneperoxyde d'hydrogène, ammoniaqueammoniaque, acide sulfuriqueacide sulfurique...) et plus aberrantaberrant, d'eau ultra-pure pour nettoyer les wafers (source CNRS) !

    Le saviez-vous ?

    Une cellule photovoltaïque nécessite 45 g de produits chimiques pour une surface de un cm².

    Un processus de fabrication complexe dont l'impact sur l'environnement (qualité de l'eau, sol, végétation) pose un véritable problème, principalement en Chine où sont fabriqués 70 % des panneaux photovoltaïques. Malgré ce sombre tableau, il est à noter que la réalisation des wafers nécessite aujourd'hui six fois moins de siliciumsilicium qu'il y a vingt ans. Une fois installé, un panneau photovoltaïque, assure une production solaire d'électricité pendant entre 25 et 30 ans mais voit sa puissance diminuer de 10 % au bout de 10 ans. Nécessitant peu de maintenance, cet équipement bénéficie d'un bon retour énergétique (entre 1 et 1,5 année selon la région et de son installation). Bon an mal an, le résultat de l'analyse du cycle de vie des panneaux photovoltaïques est de 48 g CO2 eq/kWh. Un résultat qui place ce mode de production d'énergie largement devant le pétrolepétrole nettement plus polluant (840 g CO2 eq/kWh).

    L'analyse du cycle de vie des énergies permet de réaliser un classement fiable. Malgré des problèmes environnementaux liés à la fabrication des wafers, les panneaux photovoltaïques bénéficient d'un taux d'émission de gaz à effet de 48 g CO<sub>2</sub>/KWh © Ademe
    L'analyse du cycle de vie des énergies permet de réaliser un classement fiable. Malgré des problèmes environnementaux liés à la fabrication des wafers, les panneaux photovoltaïques bénéficient d'un taux d'émission de gaz à effet de 48 g CO2/KWh © Ademe

    L’hydraulique, une énergie renouvelable, stockable et flexible

    Première source d'énergie renouvelableénergie renouvelable dans la production d'électricité (11,2 %), l'hydraulique est également la deuxième source d'énergie en France. Pendant leur phase d'exploitation, les centrales hydrauliques (de lac, Step...) ne consomment pas de ressource naturelle. Avec une durée de vie de 40 à 50 ans pour les équipements et de près de 100 ans pour les barrages de retenue, cette source d'énergie affiche de loin le plus faible taux d'émissionémission de gaz à effet de serregaz à effet de serre : 4 g CO2 eq/kWh.

    Voir aussi

    100 % d'énergies renouvelables dans le monde, c'est possible grâce aux Step

    Toutefois, la constructionconstruction de ces centrales et des barrages de retenue peut être responsable selon le lieu où elle est réalisée, de profonds bouleversements environnementaux et d'importantes émissions de gaz à effet de serre (méthanisationméthanisation des végétaux lors du remplissage, transport des matériaux...). Toutefois, les installations vieillissantes peuvent être réhabilitées et modernisées (sous conditions) évitant ainsi un démantèlement et de nouvelles constructions, sources de nouvelles pollutions. Une solution qui satisferait l'augmentation de l'hydraulique à 3 TWh fixée à l'horizon 2023.

    L’hydraulique marin, un impact parfois important

    Si les centrales hydrauliques sont à 99,99 % installées dans les terresterres, la mer peut être source d'énergie renouvelable. Seule et unique site au monde, l'usine marée motrice de la Rance utilise l'énergie des maréesmarées pour produire de l'électricité. Si l'idée semble bonne, l'impact sur l'environnement, est considérable (envasement de l'estuaireestuaire, modification du régime des marées...).

    Toutefois, parmi les dernières avancées technologiques, la possibilité d'utiliser l'énergie produite par les vaguesvagues (32 pWh/an environ) sans impacter l'environnement. Imaginé par Eco Wave Power, ce concept innovant est basé sur l'arrimage de flotteurs spécifiques aux structures marines existantes. D'autres solutions sont à l'étude comme l'installation de stations de transfert d'énergie par pompagestations de transfert d'énergie par pompage (STEP) sur les côtes, l'exploitation de la pressionpression du fond de la mer pour stocker l'énergie. 

    Haut de 120 m, le barrage de Bort-les-Orgues développe une puissance de 235 MW, soit la consommation électrique de 128.000 habitants. En parallèle, l'étendue d'eau courant sur une vingtaine de kilomètres, a permis de développer de nombreuses activités touristiques. © Office du tourisme de la Corrèze
    Haut de 120 m, le barrage de Bort-les-Orgues développe une puissance de 235 MW, soit la consommation électrique de 128.000 habitants. En parallèle, l'étendue d'eau courant sur une vingtaine de kilomètres, a permis de développer de nombreuses activités touristiques. © Office du tourisme de la Corrèze

    La géothermie, une production d’énergie encore limitée au chauffage

    Afin de capter la chaleurchaleur naturellement stockée dans le sous-sol et les nappes d'eaux souterraines, la géothermie fait appel à différents procédés : capteurscapteurs horizontaux ou captage vertical. Des solutions sont principalement utilisées pour produire du chauffage en maison individuelle, en immeuble... Ne nécessitant pas de stockage et non polluantes, les centrales géothermiques sont plutôt bien développées en France (59 sites). À titre d'exemple, la centrale géothermiquecentrale géothermique de Beinheim, en Alsace, représente à elle seule un gain de 9.000 tonnes de CO2/an. Énergie propre, elle n'est, en revanche, pas renouvelable. La durée de vie des sites d'exploitation (réservoir) étant comprise entre 30 et 50 ans. Enfin, comme les autres énergies vertes, la géothermie est victime de la construction de ses infrastructures et des énergies fossiles utilisées pour les forages profonds. Au global, elle affiche un taux d'émissions de gaz à effet de serre de 45 g CO2 eq/kWh, la plaçant juste avant le photovoltaïque.

    • La chaleur pour produire de l'électricité : encore peu utilisée en France, la géothermie à des fins électriques se limite actuellement à deux sites qui produisent respectivement 1,5 MW et 4,5 MW. À noter que la production d'électricité géothermique devrait être de 24 MW à l'horizon 2023-2028.

    La méthanisation, une énergie qui valorise les déchets

    Parmi les autres procédés de production d'énergie verte, la méthanisation permet de produire un gaz vert décarboné. Obtenue à partir de déchetsdéchets, de résidus de culture ou d'effluents d'élevage, cette technique ne laisse qu'un résidu (digestat). Ce dernier est utilisé pour fertiliser ou amender les sols. Autre avantage, le biogaz s'utilise aussi bien pour alimenter une chaudière, le moteur d'un véhicule ou être intégré au réseau de gaz naturelgaz naturel. Avec une empreinte carbonecarbone de 23,4 g CO2 eq/kWh, le biogazbiogaz se place loin devant le gaz naturel.

    La méthanisation des déchets a plus d'un avantage. Outre la production d'une énergie renouvelable et la réduction des émissions de gaz à effet de serre, ce procédé permet de valoriser les déchets de produire, grâce à ses résidus, un engrais naturel. © GRDF
    La méthanisation des déchets a plus d'un avantage. Outre la production d'une énergie renouvelable et la réduction des émissions de gaz à effet de serre, ce procédé permet de valoriser les déchets de produire, grâce à ses résidus, un engrais naturel. © GRDF

    Déterminer l’impact des énergies sur l’environnement

    Afin de déterminer le cycle de vie d'une énergie ou d'un matériaumatériau, l'ACV est un outil normalisé (ISOISO 14040 à 14043). Pour obtenir une vision globale, l'ACV tient compte de :

    • de l'extraction des matièresmatières premières ;
    • du traitement des matières premières ;
    • du mode de fabrication ;
    • du transport sur site ;
    • de la construction ;
    • de la durée d'exploitation ;
    • de la destruction ou du recyclage des équipements.

    Réduire les émissions de gaz à effet de serre et tendre vers une énergie toujours plus propre est aujourd'hui une réelle nécessité. Si les solutions actuelles permettent au quotidien de diminuer notre impact environnemental, il y a encore beaucoup à faire concernant leur production ou leur mise en œuvre. C'est pourquoi il est indispensable d'économiser l'énergie, même renouvelable, par tous les moyens d'efficience possibles.

     

     

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