Les voitures « hybrides », où le moteur thermique est aidé par un ou plusieurs moteurs électriques, sont à la mode. Mais, démontre un chercheur suédois, il y a plus simple : comprimer de l’air au freinage et s’en servir ensuite pour assister le moteur lors des accélérations.

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Per Tunestål est persuadé que l’hybride à air est une solution plus simple que l’hybride électrique. © Lunds Universitet

Per Tunestål est persuadé que l’hybride à air est une solution plus simple que l’hybride électrique. © Lunds Universitet

Parfois, il faut savoir penser autrement. Alors qu'aujourd'hui tous les regards se tournent vers l'électricité, les ingénieurs imaginent facilement des solutions électriques. C'est le cas chez les constructeurs automobiles où l'on investit beaucoup dans les voitures entièrement électriques ou « hybrides ». À l'Université de Lund, en Suède, Per Tunestål, ingénieur, explore une autre idée, honorablement connue : celle du moteur à air comprimé.

Puisque l'on sait très bien faire des moteurs entraînés par de l'air sous pression, lequel met en mouvement les pistons dans leurs cylindres, pourquoi ne pas réaliser un système hybride où cette énergie supplémentaire viendrait assister un classique moteur thermique (essence, Diesel ou GPL) lors des accélérations ? Le principe n'est pas nouveau mais n'avait semble-t-il jamais été étudié que théoriquement. Le chercheur, lui, est passé à l'acte. Comme sujet de thèse, l'un de ses étudiants, Sasa Trajkovic, a modifié un moteur de camion Scania pour étudier la faisabilité technique.

La Volvo Air Motion, une étude du constructeur suédois pour un véhicule fonctionnant (uniquement) à l'air comprimé. Et si la bonne idée était une hybridation avec un moteur thermique ? © Volvo Design

La Volvo Air Motion, une étude du constructeur suédois pour un véhicule fonctionnant (uniquement) à l'air comprimé. Et si la bonne idée était une hybridation avec un moteur thermique ? © Volvo Design

Un constructeur indien intéressé

Selon Per Tunestål, le moteur hybride à air est bien plus simple à fabriquer et à faire fonctionner que l'hybride électrique. Il est aussi moins encombrant. On peut récupérer ainsi 48 % de l'énergie du freinage, qui sera restitué au moment des accélérations, au démarrage du véhicule par exemple. Le principe est particulièrement adapté à la conduite urbaine, où la vitesse varie beaucoup, avec de nombreux freinages. Selon Sasa Trajkovic, un tel hybride thermique-air réduirait de 58 % la consommation d'un bus citadin, par exemple.

Une idée ancienne : sur ce vénérable moteur Renault 4PO3 équipant un biplan Stampe&Vertongen SV4C et qui fonctionne sans batterie, le démarrage est assuré par l’injection d’air comprimé dans les cylindres. En haut à gauche (au-dessous du boulon bleu), on remarque le compresseur, peint en vert, reconnaissable à ses ailettes de refroidissement. Entraîné par l’arbre moteur, il envoie l’air dans la bouteille située à l’arrière (vers la droite). La commande du démarreur libère la pression dans un système de distribution (sous le boulon bleu) qui l’envoie successivement vers chacun des quatre cylindres par les tuyaux d’aluminium verticaux et coudés, bien visibles. La conception remonte aux années 1930. Aujourd’hui, le contrôle électronique des soupapes permet d’aller plus loin et de faire fonctionner le moteur en associant les explosions et l’air comprimé. © Alain Deselle

Une idée ancienne : sur ce vénérable moteur Renault 4PO3 équipant un biplan Stampe&Vertongen SV4C et qui fonctionne sans batterie, le démarrage est assuré par l’injection d’air comprimé dans les cylindres. En haut à gauche (au-dessous du boulon bleu), on remarque le compresseur, peint en vert, reconnaissable à ses ailettes de refroidissement. Entraîné par l’arbre moteur, il envoie l’air dans la bouteille située à l’arrière (vers la droite). La commande du démarreur libère la pression dans un système de distribution (sous le boulon bleu) qui l’envoie successivement vers chacun des quatre cylindres par les tuyaux d’aluminium verticaux et coudés, bien visibles. La conception remonte aux années 1930. Aujourd’hui, le contrôle électronique des soupapes permet d’aller plus loin et de faire fonctionner le moteur en associant les explosions et l’air comprimé. © Alain Deselle

Dans son moteur, le compresseur est entraîné lors des freinages et met en pression l'air contenu dans un réservoir. Lorsque le moteur a besoin de puissance supplémentaire, cette pression est injectée dans le cylindre par les soupapes d'admission. Par moment, le moteur gonfle la bouteille d'air comprimé tandis qu'à d'autres, il récupère son énergie. Ce ballet mécanique de soupapes est contrôlé électroniquement.

Sa réalisation concrète a permis de valider le concept et de mettre au point les détails. « Cette technologie est tout à fait réaliste, explique Per Tunestål. J'ai été récemment contacté par un fabricant d'automobiles indien qui souhaite commencer à produire des voitures hybrides à air comprimé. » Le chercheur suédois ne révèle pas le nom de l'entreprise mais on sait que le géant Tata s'est intéressé de près aux moteurs à air comprimé et avait approché le groupe français MDI, créateur de l'Airpod.

Pour l'instant, la transformation du moteur Scania n'a été que partielle. L'équipe veut aller jusqu'à la réalisation d'un moteur fonctionnel.