au sommaire
Champ de maïs en Gruyère. Photo Pierre Schwaller.
Comment cela est-il possible ? Lorsqu'en 1980 la société Monsanto a mis au point ce gènegène de la résistancerésistance et l'a implanté dans diverses plantes, notamment le maïsmaïs, le sojasoja, le coton, le colza, la betterave et la luzerne, cela a été considéré comme une véritable bénédiction par les agriculteurs qui pouvaient ainsi éviter de répandre de coûteux herbicides sélectifs sur leurs récoltes, et le remplacer par le glyphosate, meilleur marché. La vingtaine de produits utilisés jusqu'alors sont pratiquement tombés en désuétude, tandis que la quantité de glyphosate pulvérisée annuellement passait de 4500 à 45000 tonnes. Bien entendu, l'innocuité de cet herbicide envers les plantes OGM donnait aussi la possibilité d'augmenter considérablement les doses pour un effet encore plus efficace sur les plantes parasites, astuce qui n'échappa pas aux cultivateurs...
Mais l'avenir s'assombrit quelque peu. Pour certains, le temps tourne même à l'orage car on découvre de plus en plus d'exemples où des plantes sauvages ont développé une forme de résistance au glyphosate. Le phénomène ne s'est pas encore généralisé mais s'étend de façon alarmante, non seulement aux Etats-Unis, mais aussi au Brésil, en Argentine et en Chine, et surtout en Australie où les autorités considèrent que cette évolution deviendra un problème majeur d'ici trois ou quatre ans.
L'Europe échappe complètement au problème, la culture d'OGM résistants au glyphosate y étant interdite. Ce qui fait dire à certains que le Vieux continent pourrait devenir dans un proche avenir un réservoir de plantes saines... Toutefois, des cas de résistance locaux ont été constatés en certains endroits où ce désherbantdésherbant est utilisé, comme les vignobles et oliveraies du bassin méditerranéen, dénonce Christian Gauvrit, spécialiste des herbicides à l'Inra de Dijon.
La mutation des plantes parasites semble donc bien être une forme de défense naturelle face à une agression. En 1997 pourtant, la revue spécialisée américaine Weed Technology avait affirmé dans ses colonnes que "Les mutations qui confèrent la résistance au glyphosate sont tellement complexes qu'elles ne sont pas susceptibles d'être copiées par la nature". Nature aux réactions une fois de plus sous-estimées, comme on peut le constater aujourd'hui...
Mais les semenciers n'entendent pas en rester là. C'est ainsi que Monsanto travaille à la mise au point de plantes OGM résistantes à un autre herbicide, le Dicamba, et promet une commercialisation d'ici quatre ou cinq années. Seule ombre au tableau, celui-ci est beaucoup plus toxique que le glyphosate (dont la dose létale est de 0,2 gramme) et aussi moins efficace, ce qui pourrait contraindre à une utilisation à plus forte dose.
(Source originale : Science)
Note
Le glyphosate est commercialisé sous plusieurs noms, dont le plus connu est le Roundup. Il s'agit d'un herbicide efficace, pratique et sans doute moins dangereux que d'autres pesticides. Néanmoins, ses effets toxiques pour l'homme sont évidents, ainsi que les nombreux impacts négatifs pour la faunefaune et la flore sauvages. Une étude effectuée en Californie, dans le programme de suivi des maladies causées par les pesticides, a démontré que les herbicides à base de glyphosate étaient la 3ème cause de maladie chez les agriculteurs et la première chez les gestionnaires d'exploitation.
(La source de cette note émane de Pan Belgium, un réseau regroupant plus de 600 ONG réparties dans le monde et dont le but est de lutter contre l'utilisation irrationnelle de pesticides dangereux.)