Une plante qui piège les animaux enfouis sous le sable, c'est une première. Chez les espèces du genre Philcoxia, les feuilles sécrètent une substance collante et sont portées par des tiges horizontales. Elles sont donc en contact avec le sable... et avec les organismes qui s'y promènent.

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    Le caractère carnivore est apparu au moins six fois chez les angiospermes. © Pereira et al., 2012, Pnas

    Le caractère carnivore est apparu au moins six fois chez les angiospermes. © Pereira et al., 2012, Pnas

    C'est une nouveauté. Jamais une plante n'avait été observée en train de se nourrir comme le font les espèces du genre Philcoxia. Ces végétaux sont carnivores, mais ils ne suivent pas le même modus operandi que la plupart des individus qui ont aussi ce régime. Philcoxia piège des animaux qui se trouvent sous le sable.

    Pourtant, le genre Philcoxia, découvert en 2000, n'était pas connu pour regrouper des espèces carnivores. P. bahiensis, P. minensis et P. goiasensis présentaient certes des caractéristiques physiquesphysiques associées à ce type d'alimentation - la présence sur les feuilles de glandesglandes sécrétant une substance collante ou encore un système racinaire peu développé - mais jamais elles n'avaient été observées en train de se nourrir d'un quelconque animal.

    <em>Philcoxia minensis</em>. A : système racinaire rudimentaire ; B : courte tige ; C : tige horizontale ; D : feuille qui attrape les organismes ; E : branche portant les inflorescences ; F : fleur ; G : fruit. © Pereira <em>et al.</em> 2012, <em>Pnas</em>

    Philcoxia minensis. A : système racinaire rudimentaire ; B : courte tige ; C : tige horizontale ; D : feuille qui attrape les organismes ; E : branche portant les inflorescences ; F : fleur ; G : fruit. © Pereira et al. 2012, Pnas

    Un nématode piégé dans une feuille

    En 2007, une équipe de chercheurs américains, australiens et brésiliens a réalisé des tests sur le comportement alimentaire de ces végétaux, concluant que malgré ces caractéristiques, le genre Philcoxia regroupait des individus autotrophes.

    Pourtant leur habitat ne coïncide pas avec cette thèse : des zones sableuses, où les nutrimentsnutriments se font rares. Exactement ce que prévoient les modèles de coût-bénéfices pour une plante prédatrice. Dans ces milieux, l'apport en azoteazote, phosphorephosphore, potassiumpotassium et autres nutriments n'est rendu possible que par la consommation de petits animaux.

    En outre, des vers avaient été retrouvés piégés par la substance que les feuilles sécrètent. Des scientifiques (dont certains avaient participé aux travaux de 2007) ont effectué de nouvelles expériences et se sont rendu compte que ces végétaux attrapaient, grâce à ces feuilles collantes, des petits vers (des nématodes, typiquement) enfouis dans le sable.

    Transferts de l'azote du nématode à la plante carnivore

    C'est la morphologiemorphologie de la plante qui permet cette pêche en sous-sol : alors que les branches portant les fleurs sont verticales, celles où se trouvent les feuilles tapissées de glandes sécrétant la substance collante sont à l'horizontale, si bien que ces feuilles se retrouvent en contact avec le sable ou y sont même enfouies. Et c'est sous le sable qu'elles capturent les organismes qui vont être digérés.

    Surface d'une feuille de <em>Philcoxia minensis</em>. On distingue de nombreux nématodes (flèche noire), glandes sécrétrices (flèche verte) et un grain de sable (flèche rouge). © Pereira <em>et al.</em> 2012, <em>Pnas</em>

    Surface d'une feuille de Philcoxia minensis. On distingue de nombreux nématodes (flèche noire), glandes sécrétrices (flèche verte) et un grain de sable (flèche rouge). © Pereira et al. 2012, Pnas

    C'est en nourrissant des nématodesnématodes avec des nutriments marqués (15N) que les scientifiques ont pu certifier que Philcoxia est bien carnivore. Ils ont suivi le trajet des marqueurs et ont constaté qu'ils passaient progressivement dans l'organisme de la plante, preuve qu'elle était capable de digérer le ver. Les expériences sont décrites dans Pnas.

    Seulement 0,2 % des espèces de plantes sont carnivores. Mais il se pourrait que cette estimation soit largement minorée. Selon les auteurs, ce mode de nutrition est cryptique et de nombreuses espèces sont considérées comme autotrophes alors qu'il est possible qu'elles se nourrissent de micro-organismesmicro-organismes. De plus, ainsi que l'a montré l'exemple de Philcoxia, sans tests approfondis, les scientifiques peuvent passer à côté d'une plante carnivore...