Souffrez-vous d'amnésie écologique ? C'est quasiment certain, comme presque tout le monde en fait. En dehors des climatologues et des plus grands chercheurs sur l'évolution de la biodiversité, cette maladie nous touche tous, à des degrés divers. Elle fait même partie du mode de pensée « normal » de l'espèce humaine, sauf qu'elle pose de gros problèmes.

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    Le terme d'amnésieamnésie écologique fait de plus en plus surface dans les médias et sur les réseaux sociauxréseaux sociaux depuis quelque temps, de quoi s'agit-il ? Selon Philippe Jacques Dubois, ingénieur écologue et auteur du livre La grande amnésie écologique, sorti en 2012 aux éditions Delachaux et Niestlé, c'est un oubli de l'histoire de l'environnement et des connaissances de la nature. C'est « la faculté d'oubli de la société comme frein à la prise de conscience de la fragilité de notre environnement ». Chaque génération prend en effet comme référence ce qu'elle a connu, et c'est ainsi que se produit cette fameuse amnésie. Mais comme les générations se succèdent, cette référence ne cesse de changer. Tout ce que nous connaissons devient donc « normal », puisque que c'est notre expérience qui fait sens, pour nous.

    Quand tout devient normal en météo

    Dans ce cadre, la météométéo et le climat sont des exemples frappants : qui n'a pas entendu, ou lu sur les réseaux sociaux, les fameux « 40 °C, c'est normal, c'est l'été ! ». Effectivement, pour un adulte de 20 ou 30 ans, la succession des 40 °C plusieurs jours d'affilée dans les grandes villes du sud de la France, n'a finalement rien d'anormal. Tout simplement car cette valeur extrême tend à se produire tous les étés depuis une vingtaine d'années, et de plus en plus fréquemment. Au regard de celui qui y est confronté tous les ans, c'est donc une nouvelle norme. Mais dans l'histoire des relevés météo, le constat est différent : les jours de très fortes chaleurschaleurs, autrefois possibles mais peu fréquents, se multiplient depuis les années 2000. L'évolution est donc bien visible dans les annales de la météo, mais elle est imperceptible pour un jeune adulte.

    Un oubli complet de la biodiversité de notre pays

    L'amnésie est similaire en ce qui concerne l'effondrement de la biodiversité. Aujourd'hui, des départements entiers sont dénués de grands prédateurs, un manque causant de graves déséquilibres dans la faune. Du XVe au XVIIe siècle, des centaines de loups vivaient aux portesportes de Paris, faisant régulièrement, quelques victimes dans la population. Un tel scénario est évidemment inenvisageable de nos jours. Pourtant, il s'agissait bien là d'une biodiversité  normale pour le bassin parisien, avant l'urbanisation à outrance des terres. Aujourd'hui, la France n'accepte plus de grands prédateurs, ou très peu dans des zones naturelles restreintes afin de limiter les problèmes évidents avec les activités humaines. Les Français ont complètement oublié de quoi se compose la vie sauvage dans notre pays. Les castors, autres mal-aimés pourtant indispensables pour l'environnement et la lutte contre le changement climatiquechangement climatique, ont quasiment complètement disparu de France au XXe, alors qu'ils étaient présents sur la majeure partie du territoire avant, et en grand nombre. Ils nous paraissent désormais « exotiquesexotiques » et surtout pas nécessaires, alors même que de nombreuses études prouvent qu'ils permettent d'atténuer la sécheresse et les incendies.  

    Enseigner la nature, pas seulement devant un écran

    Nos propres références en matièrematière de nature et de climat datent de 20 à 70 ans, tout au plus, et encore, si nos souvenirs sont justes : autrement dit, notre mémoire n'a pas une grande valeur et ne doit pas servir de référence globale. Philippe Jacques Dubois pose à juste titre la question : « Comment protéger une nature que nous ne connaissons pas, une biodiversité sauvage aussi bien que domestique dont nous avons perdu la mémoire des richesses passées ? ». Pour repenser notre rapport à la nature, et la protéger, il faudrait déjà la connaître : de ce côté-là, l'école a un grand rôle à jouer, mais aussi, les entreprises et les administrations. Non pas seulement à travers les livres, InternetInternet et les réseaux sociaux, mais également à travers des expériences régulières dans la nature, aux côtés de ceux qui ont le plus à transmettre : les savants, chercheurs et autres naturalistes bien-sûr, mais aussi les anciens capables de transmettre des connaissances multigénérationnelles.