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La cuisine évolue au fil des époques, des modes et des techniques. La chimie s'y est intéressée avec la gastronomie moléculaire, qui se développe à l'infini, dans le silence des laboratoires scientifiques. Ses applications sont devenues célèbres, comme la « cuisine moléculaire » (dépassée) et la « cuisine note à note », prochaine grande tendance culinaire, durable !
La cuisine moléculaire, la nouvelle cuisine en marche
Découvrez dans ce dossier la naissance des nouvelles cuisines, en partant de la cuisine moléculaire, pour aller vers la cuisine note à note, LA cuisine du futur (déjà en marche). Des recettes note à note vous sont également proposées.
À vos toques !
Admirez les créations de la cuisine note à note dans la galerie photo dédiée.
La gastronomie moléculaire, une discipline scientifique
En 1988 était officiellement créée la discipline scientifique qui a été nommée « gastronomie moléculaire ». C'est une activité scientifique, faite par des scientifiques (et non par des cuisiniers), qui repose, comme toutes les autres disciplines scientifiques, sur l'expérience et le calcul, et qui, comme toutes les autres disciplines scientifiques, vise la compréhension des phénomènes.
La gastronomie moléculaire, une affaire de scientifiques
En l'occurrence, la gastronomie moléculaire a pour objet de chercher les mécanismes des phénomènes qui surviennent lors de la préparation et de la consommation des mets (ou plats, ou aliments). Insistons : la gastronomie moléculaire n'est pas de la cuisine... même si certains confondent (à tort !) gastronomie et haute cuisine !
On doit rappeler ici que l'expression « gastronomie moléculaire » est parfaitement choisie pour désigner une activité scientifique telle que décrite ici. En effet, le mot « gastronomie » désigne en réalité une « connaissance raisonnée », et non pas de la cuisine fine1. Or la gastronomie moléculaire, activité scientifique, est bien une « connaissance raisonnée », et elle est « moléculaire », tout comme l'est la biologie moléculairebiologie moléculaire, en ce qu'elle considère les aspects moléculaires des transformations culinaires.
Bref, c'est une erreur que de dire que certains cuisiniers font de la gastronomie moléculaire ; ils ne peuvent faire que de la « cuisine moléculaire » (expression malheureuse, mais imposée par les circonstances), ou, mieux, de la cuisine note à note, puisque tel est le futur de la cuisine.
Terminons en rappelant une fois de plus : la gastronomie moléculaire est l'activité scientifique qui recherche les mécanismes des phénomènes qui surviennent lors de la production et de la consommation des aliments.
1.Jean-Anthelme Brillat-SavarinAnthelme Brillat-Savarin a défini la gastronomie en 1825, dans son livre intitulé La physiologie du goût : « La gastronomie est la connaissance raisonnée de tout ce qui se rapporte à l'être humain en tant qu'il se nourrit ».
La cuisine moléculaire, de nouvelles techniques culinaires
Ce qui est à l'origine de confusions entre cuisine moléculaire et gastronomie moléculaire, c'est que, à l'époque où nous avons créé la gastronomie moléculaire, nous avons également voulu rénoverrénover les techniques culinaires, et introduit la terminologie « cuisine moléculaire » pour désigner cette nouvelle cuisine rénovée.
Définition de la cuisine moléculaire
La définition de la « cuisine moléculaire » est : « La production d'aliments (la cuisine, donc) par de « nouveaux » outils, ingrédients, méthodes ». Dans cette définition, le terme « nouveau » désigne plus ou moins tout ce qui n'était pas dans les cuisines des cuisiniers français en 1980.
Ingrédients et outils de la cuisine moléculaire
Par exemple : le siphonsiphon (pour faire des moussesmousses), l'alginate de sodium (pour faire des perles à coeur liquide, des spaghettis de légumes, etc.) et les autres gélifiants (agar-agar, carraghénanes, etc.), l'azote liquide (pour la production de sorbets et de bien d'autres préparations), l'évaporateur rotatif, et, plus généralement, l'ensemble des matériels de laboratoire qui peuvent avoir une utilité technique ; un exemple de méthode nouvelle, enfin, la préparation du « chocolat chantilly », des beaumés, des gibbs, des nollet, des vauquelins, etc. (voir Cours de gastronomie moléculaire n°1 : Science, technologie, technique (culinaires) : quelles relations ?, Ed Quae/Belin)
Évidemment, tous ces outils, ingrédients, méthodes ne sont pas nouveau stricto sensu (bien des gélifiants « nouveaux » sont séculaires, en Asie, et utilisés par l'industrie alimentaire depuis longtemps, tandis que bien des outils sont traditionnels en chimie), mais le projet était de rénover l'activité technique culinaire.
Une expression malheureuse
Enfin, oui, la terminologie « cuisine moléculaire » est mal choisie, mais elle a été imposée conjoncturellement ; c'est une expression consacrée (elle est apparue dans le Robert, avec une définition fautive hélas, et dans l'Encyclopedia Britannica, avec une définition juste, heureusement), qui est de toute façon appelée à disparaître... en raison de la proposition suivante.
Définition de la cuisine note à note
La proposition suivante, bien plus enthousiasmante que la cuisine moléculaire, est celle de la Cuisine note à note.
Elle est née en 1994 (publiée dans la revue Scientific American) alors que nous nous amusions à introduire des composés définis dans des aliments : du paraéthylphénol dans des vins ou dans des whiskys, du 1-octène-3-ol dans des plats, du limonène, de l'acideacide tartrique, etc.
La cuisine note à note : uniquement des composés purs
La proposition initiale était d'améliorer des aliments... mais s'est introduite tout naturellement, en prolongement de la pratique précédente, l'idée de composer des aliments entièrement à partir de composés. Autrement dit, la cuisine note à note ne fait plus usage de mélanges traditionnels de composés alimentaires (viandes, poissonspoissons, fruits, légumes), mais seulement de composés... tout comme la musique électroacoustique ne fait pas usage de trompettes, violons, etc. mais seulement d'ondes sonoresondes sonores pures que l'on combine.
Utilisant des composés purs, le cuisinier doit donc :
- concevoir les formes des éléments constitutifs du mets ;
- concevoir leurs couleurs ;
- concevoir leurs saveurs ;
- concevoir leurs odeurs (ante et rétronasale) ;
- concevoir l'action trigéminale ;
- concevoir les consistances ;
- concevoir les températures ;
- concevoir la constitution nutritionnelle...
Les plats note à note déjà réalisés
À ce jour, la faisabilité de cette cuisine nouvelle a été démontrée par plusieurs réalisations :
- premier plat, présenté à la presse par Pierre Gagnaire à Hong Kong, en avril 2009 ;
- plat présenté par les cuisiniers alsaciens Hubert Maetz et Aline Kuentz lors des rencontres scientifiques (JSTS) franco-japonaises à Strasbourg, en mai 2010 ;
- repas Note à Note par les chefs de l'Ecole du Cordon bleu Paris en octobre 2010 ;
- repas Note à Note servi le 26 janvier 2011, en lancement de l'Année internationale de la chimie, à l'Unesco, Paris, par l'équipe de Potel&Chabot, dirigée par Jean-Pierre Biffi ;
- cocktail Note à Note servi en avril 2011 à 500 nouveaux étoilés du Michelin + la presse à l'Espace Cardin, Paris, par cette même équipe de Potel&Chabot ;
- repas Note à Note servir en octobre 2011 par l'équipe de chefs de l'Ecole du Cordon bleu Paris ;
- repas partiellement Note à Note par des chefs de l'Association des Toques blanches internationales (Jean-Pierre Lepeltier, Julien Mercier, Vincent Vitasse, Marie Jouannou, Michael Foubert) lors du Téléthon 2011, le 3 décembre 2011 ;
- démonstrations par Jean-Pierre Lepeltier, Michael Foubert, Patrick Caals, lors des Cours de gastronomie moléculaire 2012, à AgroParisTech, Paris.
Les questions que pose la cuisine note à note
La constructionconstruction de la cuisine note à note pose de très nombreuses questions, d'ordre technique, artistique, sensoriel, mais aussi économique, toxicologique...
Cuisine note à note et aménagement rural
Il est notamment proposé aux agriculteurs de valoriser (à la ferme) leurs produits, au lieu de les livrer directement à bas prix ; cette valorisation passe par du fractionnement et éventuellement du craquage. Une présentation des produits accessibles a été faite, lors des Cours de gastronomie moléculaire 2012, par Jean-Louis Escudier, de l'Inra de Montpellier.
Les questions économiques de la cuisine note à note
Non seulement, le transport de fruits et légumes est un gaspillage terrible (on transporte majoritairement de l'eau, les denrées s'abiment), mais la cuisine est un terrible gâchis, avec des rendements des systèmes classiques de cuisson aussi bas que 20 % !
Les questions sensorielles, techniques et artistiques
Côté sensoriel : à ce jour, on connaît mal l'effet de mélanges de composés purs, et il faudra que les cuisiniers apprennent les « lettres » du nouvel alphabet pour produire des « phrases » qui ont du sens.
Côté technique : pour beaucoup d'aspects, il y a à apprendre, notamment en ce qui concerne les consistances, mais aussi pour les couleurs, les saveurs (ionsions, acides aminésacides aminés, divers sucressucres), etc.
Côté artistique : voudra-t-on faire quelque chose qui semble nouveau, ou bien faire quelque chose de classique ? Tout est possible, et il est proposé, pour bien comprendre la question, de s'imaginer devant une assiette vide et de se poser la question : que vais-je y mettre (et pourquoi) ?
Politique et cuisine note à note
Quid des terroirs, de la spécificité française des climatsclimats, des terroirs ? N'ayons pas peur : des composés phénoliques totaux de Syrah n'ont rien à voir avec ceux de Grenache, et chaque région a ses productions particulières, pour ce qui concerne les fractions (par opposition aux composés purs). Or il faut sans doute considérer que l'on passera plutôt par du fractionnement que par l'utilisation de produits de synthèse. D'autre part, le Pr Pierre Combris (Inra Ivry) a bien montré que le modèle alimentaire classique est condamné à plus ou moins brève échéance :
Les questions nutritionnelles et toxicologiques
Côté nutritionnel : cette fois, il va bien falloir finir par apprendre comment se nourrir ! Des questions scientifiques nouvelles, et essentielles.
Côté toxicologique : on ne mettra dans la cuisine note à note que des composés ou des fractions sûrs ! Mieux que la cuisine classique, donc, où l'on « subit » des « cocktails » indistincts, mal caractérisés. Lors des Cours 2012 de gastronomie moléculaire, le Pr Robert Anton a discuté cette question, et montré que la cuisine note à note était à la cuisine ce que la pharmacie moderne, avec des droguesdrogues bien caractérisées, était à la pharmacie ancienne, très « hasardeuse ».
Les réponses à ces questions
- Une crise de l'énergieénergie s'annonce : il n'est pas certain que la cuisine traditionnelle (laquelle ?) soit durable.
- Les Anciens sont toujours battus par les Modernes, lesquels veulent des objets de leur génération.
- Le fractionnement des produits de l'agricultureagriculture et de l'élevage existe déjà pour le lait et le pain ; pourquoi pas pour la carottecarotte, la pomme, etc. ?
- Les objections qui sont faites contre la cuisine note à note ont été le plus souvent faites pour la musique moderne... mais toutes les radios diffusent de la musique électronique. Autrement dit, n'en serions-nous pas à l'équivalent de 1947, quand Varèse et quelques autres lançaient la musique électronique ?
Recettes de cuisine note à note
Si vous souhaitez vous lancer dans la cuisine note à note, voici quelques recettes à suivre. Bon appétit !
Apéritif : Feuille morte (Hervé This)
À 600 mL d'eau, ajouter 40 mL d'éthanol, 0,0001 g de phosphatephosphate de calciumcalcium, 0,001 g de phosphate de sodium, 0,3 g de taninstanins œnologiques, 10 g de glucoseglucose, 1 goutte d'une solution diluée de paraéthyl phénol.
Apéritif Effervescence (recette Hervé This)
Préparer une solution de glucose (20 g) dans de l'eau (500 mL), ajouter 20 % d'éthanol, une cuillerée à café de sucre en poudre (saccharosesaccharose) et une cuillerée à soupe de polyphénolspolyphénols. Puis au moment de servir, verser une petite cuillerée d'un mélange acide tartrique/bicarbonatebicarbonate de sodium (2:1)
Note à nœuf (recette adaptée de celle Frédéric Lesourd, chef enseignant à l'école Le Cordon Bleu Paris)
1. L'orange. Faire un total de 60 g avec une pointe de couteau de carotènecarotène bêtabêta, une cuillerée de lécithine de sojasoja, de l'eau, de l'huile de tournesoltournesol émulsionnée vigoureusement, des agrégats de protéinesprotéines obtenus par le procédé suivant : - dilution d'un blanc d'œuf dans autant d'eau - ajout de sel (salting out) - filtrationfiltration des fractions précipitées - chauffage de ces fractions à 100 °C jusqu'à coagulationcoagulation, une pincée de sel, une cuillerée de glucose, quelques gouttes de vinaigre cristal.
2. Le bleu. Dans 200 mL d'eau chaude, saler, dissoudre 10 feuilles de gélatine, une goutte de bleu patenté, puis aussitôt le fouetter très vigoureusement afin d'obtenir une quantité considérable de mousse. Verser cette mousse à la louche dans des bols tapissés d'un film plastique alimentaire, et les mettre au frais (la mousse va gélifier).
3. Le support. À la poêle, cuire de la fécule de pomme de terre jusqu'à couleurcouleur blonde ou brune (en remuant bien) à sec. Plutôt vers le blond, car on a ainsi un goût de champignonchampignon. Mettre une partie de cette fécule torréfiée dans un saladier avec du glutengluten et de l'eau, travailler pour faire une boule, l'étendre au rouleau et prélever des disuqes 7 cm à l'emporte-pièce. Les cuire sur papier sulfurisé à 180°C pendant 20 min.
4. Le gauss. Sur un film transparenttransparent, étaler du surimisurimi en couche mince (2 mm), puis au pinceau, mettre une couche de la graisse ainsi préparée : - dans un réfrigérateur, mettre de l'huile d'olive et attendre une cristallisation qui sédimente ; décanter, et récupérer la partie solidesolide - colorer cette partie avec un colorant alimentairecolorant alimentaire rouge. Mettre au froid, puis plier en deux répétitivement jusqu'à obtenir un pavé de 5 cm d'épaisseur. Mettre au grand froid, puis couper des parallélépipèdes très minces.
5. La sauce wöhler (recette Hervé ThisHervé This). fondre à chaud 100 g glucose, 2 g acide tartrique, dans 20 cL d'eau, ajouter 2 g de polypénols, porter à ébullition, lier avec la fécule de pomme de terrepomme de terre (environ une cuillerée à café), hors du feufeu émulsionner de la graisse récupérée dans la partie liquide de l'huile fractionnée. En option : ajouter une solution de diacétylediacétyle, mettre une goutte d'une solution de 1-octen-3-ol dans de l'huile. Dressage : Poser le disque de farine torréfiée. Dessus, le bleu démoulé face plate vers le haut. Poser dessus l'orange. En biais, le parallélépipède de gauss. Autour, un trait de sauce wöhler.
Un Patrick Terrien (recette adaptée de celle de Patrick Terrien, chef des chefs de Le Cordon Bleu Paris)
Pour 15 portions (de 35 g chacune) : 200 g de petit laitpetit lait (extrait d'une clarification de beurre), 200 g d'eau, 30 g de lait en poudre, 10 g de yaourt en poudre, 4 g de sel, 4 g de carraghénane iota, 1 g d'agar-agar, 100 g d'huile neutre à ajouter en fin de préparation, 1 goutte d'une solution diluée d'heptanone (0,2 g dans 10 g).
Récupérer le petit lait d'une clarification de beurre, passer au chinois étamineétamine. Ajouter les autres ingrédients (sauf la matièrematière grasse) sur feu moyen en mélangeant au fouet doucement, au frémissement (avant ébullition), retirer du feu et ajouter la matière grasse... Passer au chinois et mouler. Refroidir. Servir avec un caramel déglacé avec une solution de sotolon. Ou bien avec des fibres récupérées d'un pressage de persilpersil, hachées (ou coton hydrophilehydrophile haché), puis le blanc d'œuf, séché à l'airair libre ou à tiède, et on enduit le solide broyé grossièrement avec une dissolution de sotolon dans l'huile.
Fibré (recette Hervé This)
Prendre de la farine de blé. Faire une lixiviationlixiviation pour récupérer l'amidonamidon. Ajouter l'eau et la poudre de blanc d'œuf, faire passer le mélange dans une filière pour les faire tomber dans de l'eau bouillante salée. Après 3 min, récupérer les spaghettis. Les aligner dans un moule à cake, et couler une solution d'eau+agar-agar+monoglutamate de sodium+arome poulet + sel+ glucose. Laisser prendre, puis couper par le travers des pavés. Accompagner d'une conglomèle avec eau, glucose, bêta carotène. Servir avec une sauce faite de la façon suivante : - dans une casserole, mettre 1 verre d'eau - sur le feu, faire bouillir, ajouter une feuille de gélatine préalablement trempée dans l'eau froide et 1 verre de graisse neutre (voir plus haut). En fin d'émulsionémulsion, mettre 3 gouttes de truffarome.
Perles de pomme, opaline, granité citron (recette de Pierre Gagnaire, servie à Hong Kong, le 24 avril 2008)
1. Le petit lait. Mélanger l'acide citriqueacide citrique et le lait froid, chauffer jusqu'à coagulation, filtrer sur linge humide, réserver au frais.
2. Perles de pomme. Avec une seringue, faire tomber les gouttes de solution eau + lactatelactate de calcium + arôme artificiel pomme verte dans un bac d'eau avec de l'alginate de sodium (dissous au mixeur), retirer les perles formées.
3. Peligot de glucose. Cuire l'eau et le glucose jusqu'à obtenir un caramel brun, couler sur un silpat pour le refroidir, réduire en poudre fine, déposer une plaque à empreinte 6 cm de diamètre, saupoudrer le peligot de glucose sur 2 mm d'épaisseur, retirer la plaque à emprieinte, enfourner four chaud, refroidir, conserver au sec.
4. Granité citronné. Faire fondre glucose dans l'eau, ajouter acide citritique, arôme citron, mettre à congeler, écraser à la fourchette quand c'est solide, afin d'obtenir un granité Dressage : dans une assiette creuse, mettre un fond de granité, puis des perles, et par-dessus trois disques superposés de péligot.
Vauquelin citrique (recette de Hervé This)
Ajouter 10 % en massemasse de poudre de blanc d'œuf dans de l'eau, puis 1 cuillerée d'acide citrique et 1 cuillerée à soupe de glucose. Monter comme un blanc en neige et servir dans des verresverres, en le passant ou non au four à micro-ondesfour à micro-ondes.
Sablés torréfiés (recette d'Hervé This)
Dans une casserole, mettre la fécule de pomme de terre et chauffer en remuant jusqu'à brunissement. Verser la fécule torréfiée dans un saladier, et ajouter du saccharose (sucre de table), matière grasse, un peu d'eau, et une cuillerée à soupe de poudre de blanc d'œuf, une cuillerée de gluten. Malaxer, faire de petites billes et les cuire 10 min à four très chaud (220 °C).
Disque de caramel au polyphénol (recette de Pierre Gagnaire)
Cuire 100 g de fondant et 70 g de glucose, jusqu'à 120 °C. Ajouter 3 g de polyphénols totaux, puis reprendre la cuisson du sucre jusqu'à 155 °C. Stopper la cuisson en ajoutant 10 g de beurre de cacaocacao. Verser sur du papier sulfurisé et abaisser 1 mm.
Tomate mozzarella façon « note à note » (recette des chefs des Toques Blanches Internationales, mise en oeuvre lors du Téléthon 2011, le 3 décembre 2011, fondée pour la partie supérieure sur la recette de Patrick Terrien, voir ci-dessus)
Ingrédients pour 15 portions (de 35 g / pces) : 200 g de petit lait (extrait d'une clarification de beurre), 200 g d'eau, 30 g de lait en poudre, 10 g de yaourtyaourt en poudre, 4 g de sel, 4 g de carraghénane iota, 1 g d'agar-agar, 100 g d'huile neutre.
Déroulement de la recette : récupérer le petit lait d'une clarification de beurre, passer au chinois étamine. Ajouter les autres ingrédients (sauf la crème) au feu moyen en mélangeant au fouet doucement, au frémissement (avant ébullition), retirer du feu et émulsionner de l'huile neutre... Passer au chinois et mouler. Refroidir.
Jus de tomatetomate : poudre de tomate, eau glutamateglutamate, sel. Dissoudre la poudre de tomate dans de l'eau. Ajouter du monoglutamate de sodium, saler.
TuileTuile au sucre : isomaltisomalt, arôme basilicbasilic, colorant vert. Chauffer l'isomalt, puis ajouter le colorant vert (par exemple des chlorophylleschlorophylles) et de l'arôme basilic (si possible un arôme artificiel).
Soufflé « note à note » betterave et coeur d’orange (recette des chefs des Toques Blanches Internationales, mise en œuvre lors du Téléthon 2011, le 3 décembre 2011)
Appareil a soufflé betterave : poudre à blanc 34 g (10 cas ras), eau 900 g (90 cas), glacisglacis de betterave 40 g, sucre en poudre 300 g, sel fin pm.
Appareil a soufflé orange : poudre à blanc 34 g (10 cas ras), eau 900 g (90 cas), arôme orange 20 g (10 cac), sucre en poudre 300 g, sel fin pm.
1. Montage des soufflés : chemiser les moules avec de la bombe à graisse et du sucre en poudre. Napper le fond du moule avec le mélange betterave, disposer au centre une grosse cuillère du mélange à l'orange puis recouvrir jusqu'en haut du moule avec le mélange betterave.
2. Cuisson des soufflés : disposer les moules à soufflés sous la salamandre pendant quelques secondes afin d'y former une légère croûtecroûte puis cuire dans un four à air pulsé : 160 °C, 4 min 30 s. Servir dès la sortie du four. Conseil : réaliser un soufflé supplémentaire qui servira à contrôler l'état de la cuisson car le temps nécessaire varie d'un four à l'autre.
Le caramel et les péligots (recette ancienne)
Caramel : prendre du saccharose et un peu d'eau, chauffer jusqu'à coloration. Peligot de glucose : prendre du glucose et chauffer jusqu'à coloration. Peligot de fructosefructose : prendre du fructose et chauffer jusqu'à coloration. Peligot de lactoselactose : prendre du lactose et chauffer jusqu'à coloration.
Bisque pure
Prendre des plumes de calmarcalmar (chitinechitine presque pure) et chauffer dans l'huile. Puis ajouter de l'eau, couvrir et chauffer 20 minutes à petit feu.
Pâtes note à note
Prendre de la fécule de riz (amylopectineamylopectine à 94 pour cent), puis ajouter du gluten, et faire une pâte que l'on cuit comme une pâte à tarte. Garnir.
Tchat avec Hervé This : la cuisine note à note est-elle accessible à tous ?
Dans le cadre de la Fête de la science du 10 au 14 octobre 2012, Hervé This, éminent physicochimiste plus connu pour ses interventions « science et cuisine », a répondu aux questions des internautes. Cette page regroupe les questions liées à l'accessibilité de la cuisine note à note.
Sur cette page est retranscrite la première partie du tchat avec Hervé This, spécialiste de la cuisine note à note, qui a eu lieu en partenariat avec Futura-Sciences le 10 octobre 2012.
Bonjour à toutes et à tous, nous avons le plaisir d'accueillir Hervé This, le cofondateur de la gastronomie moléculaire. Il répond en direct à vos questions.
GroupeTPE9 : Quelle est la grande différence entre la cuisine moléculaire et la cuisine traditionnelle ?
La différence entre cuisine moléculaire et cuisine traditionnelle ? Interrogeons les mots. Cuisine traditionnelle, c'est assez flou, parce que la tradition des Provençaux n'a rien à voir avec celle des Bretons ou des Alsaciens. Cela étant, il faut quand même considérer que certains pensent, avec la terminologie « traditionnelle », à la cuisine qui se fait avec des viandes, poissons, légumes, fruits, œufs... De ce point de vue, la cuisine moléculaire n'apporte aucun changement : la définition de la « cuisine moléculaire », c'est d'utiliser des ustensiles modernes, des outils techniquement plus évolués que les casseroles, les fouets, les mortiers et pilons, etc. Je répète : la définition de la cuisine moléculaire est : « une cuisine qui se fait avec de nouveaux ustensiles, de nouvelles méthodes, de nouveaux ingrédients », avec « nouveau » = ce que n'avait pas Paul Bocuse dans sa cuisine en 1976, quand il a publié La Cuisine du marché.
Ousmane : Je suis commis et je me demande en quoi votre cuisine est accessible au grand public.
Prenez par exemple le « chocolat chantilly » : la recette est « Dans une casserole, mettre 200 g d'eau, 230 g de chocolat à croquer, chauffer. Puis quand le mélange est fait, poser la casserole sur des glaçons ou dans de l'eau froide, et fouetter ». On obtient alors comme une crème fouettée, mais c'est le chocolat qui mousse. Autrement dit, on a une mousse au chocolat sans œufs. C'est donc plus économique que la mousse au chocolat, puisqu'on ne paye pas les œufs ! Et l'eau peut être remplacée par jus d'orange, café, thé, etc. Vous le voyez, c'est donc parfaitement accessible à tous. D'ailleurs, je crois avoir vu il y a plusieurs mois, sur InternetInternet, une petite fille de 6 ans qui faisait une vidéo de démonstration. Autre exemple : la semaine dernière, avec des élèves d'école hôtelière, nous avons battu le record du plus gros volumevolume de blanc d'œuf battu en neige à partir d'un seul œuf : 40 litres !!!!!! Le coût : 1 œuf, 1 casserole, 1 fouet... et de la Connaissance. N'est ce pas plus économique ?
Nanmum : Vous parlez de gastronomie moléculaire et non de cuisine moléculaire. Il y a une différence ?
Merci de la question. Oui, une différence essentielle !!! La gastronomie moléculaire, c'est de la physiochimie, pour des chimistes, des physiciensphysiciens, dans des laboratoires. On part des phénomènes qui ont lieu quand on cuisine, mais pour en chercher les mécanismes. La cuisine moléculaire, d'autre part, c'est de la cuisine. Pour les cuisiniers, donc.
Lucille : Pensez-vous que la cuisine note à note remplacera la cuisine traditionnelle ?
En matière artistique, l'art ne procède pas par remplacement, mais par ajout. Mozart n'a pas remplacé Bach, et Lady Gaga ne remplace par les Beatles. Idem en peinture, en sculpture, en littérature, ou en cuisine. Donc au début en tout cas, la cuisine note à note s'ajoutera (en réalité, elle s'ajoute déjà aujourd'hui, car son développement est explosif, dans le monde).
Julien a : Je viens de lire un article sur le gaspillage alimentaire et je trouve ça honteux : est-ce que votre manière de voir la cuisine va dans le bon sens ?
Vous posez une question essentielle. Un rapport vient de confirmer le chiffre de 45 % de gaspillage, entre le champ et l'assiette. Selon les estimations de la semaine dernière, on oscille entre 35 et 50 %. Or ce gaspillage n'est pas le fait de la négligence, seulement, mais des circonstances qui entourent la cuisine. En été, quand vous mangez des fraisesfraises, il a fallu qu'elles soient mises dans des barquettes, et transportées, qu'elles attendent le client, etc. Or, la cuisine note à note a été proposée exprès pour éviter cela. Ce qui signifie que si l'on évite 50 % de gaspillage, on multiplie la production agricole mondiale par 2 ! Pour éviter cela, il faudra enseigner aux agriculteurs à fragmenter les produits agricoles, ce qui aura de surcroît l'avantage que d'éviter de transporter de l'eau (une tomate, c'est 95 % d'eau). Je répète enfin partout que nous avons devant nous : - une crise de l'énergie - une crise de l'eau - 9 milliards d'humains à nourrir bientôt. Mais, inversement, nous ne devons pas tarder à apprendre à cuisiner les fractions que les agriculteurs pourront produire.
Gatsu : Bonjour à tous. Première question naïve : quel est l'effet de l'ajout du sel sur la stabilité des blancs en neige ?
Aucun... Mais je sais aussi que rien ne remplace l'expérience (qui est difficile à faire). Bon courage pour les tests. D'ailleurs, c'est ce genre de tests que je propose de faire dans les Ateliers expérimentaux du goût, ou bien dans les Ateliers science & cuisine (programme des collèges).
OrqueOrque : Monsieur This, je vous ai déjà entendu à la radio il me semble et je vous avais trouvé passionnant : collaborez-vous vous-même avec des grands chefs de la cuisine disons « traditionnelle » ? Merci à vous !
Merci du message. Est-ce que je « collabore » ? Disons que je cherche à les aider. Et Pierre Gagnaire est mon ami, surtout. Pour la cuisine note à note, j'ai fait plusieurs ateliers (gratuitement bien sûr) pour les chefs des Toques blanches internationales. Et de nombreux cuisiniers viennent aux Cours annuels (cette année, les 4 et 5 février sur le thème « Manger : comment la considération de l'objectif détermine-t-elle la pratique culinaire ») et aux séminaires mensuels. Tout est public, et gratuit.
Tex : Que pensez-vous des nouvelles émissionsémissions culinaires qui mêlent concours et convivialité, est-ce que votre cuisine déjà assez éloignée des sentiers battus pourrait trouver sa place dans ce genre de shows ?
Qu'est-ce que je pense des émissions ? Je n'ai pas la télévision, mais si vous me dites qu'il y a de la convivialité, tant mieux : j'ai publié il y a quelques années un livre auquel je crois beaucoup, et dont le titre disait le projet : La cuisine, c'est de l'amour, de l'art, de la technique. Est-ce que la cuisine note à note pourrait y trouver sa place ? OUI !!!!! Et ce serait merveilleux d'avoir une telle promotion. Je vous parie que cela viendra bientôt... puisqu'une équipe de télévision sort à l'instant du laboratoire ;-)
Blondie : C'est une cuisine réalisable au quotidien ou uniquement réservée aux grandes occasions ?
C'est une cuisine très facile à faire. Mieux : plus économique, plus rapide, plus facile. Mais pour l'instant, je pousse les chefs à préparer des recettes. Certaines sont déjà dans mon livre qui vient de sortir, et je vais en mettre le plus possible en ligne. D'autre part, permettez moi une précision : AFIN que la cuisine note à note s'introduise rapidement, j'aide d'abord les chefs étoilés à la faire, parce que l'expérience dit que l'espèceespèce humaine a besoin de l'argument d'autorité, qui fut utilisé par Parmentier pour généraliser la pomme de terre en France : en la faisant manger au roi, il a poussé tout le monde à vouloir des pommes de terre. Cette stratégie est celle que j'ai utilisée pour populariser la cuisine moléculaire, et je la reprends pour la cuisine note à note. Autrement dit, vous verrez d'abord dans la presse de la cuisine note à note chez des chefs étoilés, pour des menus très coûteux, avant de la voir chez tous les Français. Mais ne vous y trompez pas : ce qui m'intéresse, en tant qu'agent de l'État, payé par les contribuables français, c'est que tous puissent en bénéficier. Et, au passage, nous enrichirons les agriculteurs, ce qui est un projet politique essentiel.
Joker : Bonjour, je souhaiterais m'initier à la cuisine note à note, certaines de vos recettes m'ont titillé les papilles... Cependant, je ne trouve que peu de composants dans le commerce. Existe-t-il un risque de santé important en mélangeant en mauvaises quantités, certains ingrédients, d'où une réglementation sur la vente ? Et où trouver les ingrédients ailleurs que sur Internet ? (Pas confiant sur la qualité, ni sur la provenance).
Ça c'est une question compliquée pour un chat. Oui, pour l'instant, on ne trouve pas encore facilement tous les produits, mais j'ai mis sur le Forum Cuisine note à note d'Agroparistech une liste d'adresses. Pour les agents de consistance, c'est assez bien réglé. Pour la saveur, il y a encore à créer des sociétés qui vendront cela. Pour les odeurs, je pousse des jeunes entrepreneurs à faire des sociétés qui vendront des dilutions des composés odorants. Tout cela est en train de se faire gentiment... Mais vous devez (pouvez) savoir que nous en sommes au tout début, comme quand je présentais la cuisine moléculaire, il y a 30 ans. À l'époque, mes amis cuisiniers me demandaient comment se procurer de l'azote liquide... et les sociétés ont finalement fait des filiales de distribution. Si vous demandez aux grosses sociétés des produits, ils seront poussés à faire ce qu'il faut. Militons. Pour la « formation », je ne doute pas, aussi, que nous aurons des formations. Il y en a eu une, le 8 juin dernier, à l'Ecole Cordon bleu, à Paris. Il y aura une formation lors du Téléthon prochain, je crois à l'Hôtel Renaissance La Défense (pas sûr, demandez-leur).
Risque santé ? Ce n'est pas vraiment le mélange que l'on doit craindre. Surtout, on peut mettre ce que l'on veut. Les composés odorants sont en quantités infimes, partie par million. Pour les composés sapides, pas beaucoup de problème. Pour les couleurs, il y a les colorants admis comme additifs, dont la sécurité a été testée depuis longtemps. Pour les consistances, j'aurais tendance à penser qu'il n'y a pas de problème. Et puis, pourquoi ne s'interroge-t-on pas plutôt sur les dangers des benzopyrènes, dont les viandes grillées sont pleines ? Il y a quoi rire (jaune)... ou militer pour plus de diffusiondiffusion de l'information saine, pas partisane, sur la toxicitétoxicité des ingrédients alimentaires, et cela passera par l'enseignement de la chimie. Qu'est-ce qu'un composé, un produit, une moléculemolécule ? Sans comprendre cela, j'ai peur qu'on ait du mal à manger sain, et sereinement. Attention, aussi : notre monde est plein de marchands de peur !
Tchat avec Hervé This : la cuisine note à note et la question du goût
Dans le cadre de la Fête de la science du 10 au 14 octobre 2012, Hervé This, éminent physicochimiste plus connu pour ses interventions « science et cuisine », a répondu aux questions des internautes. Cette page regroupe les discussions liées à la question du goût et du plaisir de la cuisine note à note.
Sur cette page est retranscrite la seconde partie du tchat avec Hervé This, spécialiste de la cuisine note à note, qui a eu lieu en partenariat avec Futura-Sciences le 10 octobre 2012.
Monsieur Georges : Cher monsieur le professeur, car il semble plus logique de vous appeler comme cela, ma question concerne le plaisir : ne perd-on pas dans votre cuisine ce que l'on gagne toujours en plaisir à manipuler des produits frais ou de premier choix, à les découper, les presser, les orner, les faire mijoter, etc. Sans vouloir faire mon rabat-joie, votre cuisine ne manque-t-elle pas cruellement de rondeur, d'identité et de stylestyle ? Pardon pour la longueur.
Pardonnez-moi de vous reprendre : cette cuisine note à note ne sera pas ma cuisine, puisque je ne suis pas cuisinier, mais celle des cuisiniers qui la pratiqueront. Or les expériences ont montré que ces gens s'amusent beaucoup (demandez-leur). Le style, c'est une question de « personne » (disait Buffon : le style c'est l'homme). D'ailleurs, nous avions eu un très passionnant débat, ici, avec des chefs traditionnels, sur la question « qu'est-ce qu'un beau produit ? ». Et la principale conclusion était que la viande à griller n'a pas les mêmes critères que la viande à braiser. Pour griller du bœuf, il faut une viande tendre. Pour braiser, il faut une viande très dure. Idem pour un coq au vin, par exemple. En réalité, la principale difficulté de la cuisine note à note, c'est de la penser. J'ai peur qu'elle soit faite pour la génération qui me suivra, et pas pour moi ;-)
Sarah : Que pensez-vous des arômes chimiques qui donnent un parfum (goût ou odeur) « non réel » à certains produits, au sens ? Manger une glace à la fraise sans « vraie » fraise dedans, c'est à mon avis trompeur.
Question difficile, parce que les mots sont « minés ». Normalement, pour le dictionnaire, un arôme, c'est l'odeur d'une plante aromatiquearomatique. Donc il n'y a pas d'arôme chimique. Ce que vous voulez dire, et qui est la terminologie que je crois juste, c'est « composition odoriférante ». Une fois cela dit, il faut répondre à votre question : la loi de 1905 demande que les produits alimentaires soient sains, loyaux, et marchands. Et je me bats pour dire que les « arômes » ne sont pas loyaux, non pas en tant que produits, car ils sont parfois très bons, très bien, mais le fait de les nommer arôme n'est pas loyal, et source de confusion (donc pas loyal). Je propose que l'on cesse d'accepter de nommer glace à la fraise, ou yaourt à la fraise, une glace, un yaourt, où il n'y a pas de fraise. En revanche, de tels produits ont souvent un goût de fraise, ou qui ressemble à la fraise, comment le nommer ? D'autre part, il y a derrière votre question la discussion entre « composé extrait d'un produit naturel », ou « composé de synthèse ». Je propose de bien étiqueter les produits alimentaires ainsi. À noter que du sucre de synthèse ou du sucre extrait d'une betterave, ou de l'eau de synthèse et de l'eau de pluie sont tout à fait identiques quand ils sont purs. À noter aussi que le naturel n'est pas une garantie de sécurité ! Pensons à la ciguë, à l'amanite phalloïdeamanite phalloïde, au choléracholéra, à la pestepeste, au tsunamitsunami, à la grêle, etc. Pour ceux qui veulent un discours intelligent sur la nature, voir le livre De la Nature, de John Stuart Mill. Et attention : quand j'entends le mot nature, je crains toujours qu'on me vende de l'idéologie ou des produits.
Anabelle : Et du coup ce serait quoi un restaurant gastronomique moléculaire idéal selon vous ? Il faudrait également reimaginer le restaurant tel que nous le connaissons et le consommons ?
Un restaurant gastronomique moléculaire idéal ? 1. restaurant gastronomique : cela est une mauvaise terminologie, et je crois que vous voulez dire « restaurant de haute cuisine » 2. restaurant moléculaire : il y en a déjà plein, dans le monde entier 3. idéal ? l'idéal, c'est ce que je préfère, mais pour vous, c'est ce que vous préférez. Et puis, la perfection n'est pas de ce monde. Enfin, oui, réinventons le restaurant, pour en faire un lieu où l'on ne s'ennuie pas ! Pourquoi rester longtemps à la même place, par exemple ? Faut-il manger couché, debout, la tête en bas, etc. ? Comment devons-nous être accueilli ? Devons-nous voir la cuisine qui se fait, ou pas ? Comment doivent-être les lumièreslumières, le son, etc. ? Bref, il y a de quoi inventer, réfléchir, faire mieux !
Merci Hervé This. Un mot pour conclure ?
C'est à l'école que nous devons commencer à explorer la cuisine note à note, parce que c'est là que se forme la prochaine génération. Enrichissons les agriculteurs, interrogeons-nous sur ce que nous mangeons, réfléchissons bien à la nutrition. La question de l'alimentation sort bouleversée de l'idée - maintenant bien incarnée - de la cuisine note à note. Je crois que je ne me tromperai pas beaucoup en pensant que bientôt apparaîtra un chef qui aura trois étoilesétoiles au Michelin, parce qu'il fera quelque chose de très nouveau ET de TRÈS BON, comme ce fut le cas de Ferran Adria en 1984. Ferran n'était pas le premier cuisinier à faire de la cuisine moléculaire (les frères Conticini avaient fait des choses merveilleuses bien avant lui), mais :
- il a fait très bon ;
- il a été très actif ;
- il a très bien communiqué ;
- il a osé dire à la face du monde qu'il faisait de la cuisine moléculaire.
Et l'on a vu le résultat. Je crois qu'il en ira de même pour la cuisine note à note, et, en tout cas, je fais tout pour que cela ait lieu. D'où le livre récemment publié aux éditions Belin : La cuisine note à note en 12 questions souriantes. Oui, souriantes, parce que nous n'avons qu'une vie : autant faire des choses sérieuses sans se prendre au sérieux, non ? Vive la chimie, vive la connaissance produite et partagée, vive la gourmandise éclairée !!!!