L'agriculture intensive a bouleversé l'équilibre de notre Planète et il est indispensable d'en comprendre les raisons pour pouvoir avancer, estime l'ONG Project Drawdown. Dans son dernier rapport, l'organisation explique que la dégradation massive des terres a commencé dans les années 1960, menée par une volonté internationale de produire toujours plus. Cette agriculture de masse a été un réel succès pour la société humaine, jusqu'au moment où elle s'est mise à mettre en péril l'environnement qui nous nourrit.


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    De nos jours, l'agriculture utilise 16 millions de km2 sur Terre, soit l'équivalent de la surface de l'Amérique du Sud - 62 % des cultures sont destinées à l'alimentation humaine, 35 % pour l'alimentation animale et 3 % pour autre chose. L'élevage utilise 34 millions de km2, soit l'équivalent de la surface de l'Afrique convertie en pâturage. L'agriculture et l'élevage combinés ont transformé 37 % des terres mondiales, cela représente une plus grande superficie que les forêts dans le monde (31 %), que les déserts (19 %), les zones humides (6 %) et les villes (3 %).

    L'utilisation mondiale des terres pour l'élevage (en orange), et pour les cultures (en vert) depuis 1750.  © Project Drawdown
    L'utilisation mondiale des terres pour l'élevage (en orange), et pour les cultures (en vert) depuis 1750.  © Project Drawdown

    Environ 70 % de l'utilisation de l'eau douce dans le monde est liée à l'agriculture et à l'élevage. Certains écosystèmesécosystèmes ont davantage été transformés que d'autres : les prairies naturelles d'Amérique du Nord ont en grande partie disparu, tout comme la forêt tropicaleforêt tropicale du Brésil. L'utilisation des engrais a fait plus que doubler le taux naturel du phosphorephosphore et du nitrogène sur la Planète, particulièrement dans les océans.

    L'évolution des fertilisants dans le monde depuis 1750 à gauche, puis le taux de nitrogène dans les océans à droite. © Project Drawdown
    L'évolution des fertilisants dans le monde depuis 1750 à gauche, puis le taux de nitrogène dans les océans à droite. © Project Drawdown

    Le golfe du Mexique contient l'une des plus grandes zones mortes des océans, une zone où le manque d'oxygène lié aux engrais des terres américaines a anéanti la biodiversitébiodiversité marine. Le constat de Project Drawndown est dramatique. Selon l'organisation, « l'agriculture est l'activité humaine qui détruit le plus l'environnement dans le monde ».

    La carte mondiale des terres de culture (en vert) et des pâturages (en orange). © Project Drawdown
    La carte mondiale des terres de culture (en vert) et des pâturages (en orange). © Project Drawdown

    Nourrir le monde sans détruire la Planète qui nous nourrit

    Pas moins de 22 % de la pollution mondiale provient de l'agriculture, sans compter les émissionsémissions indirectes liées au transport, à l'emballage, à la cuisine, et aux déchetsdéchets. Tout additionné, cela représente un tiers de nos émissions totales de gaz à effet de serregaz à effet de serre. Mais à partir de ce constat, que faire ? « Pour survivre et prospérer, nous devons trouver des manières différentes de nourrir le monde sans détruire la Planète qui nous nourrit. » Le rapport ne jette pas la pierre aux producteurs qui nous nourrissent, il dresse un bilan global qui doit servir de base pour un nouveau départ : le rôle de l'agriculture et de l'élevage est essentiel, et n'est pas remis en question, mais les pratiques doivent évoluer : sortir de la monoculturemonoculture, diversifier les espècesespèces, trouver des alternatives aux pesticidespesticides et engrais, avoir une autre vision de l'élevage, développer l'agriculture régénérative de manière massive.

    Le consommateur a également un rôle à jouer : les conséquences environnementales varient en fonction du type de culture et de ferme. Les données des grands organismes d'étude sur le climatclimat et l'environnement sont une simple moyenne, mais l'impact sur l'environnement dépend avant tout de la manière dont notre nourriture a été produite, qu'il s'agisse de nourriture animale ou végétale. Pour réduire les émissions de gaz à effet de serre et la dégradation des terres, il est donc nécessaire d'être correctement informé sur la façon dont est produite notre alimentation.

    Partout dans le monde, des agriculteurs et fermiers tentent déjà de transformer leur manière de faire, à leur niveau. Ils doivent être encouragés et accompagnés dans leur transformation. Mais cela dépasse la simple initiative personnelle, qui reste importante bien sûr, mais qui ne peut fonctionner sans une réelle aide de l'ensemble des gouvernements. Comme l'a montré la crise agricole de 2024, il n'est pas possible de demander de produire toujours plus, à bas coût, et de manière écologique, sans un accompagnement cohérent d'une profession qui peine à survivre.