L'aéroport de Tempelhof, abandonné depuis trois ans, reprend vie sous les outils de quelque 300 jardiniers, qui ont investi l'espace pour y créer un jardin urbain communautaire. Comment un tel projet est-il né ? Rencontre avec ces jardiniers de l'insolite.

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    L'aéroport désaffecté de Tempelhof est devenu un paradis pour jardiniers urbains. © AFP photo/Odd Andersen

    L'aéroport désaffecté de Tempelhof est devenu un paradis pour jardiniers urbains. © AFP photo/Odd Andersen

    Des tournesolstournesols ont remplacé les avions et l'odeur du chou celle du kérosènekérosène, créant un des plus grands jardins urbains d'Europe sur l'aéroport de Tempelhof, qui permit de briser le blocus soviétique de Berlin en 1948-49.

    Lancé par une dizaine de pionniers en avril, le projet Allmende Kontor qui tire son nom d'une forme de jardinage communautaire du Moyen Âge, rassemble désormais 300 jardiniers qui font pousser leurs fruits, légumes et autres fleurs dans l'enceinte du célèbre aéroport désaffecté depuis trois ans.

    Piments, jeunes pousses de châtaignierschâtaigniers, milletmillet s'élancent aujourd'hui vers le ciel, à l'endroit même où les Alliés transportèrent les denrées essentielles à la survie de Berlin-Ouest, durant le blocus de la ville par les Soviétiques, point de départpoint de départ de la guerre froide.

    Fruits, légumes et fleurs poussent désormais sur l'ancien aéroport de Tempelhof. Un jardin étonnant ! © Ezwa, Flickr CC by nc-nd 2.0

    Fruits, légumes et fleurs poussent désormais sur l'ancien aéroport de Tempelhof. Un jardin étonnant ! © Ezwa, Flickr CC by nc-nd 2.0

    Un jardin communautaire urbain de 5.000 m2

    Le grand jardin potager forme ainsi une large bandelarge bande circulaire de 5.000 m2 le long des bâtiments en arc de cercle de l'aérogare, construite sous les nazis et baptisée « la mère de tous les aéroports » par le célèbre architectearchitecte britannique Norman Foster.

    Projet environnemental, Allmende Kontor a aussi pour vocation de refléter la diversité culturelle du quartier, explique Gerda Münnich, l'une des instigatrices. Tous les âges et toutes les origines s'y rencontrent. Soroush Hosseini, professeur de 60 ans, arrivé d'Iran en 1977, veille par exemple sur ses lychees, ses avocatsavocats, sa lavande et ses herbes aromatiques. Il a découvert le jardin « lors d'une promenade ». « Sur mon balcon, mes plantes manquaient de soleilsoleil, maintenant, elles ont de l'espace et moi, de l'horizon », explique-t-il dans un sourire. « Mais le plus beau ici, ce sont les gens. Ils sont bien plus importants que mon petit lopin. On se fait des amis, on s'assoit et on discute du monde et de la politique ».

    Pour le moment, faute d'un réel projet, l'aéroport est un gigantesque terrain de jeu pour les Berlinois qui s'adonnent avec avidité aux joies du vélo et du roller-blade sur ses anciennes pistes d'envol. Ils y installent aussi leur barbecue dans un secteur dédié, à proximité d'un vieux terrain de baseball qu'utilisaient autrefois les GI's.

    Les jardins de Tempelhof, menacés et menaçants ?

    La plupart des jardiniers ont peur que des promoteurs sautent sur l'affaire dès que leur bail aura pris fin. Au lancement du projet, ses promoteurs ne se sont d'ailleurs vus accorder qu'un droit d'installation de trois ans, avec trois en option, en attendant que la ville développe quelque chose.

    Autre souci : les passionnés de la binette rechignent à creuser profondément le sol, craignant qu'il soit pollué par le kérosène ou qu'il soit truffé de bombes alliées, oubliées depuis la seconde guerre mondiale.

    Après les potagers sur balcons, la tendance est aux jardins communautaires urbains. © adineland, Flickr CC by nc-nd 2.0

    Après les potagers sur balcons, la tendance est aux jardins communautaires urbains. © adineland, Flickr CC by nc-nd 2.0

    Le jardin urbain, une réponse à la hausse des prix

    Loin d'être isolé, les jardins de Tempelhof s'inscrivent dans un mouvementmouvement que l'on retrouve dans de nombreuses grandes villes, notamment dans les quartiers dégradés, où le jardinage urbain est aussi un moyen de faire face à la pauvreté.

    Selon la sociologue Christa Müller, éditrice du livre Jardinage urbain, la crise économique, une perte de crédibilité de la politique ou encore la montée des prix des aliments, expliquent le développement de ces initiatives. « On peut vraiment voir Allmende Kontor comme un acte politique », estime-t-elle, ajoutant : « les gens veulent redéfinir leur espace urbain à leur sauce. Pour les jeunes, c'est devenu cool de jardiner, de produire, de ne pas seulement consommer ».