Le lien entre architecture ancienne et cycle solaire continue d'intriguer les scientifiques. Si ce sujet peut sembler anecdotique au regard de toutes les théories farfelues qui peuvent circuler en lien avec le sujet, des équipes de chercheurs se penchent sérieusement et scientifiquement sur des cas spécifiques. Une équipe interdisciplinaire de l'université de Malaga travaille sur ces questions architecturales dans la nécropole égyptienne de Qubbet el-Hawa. L'objectif de ces chercheurs est de démontrer que les plans de certains tombeaux sont liés à des questions astronomiques.

À l'époque où l'île Éléphantine était un haut lieu de l'Égypte ancienne, les hauts fonctionnaires et les membres de l'élite se faisaient enterrer sur la rive ouest de cette île située sur le Nil en face d'Assouan. C'est l'étude d'une tombe, celle nommée QH33 (comme les initiales du site), qui est au cœur de cette étude. L'article scientifique, publié dans Mediterranean Archaeology and Archaeometry, explicite les méthodes d'analyse sur le site archéologique de Qubbet el-Hawa.

Une méthodologie particulière

Pour tenter de comprendre si les architectes égyptiens de la région utilisaient le cycle du soleil pour l'associer aux éléments géographiques locaux, toute une méthodologie a été appliquée. Les chercheurs ont utilisé, entre autres, des calculs d'angles additionnés à l'usage de visions satellites ainsi qu'à une simulation du ciel en 1825 avant notre ère, date approximative des travaux de construction. Le tout étant de restituer l'élévation du soleil cette année-là en lien avec le bâtiment tel qu'il devait être au moment de son utilisation.

 Intérieur du tombeau HQ33. © Université de Jaen et de Malaga
 Intérieur du tombeau HQ33. © Université de Jaen et de Malaga

Des calculs qui coïncident avec le solstice d'hiver l'année de construction du tombeau

Le résultat de ces calculs mène les chercheurs à estimer que l'orientation de l'axe longitudinal de l'hypogée est en adéquation avec le lever apparent du soleil du solstice d'hiver, avec une différence minimale de 0,74º pour l'année estimée de construction. L'équipe s'interroge à propos de cette orientation. Elle leur fait penser à l'orientation du temple dédié à la déesse Satis sur l'île Éléphantine ainsi qu'au lever héliaque de l'étoile Sothis, déesse et personnification divine de l'étoile Sirius, annonciatrice des crues du Nil.

Grâce à tous ces calculs et à ces modélisations, les résultats ouvrent plusieurs pistes et hypothèses. Pour l'équipe, il est indéniable que le tombeau QH33 a été construit en prenant en compte le cycle du soleil. Un cycle qui a permis d'obtenir tout au long de l'année différents éclairages du tombeau en adéquation avec les croyances de l'époque, le soleil étant lié à la renaissance. Ce qui démontre que les architectes égyptiens locaux, tant pour leurs plans que pour leurs travaux en élévation connaissaient les données solaires de leur époque. De plus, ils savaient mettre en application leurs plans pour bénéficier de ces mouvements dans le ciel.

Schéma géométrique. © <em>Mediterranean Archaeology and Archaeometry</em>
Schéma géométrique. © Mediterranean Archaeology and Archaeometry

La preuve d'une excellente formation des architectes

De ce fait, la tombe QH33 est le plus ancien exemple de projet funéraire privé où des compétences de haute volée ont été mises en application en lien avec les aspects techniques, liés au soleil, et religieux de l'époque. Ce qui induit que ces individus au savoir poussé bénéficiaient probablement d'une formation exigeante au cours de leur vie dispensée éventuellement dans la région afin d'être adaptée à ses singularités de terrain et de géographie.

Des travaux qui ne sont pas sans rappeler l'orientation et l'éclairage du soleil dont bénéficient certaines statues du temple de Abou Simbel à chaque année à deux dates précises du calendrier. L'étude de l'architecture égyptienne et la compréhension des croyances anciennes n'ont pas fini d'alimenter la recherche.