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Le Giec vient de rendre public le premier volet de son cinquième rapport d'évaluation dédié au changement climatique. Ce vendredi matin, à 10 h, le groupe a diffusé le résumé à l'intention des décideurs. L'embargo sur les résultats a été levé, mais il faudra attendre lundi 30 septembre 2013 pour pouvoir consulter librement en ligne le rapport du groupe de travail I. Ce document est consacré aux éléments scientifiques permettant d'évaluer la dynamique du climat passé, présent et futur.
Le groupe de travail I fait le point sur les observations, pour l'atmosphère, l'océan, la cryosphère et le niveau des mers, à partir de mesures récentes et plus anciennes. Il dresse ensuite le bilan des perturbations radiatives, évalue les modèles climatiques, et discute les projections à court et long terme. Dans son précédent volumevolume, paru en 2007, le Giec prévoyait pour 2100 une augmentation de la température atmosphérique globale de 1,8 °C pour le scénario d'émissionémission le plus optimiste. Avec le scénario le plus pessimiste la température grimperait de 4 °C. En appliquant ces mêmes scénarios, l'augmentation du niveau moyen de la mer varierait entre 18 et 59 cm d'ici la fin du siècle.
Le graphique du haut indique les moyennes annuelles mondiales de températures et tendance linéaire. L’ordonnée de gauche montre des anomalies de température par rapport à la moyenne 1961 - 1990, et l’ordonnée de droite les températures réelles, toutes deux en °C. Sont présentées les tendances linéaires pour les 25 (en jaune), 50 (en orange), 100 (en violet) et 150 dernières années (en rouge). L’augmentation totale de température, de la période 1850 à 1899 à la période 2001 à 2005, est 0,76 °C ± 0,19 °C. Sur le graphique du bas sont indiquées les tendances mondiales linéaires de températures au cours de la période 1979 à 2005, estimées à la surface (à gauche) et dans la troposphère (à droite), à partir d’enregistrements par satellite. Le gris indique les secteurs dont les données sont incomplètes. © Giec, 2007
Trois nouveaux chapitres dans le cinquième rapport
Pour leur nouveau volume, le groupe de travail I a réuni 9.200 publications scientifiques et quelque 259 auteurs ont œuvré à la rédaction. Cette édition comporte trois nouveaux chapitres par rapport à celle de 2007, qui détaillent trois sujets sensibles : le forçage des aérosols dus à leurs interactions avec les nuages, la hausse du niveau des mers et la variabilité décennale des phénomènes climatiques.
Le premier fournit « un état des lieux précis sur la compréhension du forçage des aérosols, souligné dans le 4e rapport comme l'une des sources majeures d'incertitude sur l'évolution du climatclimat et du cycle de l'eau », commente pour Futura-Sciences Valérie Masson-Delmotte, paléoclimatologue et membre du Giec. Le deuxième répond à la demande des gouvernements. « Il décrit les changements passés, actuels et futurs du niveau des mers, de l'échelle globale à l'échelle régionale », explique-t-elle encore. Le troisième chapitre est aussi une réponse à l'attente des dirigeants politiques. « Il traite des phénomènes (moussonsmoussons, Enso) qui affectent fortement les activités humaines et pour lesquels une évaluation critique de l'état des connaissances a été demandée à la communauté scientifique ».
Le forçage des aérosols, principale source d’incertitude
Le forçage des aérosolsaérosols domine l'incertitude sur le forçage total des activités humaines. En climatologieclimatologie, un forçage désigne un élément qui perturbe le système, et la réponse du climat est une rétroactionrétroaction. Les principaux forçages naturels sont les variations de l'ensoleillement et les éruptions volcaniques. Les forçages anthropiques concernent principalement les émissions de gaz à effet de serre, d'aérosols et la modification des surfaces végétales. « C'est le forçage des aérosols dû à leurs interactions avec les nuages qui continue de poser problème », nous précise Olivier Boucher, directeur de recherche au CNRS et coordinateur du nouveau chapitre dédié à ce forçage.
Sur le graphique en haut (A), sont indiqués les forçages radiatifs (FR) moyens à l’échelle mondiale, et leurs intervalles de confiance (à 90 %) entre 1750 et 2005, pour divers agents et mécanismes. La figure illustre aussi le forçage radiatif anthropique net et sa marge d’erreur. Le schéma (B) représente la distribution de la probabilité du forçage radiatif combiné moyen mondial de tous les agents anthropiques présentés dans (A). La distribution est calculée en associant les meilleures estimations et les incertitudes de chaque composant. © Giec, 2007
Ces particules peuvent avoir plusieurs effets. Le plus souvent, les aérosols renvoient le rayonnement vers l'espace, ce qui a un effet refroidissant pour la surface terrestre, c'est l'effet direct. Toutefois, dans les régions nuageuses ou au-dessus de la neige, les aérosols ont peu d'influence directe. On parle alors d'effet semi-direct. Enfin, ces particules jouent un rôle dans la genèse des nuages. Mais suivant leur nombre, l'albédoalbédo, et donc l'effet radiatif des nuages, change. C'est bien là que réside la difficulté. OlivierOlivier Boucher commente : « Les rétroactions des nuages [en réponse au forçage des aérosols, NDLRNDLR] continuent d'être une source importante d'incertitudes dans les modèles. Cela dit, les forçages dus aux gaz à effet de serregaz à effet de serre sont très bien établis et même si les aérosols compensent une partie de ce forçage, le forçage total reste positif. »
La responsabilité des activités humaines est sans équivoque
Autre point sensible, cette dernière décennie, le climat ne s’est pas réchauffé aussi rapidement que les climatologuesclimatologues ne le prévoyaient. S'il s'agit d'un sujet actif de recherche, les experts ne sont pas surpris. Olivier Boucher nous explique : « Il y a énormément de variabilité sur des périodes de 15 ans, et ce ralentissement n'est pas très surprenant. D'autres indicateurs du changement climatiquechangement climatique (fontefonte des glaces, réchauffement de l'océan) ne montrent pas de pause. On ne s'attend pas à ce que chaque simulation de chaque modèle traduise ce ralentissement, car le climat est un système chaotique. Il suffit que certaines simulations reproduisent ce ralentissement, ce qui est le cas. »
On l'aura donc compris, dans son nouveau rapport, le groupe de travail I ne revient pas sur les grandes lignes du précédent. Le réchauffement climatique est bel et bien en cours. L'influence des activités humaines est bien sûr sous les projecteursprojecteurs. « L'impact des activités humaines sur le climat est évalué à l'aide de méthodes de détection et d'attribution. Tous les travaux publiés depuis le 4e rapport montrent sans équivoque l'impact des activités humaines sur le climat, à l'échelle globale (composition atmosphérique, température, niveau des mers) ainsi que pour la plupart des régions (température, précipitationsprécipitations, vaguesvagues de chaleurchaleur, glace de mer, glaciersglaciers) », nous confirme Valérie Masson-DelmotteValérie Masson-Delmotte.