La crise climatique, on en parle désormais beaucoup. La crise de la biodiversité, beaucoup moins. Elle est pourtant tout aussi importante. Et alors que les représentants du monde sont réunis en Colombie pour discuter des solutions à mettre en œuvre pour éviter une nouvelle extinction de masse, Jane Goodall appelle à « collaborer avant que la fenêtre se referme ».


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    Il y a quelques jours, Jane Goodall a fait sensation à l'occasion d'un discours prononcé à l'Unesco et au moment où les représentants de 196 pays sont réunis à Cali (Colombie) pour la 16e conférence des Parties à la Convention des Nations unies sur la diversité biologique, la COP16 biodiversité. Celle qui a fait voler en éclat les frontières qui séparaient, il y a quelques années encore, l'humanité du reste du monde animal. Celle qui a tant milité pour la préservation des espèces et de leur environnement. La primatologue aujourd'hui âgée de 90 ans s'est présentée en imitant les sons des chimpanzés auprès desquels elle a passé de nombreuses années.

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    Pour exprimer à Futura ce qu'elle attend de la COP16, elle a repris un langage humain qui nous reste plus familier. « J'espère que toutes les personnes présentes à la table s'accorderont sur le fait que nous devons agir pour inverser la perte de biodiversité et la hausse des températures tant qu'il reste une fenêtrefenêtre de temps... une fenêtre qui est en train de se refermer. Pour lutter contre les dommages que nous avons infligés à l'environnement, nous avons désespérément besoin d'agir. Élaborer des plans est une chose, travailler pour les mettre en œuvre est ce qui importe maintenant. Nous devons tous, et pas seulement ceux qui détiennent le pouvoir, travailler ensemble pour apporter les changements nécessaires afin d'assurer un avenir à nos enfants et à toutes les générations futures. Aucune organisation ne peut plus réussir seule. Nous devons collaborer, nous unir pour un monde meilleur. » C'est d'ailleurs, dans un sens encore un peu plus large, le thème retenu pour cette COP16 : « La paix avec la nature ».

    Avancer main dans la main avec les autochtones

    Le Jane GoodallJane Goodall Institute (JGI) n'a pas attendu l'événement de Cali pour faire ce choix. Depuis longtemps, il valorise les autochtones et la coexistence entre les environnements naturels et sociaux. « L'approche Tacare, par exemple, vise à intégrer les connaissances empiriques des indigènesindigènes aux données scientifiques et aux technologies pour élaborer des solutions qui répondent à la fois aux besoins de développement et de résiliencerésilience de ces communautés et à la nécessité de protéger ou parfois, restaurer les écosystèmes dont elles dépendent », nous explique Jane Goodall.

    Lilian Pintea est vice-président des sciences de la conservation au Jane Goodall Institute. En tant que spécialiste de la conservation des chimpanzés, il a l'habitude de travailler avec les communautés locales, les villages, les gouvernements nationaux, les universités, d'autres ONG et le personnel du JGI pour relever certains des défis les plus difficiles en matièrematière de conservation, de gestion des ressources naturelles et de changement climatiquechangement climatique. Il participe à la COP16 pour défendre cette idée d'intégration de la science aux connaissances indigènes comme solution aux défis auxquels nous sommes aujourd'hui confrontés.

    Pour le soutenir, Alice Macharia. Originaire du Kenya, elle est diplômée en géographie. Elle aussi travaille avec le Jane Goodall Institute. Et son expérience de terrain lui a appris que pour faire la différence, il ne suffit pas de faire progresser les connaissances. Il faut transmettre des outils aux communautés. Comme ceux qui leur permettent de planifier l'aménagement d'un territoire. Ça fonctionne. Les villages qui y ont eu accès ont volontairement réservé des terres aux forêts et laissé des espaces aux chimpanzés.

    Bella Lam, la directrice générale du JGI a également fait le déplacement en Colombie. Pour partager, elle aussi, sa conviction que se centrer sur les communautés pour comprendre les interactions entre santé et bien-être des personnes, de la faune et de l'environnement est définitivement la chose à faire.

    D’autres recommandations pour la biodiversité

    « Il faut également noter que les peuples indigènes gèrent un quart de la surface terrestre mondiale. Plus d'un tiers de forêts de notre Planète. Pourtant, ils ne représentent que 5 % de la population mondiale et reçoivent moins de 1 % des financements pour le climatclimat. L'augmentation du soutien, financier notamment, aux projets de conservation menés par les autochtones et aux efforts des communautés locales les plus touchées par la perte de biodiversité et le changement climatique doit être une priorité », ajoute Jane Goodall.

    Parmi les autres points d'attention relevés par la primatologue : la surexploitation et le trafic des espèces sauvages. « Elle n'est pas seulement un facteur clé de la perte de biodiversité. Elle augmente aussi considérablement le risque de propagation de pathogènespathogènes et de zoonoseszoonoses. Nous soutenons une approche holistique des écosystèmesécosystèmes qui respecte et protège les utilisations durables coutumières des peuples autochtones et des communautés locales », nous précise Jane Goodall.

    La jeunesse pour sauver le monde

    Enfin, du haut de ses 90 ans d'expérience de la vie, elle évoque le rôle essentiel que doivent tenir les jeunes dans la constructionconstruction d'un avenir durable. « Le JGI préconise la création d'espaces significatifs pour leurs voix et leur leadership dans la prise d'actions, en s'attaquant à l'intersection de la perte de biodiversité, du changement climatique et de l'inégalité environnementale. L'engagement des jeunes favorise non seulement l'innovation, mais garantit également que des perspectives diverses sont incluses dans les processus de prise de décision », conclut la primatologue.