Une expérience démontre que les champignons sont sensibles aux sons monotones. La diffusion de bruits blancs a influencé la croissance et la sporulation d'un champignon microscopique utilisé en agriculture biologique pour favoriser la croissance des végétaux. Les mécanismes incluraient des effets piézoélectriques ou la stimulation de mécanorécepteurs présents dans les membranes du champignon.

 


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    Et si les plantes avaient l'oreille musicale ? Des chercheurs australiens ont découvert que la diffusiondiffusion d'un son monotone stimulait l'activité d'un microscopique champignon du sol connu pour favoriser la croissance des végétaux. Face à l'érosion, la surexploitation agricole, la déforestation et la pollution, restaurer les sols est un enjeu croissant pour préserver la biodiversité et produire des cultures de manières durables.

    Les technologies sont multiples : amélioration de la structure du sol pour favoriser la rétention d'eaurétention d'eau, réintroduction de matièrematière organique, réduction de l'utilisation des pesticides, inoculation de microbesmicrobes... « Cependant, le rôle de la stimulationstimulation acoustique dans ce domaine reste peu exploré », note une équipe de chercheurs de l'Université de Flinders (sud de l'Australie), dans une étude publiée mercredi dans les Biology Letters de la British Royal Society.

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    Sur la base de travaux antérieurs sur l'exposition de la bactériebactérie E. ColiE. Coli à des ondes sonores, ces biologistes ont voulu évaluer l'effet d'une stimulation acoustique sur le taux de croissance et la production de spores - ou sporulation - de Trichoderma harzianum. Ce champignon microscopique est souvent utilisé dans l'agriculture biologique pour ses capacités à protéger les plantes des agents pathogènespathogènes, améliorer l'utilisation des nutrimentsnutriments et favoriser leur croissance.

    Des chercheurs australiens ont découvert que la diffusion d'un son monotone stimulait l'activité d'un microscopique champignon du sol connu pour soutenir la croissance des plantes. © TopMicrobialStock, Getty Images
    Des chercheurs australiens ont découvert que la diffusion d'un son monotone stimulait l'activité d'un microscopique champignon du sol connu pour soutenir la croissance des plantes. © TopMicrobialStock, Getty Images

    Un paysage sonore monotone

    Pour mener leur expérience, ils ont construit et installé des chambres d'atténuation sonore stérilisées, dans lesquelles ils ont déposé des boîtes de pétri où était cultivé le champignon. Ils ont ensuite diffusé dans une de ces chambres Tinnitus Flosser Masker at 8kHz, une des très nombreuses vidéos de bruits blancs disponibles sur YouTubeYouTube, censées soulager les acouphènes ou aider à l'endormissement des bébés. 

    « Cela ressemble au son d'une radio ancienne entre deux stations, explique à l'AFP Jake Robinson, un des coauteurs de l'étude. Nous avons choisi cette monotonie pour des raisons expérimentales contrôlées, mais il est possible qu'un paysage sonore plus diversifié ou naturel soit plus efficace. Cela nécessite des recherches supplémentaires ».

    Les boîtes de pétri ont été exposées à ce paysage sonore diffusé à un niveau de 80 décibelsdécibels trente minutes par jour. Au bout de cinq jours, les taux de croissance et de sporulation des champignons soumis à la stimulation acoustique étaient plus élevés que ceux des spécimens placés dans les chambres sans paysage sonore.

    Quelles sont les hypothèses pour expliquer ces résultats ? 

    Les chercheurs avancent plusieurs mécanismes potentiels pour expliquer ces résultats. Ils pourraient être dus à un effet piézoélectriqueeffet piézoélectrique par lequel une pressionpression mécanique (ici une onde acoustiqueonde acoustique) est convertie en charge électrique. Ces phénomènes peuvent influencer les processus cellulaires et moléculaires dans les organismes vivants, comme cela a déjà été observé pour les peptidespeptides, les acides aminésacides aminés, les protéinesprotéines ou les virus.

    Une autre hypothèse repose sur les mécanorécepteurs que les champignons possèdent sur leurs membranes. Ceux-ci sont comparables à ceux présents par milliers dans la peau humaine et qui jouent un rôle dans le sens du toucher, en influant sur la façon dont nous réagissons à la pression ou aux vibrationsvibrations. « Il se pourrait que les ondes sonores stimulent ces mécanorécepteurs chez les champignons, déclenchant ensuite une cascade d'événements biochimiques qui activent ou désactivent certains gènesgènes - par exemple, les gènes responsables de la croissance », estime M. Robinson.

    « Nos recherches préliminaires suggèrent que les champignons réagissent au son, mais nous ne savons pas encore si cela profite aux plantes. C'est donc la prochaine étape », détaille le biologiste.

    « Pouvons-nous influencer les communautés microbiennes du sol ou des plantes dans leur ensemble ? Pouvons-nous accélérer le processus de restauration des sols en stimulant la terreterre avec des paysages sonores naturels ? Quel impact cela pourrait-il avoir sur la faunefaune du sol ? Il y a de nombreuses questions importantes pour nous occuper ! », conclut-il.