Des forages dans le Parc national de la forêt pétrifiée de l'Arizona ont permis de dater des couches de terrain du Trias tardif d'il y a environ 215 millions d'années. Ces couches gardent la mémoire des cycles climatiques de Milankovitch liés aux modifications des mouvements de la Terre. Elles ont fourni une preuve de l'existence d'un cycle de 405.000 ans et devraient nous aider à comprendre le changement climatique que nous provoquons.

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    Depuis les années 1970, des campagnes de forages géologiques ne cessent de fournir des carottes de roches sédimentaires où l'on a pu découvrir que les sédiments enregistraient des variations cycliques dans le climat de la Terre, en relation avec ce que l'on appelle les cycles de Milankovitch. La théorie de ces cycles est basée sur des modifications périodiques de l'excentricitéexcentricité de l'orbiteorbite de la Terre et de l'obliquitéobliquité de son axe de rotation. Ils ont été découverts par le calcul du mathématicienmathématicien, géophysicien, astronomeastronome et climatologueclimatologue d'origine serbe Milutin Milankovitch, entre 1920 et 1941.

    Ces modifications sont causées par l'attraction gravitationnelle des autres planètes du Système solaireSystème solaire, en particulier JupiterJupiter et SaturneSaturne, du fait de leurs massesmasses importantes, mais aussi VénusVénus de par sa proximité. Comme excentricité et obliquité gouvernent l'insolationinsolation et les saisonssaisons sur Terre, ces modifications changent le climat et, au cours des derniers millions d'années, sont clairement associées aux glaciationsglaciations.

    L'un des cycles de Milankovitchcycles de Milankovitch n'avait pourtant pas encore reçu de confirmation solidesolide en provenance de l'étude de la mémoire géologique de la Terre. Particulièrement long, il était censé être d'environ 405.000 ans. Une équipe de chercheurs en géosciences états-uniens pense être parvenue à le mettre en évidence, comme elle l'explique dans un article publié dans Proceedings of the National Academy of Sciences (Pnas).


    Que sont les cycles de Milankovitch ? Cette vidéo nous l'explique. © L'Esprit Sorcier Officiel

    Pour faire cette découverte, les scientifiques se sont basés sur des études de carottes livrées par des forages dans les couches sédimentaires datant du TriasTrias tardif, quand les dinosauresdinosaures et les premiers mammifères ont commencé leur évolution, et que l'on peut trouver dans le célèbre Parc national de la forêt pétrifiée de l'Arizona. Y gisent des troncs d'arbresarbres fossilisés et changés en pierre qui s'élevaient, il y a environ 215 millions d'années, dans un vaste paysage fluvial habité par des poissonspoissons, des tortuestortues, des crocodilienscrocodiliens géants et de minuscules espècesespèces de dinosaures. Aujourd'hui, il se présente sous forme de badlands (mauvaises terresmauvaises terres), des terrains marneux ou argileux, parfois de couleurscouleurs vives, et ravinés par les eaux du ruissellement en faible pente.

    Triassic Park, une clé pour comprendre les changements climatiques

    Or, ces couches sédimentaires accumulées pendant des millions d'années gardent la mémoire des mouvementsmouvements tectoniques, des cycles climatiques naturels, de la croissance et la disparition des lacs, des accumulations de deltasdeltas des rivières alors que la Terre était plus chaude. Plus chaude, en partie à cause d'un taux en gaz carboniquegaz carbonique plus élevé accompagnant des changements climatiqueschangements climatiques rapides et des extinctions rapides.

    Comme d'autres chercheurs, le paléontologuepaléontologue Paul Olsen (voir la vidéo ci-dessous), professeur et chercheur à l'Observatoire de la Terre Lamont-Doherty de l'université ColumbiaColumbia, pense y trouver avec ses collègues des réponses aux questions que pose le changement climatique actuel, causé par l'Homme cette fois-ci, en raison de son injection massive et surtout très rapide de CO2 dans l'atmosphèreatmosphère de la Terre. Paul Olsen, l'un des auteurs de l'article des Pnas, cherche aussi à savoir, en précisant les datations des différents phénomènes ayant laissé leurs marques dans les couches sédimentaires du Trias tardif, avant la grande extinction du PermienPermien-Trias datée de 201,6 millions d'années, si une plus petite crise biologiquecrise biologique ne s'est pas produite également en raison de la formation du fameux cratère d'impact de Manicouagan au Québec. Une période de 20 millions d'années est ainsi à l'étude en espérant atteindre une résolutionrésolution temporelle de l'ordre du millénaire. Pour Olsen : « Comprendre les environnements anciens nous donne des indices solides pour les futurs. En fait, c'est le seul moyen de tester nos modèles climatiquesmodèles climatiques ».


    Paul Olsen nous explique l'intérêt de l'étude de ce que l'on pourrait appeler « Triassic Park » en Arizona. Pour obtenir une traduction en français assez fidèle, cliquez sur le rectangle blanc en bas à droite. Les sous-titres en anglais devraient alors apparaître. Cliquez ensuite sur l'écrou à droite du rectangle, puis sur « Sous-titres » et enfin sur « Traduire automatiquement ». Choisissez « Français ». © Earth Institute

    Les carottes prélevées dans le « Triassic Park » ont vu leur chronologie épluchée, grâce à la présence sporadique de cendres d'éruptions volcaniqueséruptions volcaniques contenant des minérauxminéraux avec des isotopesisotopes radioactifs qui peuvent être analysés pour donner des âges absolus. En outre, les inversions tout aussi sporadiques du champ magnétique terrestrechamp magnétique terrestre ayant été enregistrées dans l'orientation de grains dans les sédiments eux-mêmes, les géologuesgéologues peuvent aussi s'appuyer sur le paléomagnétismepaléomagnétisme pour effectuer des datations.

    Les datations fines obtenues ont été corrélées à des modifications de dépôts sédimentaires plus riches en information sur les changements climatiques il y a environ 215 millions d'années et montrant des signes exquisément préservés d'alternance de périodes sèches et humides. On les trouve dans d'anciens lacs du fameux bassin Newark autour de New York, dans le New Jersey.

    Le cycle de 405.000 ans de Milankovitch est lié à une modification de 5 % de l'excentricité de l'orbite de la Terre sous l'influence notamment des perturbations gravitationnelles de Vénus. Les chercheurs ont découvert ce cycle du fait que les précipitationsprécipitations ont culminé lorsque l'orbite était la plus excentrique, produisant des lacs profonds qui ont laissé des couches de schiste noir dans l'est de l'Amérique du Nord. Mais lorsque l'orbite était la plus circulaire, les lacs se sont asséchés, laissant des couches plus minces et exposées à l'airair.

    En fait, les choses ne sont pas si simples car si ce cycle n'a visiblement pas changé pendant des centaines de millions d'années (les calculs prédisaient son existence au cours des derniers 50 millions d'années mais devenaient incertains au-delà), il module en fait l'influence des plus petits cycles de Milankovitch qui se chevauchent les uns les autres et ont des duréesdurées qui évoluent également dans le temps. La présence du cycle long se révèle en fait sur les amplitudes des phases sèches et humides découlant des cycles courts.

    Pour couronner le tout, ces cycles climatiques sont aussi sous l'influence du taux de gaz carbonique qui peut se modifier sans rapport ou en rapport avec ces cycles. Les analyses ne sont pas simples, mais les données obtenues devraient nous aider justement à mieux comprendre les cycles naturels et leur influence sur la biosphèrebiosphère en relation avec des taux élevés de gaz carbonique dans l'atmosphère. De quoi nous aider à mieux prévoir le changement climatique provoqué par l'Humanité et pas simplement à mieux comprendre le passé de la Terre.


    On a découvert un nouveau cycle de Milankovitch pour le climat

    Article de l'INSU publié le 17/10/2015

    Un cycle orbital de 9 millions d'années pilote le cycle du carbonecycle du carbone et les processus climatiques à long terme depuis le MésozoïqueMésozoïque. Ce cycle, dont on a trouvé des traces dans les rostresrostres des béléménites, a temporisé la dynamique saisonnière du climat entre le JurassiqueJurassique et le début du CrétacéCrétacé.

    Les cycles de Milankovitch sont des variations de l'insolation reçue par la Terre pilotées par des modifications périodiques des mouvements orbitaux. Ces derniers sont particulièrement connus pour avoir rythmé la dynamique des phases glaciaires et interglaciaires au cours du QuaternaireQuaternaire, mais de nombreuses études montrent que ces variations de l'ordre de la dizaine à la centaine de milliers d'années se sont aussi manifestées dans des périodes géologiques plus reculées. Cependant, se peut-il que de grands mouvements astronomiques régulent la dynamique du climat à l'échelle de plusieurs millions d'années ? Et si oui, par quel processus ?

    Une étude parue dans la revue PNAS du 13 octobre, des chercheurs de Toulouse laboratoire (GET, CNRS-Université Toulouse 3) et de Brême (laboratoire MARUM, Université de Brême), montrent qu'un facteur orbital de longue durée a temporisé la dynamique saisonnière du climat entre le Jurassique et le début du Crétacé. Elle repose sur une analyse inédite de la composition géochimique de bélemnites, des fossilesfossiles d'animaux marins morphologiquement proches des calamars, ayant enregistré la chimiechimie et la température de l'eau de mer entre -200 et -125 Ma (millions d'années). De façon surprenante, les résultats montrent une fluctuation cyclique de la composition en carbone de l'eau tous les 9 Ma.

    On voit ici plusieurs des cycles de Milankovitch avec les variations périodiques de l’excentricité de l’orbite de la Terre (ex 100.000 ans) ou de l’inclinaison de son axe de rotation par rapport au plan orbital (41.000 ans). © University Corporation for Atmospheric Research

    On voit ici plusieurs des cycles de Milankovitch avec les variations périodiques de l’excentricité de l’orbite de la Terre (ex 100.000 ans) ou de l’inclinaison de son axe de rotation par rapport au plan orbital (41.000 ans). © University Corporation for Atmospheric Research

    Une modification de l’excentricité de l’orbite terrestre causée par Mars

    En accord avec les calculs astronomiques, cette durée de 9 Ma correspondrait à un grand cycle d'excentricité de l'orbite terrestre lié à un autre cycle de 2,4 Ma dépendant des interactions entre la Terre et Mars. Même si le lien entre composition chimique de l'eau et grands cycles astronomiques reste débattu, les auteurs suggèrent qu'une orbite très elliptique sur le long terme favoriserait des contrastescontrastes climatiques saisonniers importants comme les moussonsmoussons et sécheressessécheresses intenses, défavorables à la préservation du carbone organique sur Terre.

    En revanche, les périodes à orbite plus circulaire pourraient avoir conduit à des climats humides et stables favorisant le développement de la végétation, la productivité marine et la préservation de matièrematière organique. Dans l'ensemble, ce cycle orbital de 9 Ma apparaît donc comme un métronome majeur de la longue dynamique des climats anciens, sur lequel se rajoutent néanmoins des perturbations occasionnelles telles que le volcanisme.

    L’analyse géochimique des rostres de bélemnites permet d’étudier les fluctuations de la température et la composition de l’eau de mer au Jurassique. © cc by3.0, Wikipédia

    L’analyse géochimique des rostres de bélemnites permet d’étudier les fluctuations de la température et la composition de l’eau de mer au Jurassique. © cc by3.0, Wikipédia