L'origine de l'homosexualité intrigue. Si elle n'a pas vocation à la reproduction, et au vu des coûts énergétiques qu'elle demande, comment a-t-elle bien pu apparaître dans plus de 1.500 espèces animales ? Et pourquoi ? Une jeune chercheuse et son équipe se sont rendu compte qu'ils regardaient peut-être le problème à l'envers. Et si la question était plutôt : l'homosexualité, pourquoi pas ?


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    Dans le domaine de la sexualité, nos normes culturelles peuvent brider l'apparition de nouvelles théories. C'est le cas pour l'origine de l'homosexualité par exemple. La culture hétéronormée de notre société peut limiter l'imagination des chercheurs. Mais elle n'a pas empêché Julia Monk, jeune chercheuse à l'université de Yale, de casser les codes dans une étude parue dans Nature. Et si l'homosexualitéhomosexualité n'était pas l'anomalieanomalie à expliquer ? Mais simplement le résultat de la sexualité débridée de nos ancêtres ?

    Depuis la théorie de l'évolution de DarwinDarwin - qui n'est aujourd'hui plus une théorie, d'ailleurs - les scientifiques essayent de justifier l'existence de l'homosexualité. Surtout que celle-ci a eu l'idée saugrenue d'être retrouvée dans plus de 1.500 espèces animales ! Jusqu'à présent, on partait du principe qu'elle était apparue comme un évènement indépendant chez ces 1.500 espèces. C'est-à-dire que nos ancêtres auraient été hétérosexuels, mais l'évolution aurait introduit une dose d’homosexualité chez 1.500 de leurs descendants. 

    À partir de là, les chercheurs tentaient de comprendre quels avantages cela pouvait bien avoir. Car si l'homosexualité ne sert pas à la reproduction, elle consisterait en une perte d'énergieénergie considérable qu'il faudrait compenser par de sacrés bénéfices. Or, cette théorie part du postulatpostulat que la sexualité a pour unique but la reproduction, et que la reproduction ne fonctionne qu'au sein d'un couple hétérosexuel. Cela semble un peu présomptueux pour Julia Monk et son équipe. 

    Chez nos ancêtres, l'homosexualité a-t-elle pu être synonyme de reproduction ? © Siarhei, Adobe Stock
    Chez nos ancêtres, l'homosexualité a-t-elle pu être synonyme de reproduction ? © Siarhei, Adobe Stock

    Des ancêtres à la sexualité débridée

    En effet, il semble plus simple que l'homosexualité et l'hétérosexualité aient été présentes simultanément chez les ancêtres de tous les animaux. Puis que, selon différents processus, l'homosexualité ait disparu chez certaines espèces. Une possible preuve provient des échinodermes. Ce sont des animaux marins qui ressemblent aux ancêtres communs des vertébrés, et chez lesquels on observe des comportements hétérosexuels aussi bien qu'homosexuels. 

    Julia Monk résume leur théorie ainsi : « Nous proposons un décalage de "Pourquoi s'engager dans l'homosexualité ?" à "Pourquoi pas ?" ». Cette façon de penser s'applique déjà à d'autres aspects de la sexualité, à l'instar du choix de caractère arbitraire pour la sélection d’un partenaire. Dès lors, nos ancêtres n'auraient pas été strictement hétérosexuels, mais plutôt sexuellement omnivoresomnivores. Cette idée avait déjà été développée par Christopher Ryan, psychologue s'intéressant aux origines préhistoriques de la sexualité humaine.

    Afin d'argumenter ce changement de paradigme, Julia Monk rappelle que plusieurs espèces animales ont été observées durant des ébats avec « différentes espèces, des corps morts, des objets inanimés », mais aussi pratiquant la masturbation. Ainsi, l'homosexualité n'est pas la seule forme de sexualité n'ayant pas vocation à la reproduction. Avec une touche d'humour, on peut penser qu'elle n'aurait persisté que chez les animaux avec suffisamment d'énergie à consacrer à une forme sexuelle non reproductive. Chez les autres, la fainéantise l'aurait emporté. 

    Christopher Ryan explique pourquoi les ancêtres de l'humain étaient peut-être bisexuels, dans une conférence TEDx. © TEDx