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Le Gois : route submersible de Vendée
Nous sommes en Vendée dans la région Pays de la Loire, au nord-ouest de la Vendée pour être précise. Ce dossier va vous faire passer par une route submersible, la plus longue d'Europe, et vous raconter un peu son histoire.
Le passage du Gois relie, à marée basse, l'île de Noirmoutier et le continent avec la ville de Beauvoir-sur-Mer.
Un passage unique dans la baie de Bourgneuf
Aujourd'hui, nombreux sont ceux qui viennent découvrir cette originalité de la nature, en prenant parfois le risque de se faire surprendre par la marée et de se retrouver les pieds dans l'eau.
C'est en 1701, qu'on le trouve mentionné sur une carte « des isles de Noirmoutiers et de Bouing et des costes de la Duché de Retz ». Masse, qui est l'auteur de cette carte, le nomme ainsi : « Vases fermes sur lesquelles on passe de basse mer de Noirmoutiers en Bouing vis à vis le village de l'Epois ».
Le passage à cette époque était nettement plus long : les eaux étaient plus avancées dans les terres. Aujourd'hui, sa longueur est de 4,125 kilomètres.
Au XIXe siècle, le département crée le métier de « Garde-Goa », ce qui va améliorer un peu le service et diminuer les dangers de la traversée.
En 1832, le département inscrit le passage sur la liste des voies du département. La douane s'y installe jusqu'en 1945.
Notes : Une partie des informations de ce dossier sur le Gois sont fournies par la mairie de Beauvoir-sur-Mer que nous remercions.
Le passage du Gois
Étymologiquement, le mot Gois, Goï ou Goye en patois, amena le verbe « goiser » qui signifie : se mouiller les pieds en marchant dans l'eau. Or, en bas-latin, on dit « guazzare » pour « passer à gué ». Le mot Gois serait-il donc une déformation de gué ? Le caractère unique du Gois est son exceptionnelle longueur : 4,5 km. La hauteur d'eau qui le recouvre à marée haute varie de 1,30 mètre à 4 mètres, suivant le coefficient de marée.
Un passage submersible
La première apparition du passage du gois dans l'Histoire remonte à 820, sous Louis le Pieux : Hilbod, abbé du monastère de Saint-Philbert de Noirmoutier, demande à Pépin, roi d'Aquitaine, de protéger l'île d'Her contre les invasions normandes. Pépin refusa. Le roi « trouva qu'on ne pouvait en tout temps porter secours à l'île d'Her parce que l'accès de cette île n'était pas toujours accessible par les marées de morte-eau ».
Ainsi, on peut penser que le Gois existait déjà. Mais au début de notre ère quaternairequaternaire, Noirmoutier n'était pas une île ! Donc, le Gois n'existait pas. C'est l'effondrementeffondrement de l'actuelle baie de Bourgneuf qui la fit « île ».
Au XVIIe siècle, le Gois était un problème car très difficile à défendre, c'est ce qu'indique Vauban à Louvois de 1689 : « l'endroit du royaume où les entreprises des Anglois et des Hollandois sont le plus à craindre est par la baie de Bourgneuf près l'isle de Noirmoutiers parce qu'une armée navale y peut demeurer avec autant de sureté que dans un port, que l'isle de Noirmoutiers qui n'est séparée de la terre ferme que par un petit bras qui assèche quelquefois jusqu'à y pouvoir passer à pied sec... ».
C'est en 1701 que ce passage reliant le continent à l'île est pour la première fois mentionné sur une carte géographique.
Un passage classé
Au XIXe siècle le département crée le métier de « Garde-Goa ». La douane va s'y installer jusqu'au 31 décembre 1945. En 1832, le département inscrit le passage sur la liste des voies du département. Ainsi, le Gois commence à être entretenu. Des potences avec des lumières sont installées de chaque côté du Gois pour indiquer la sortie aux personnes en difficulté. Puis le Gois est classé et devient « Route de Napoléon-Vendée à Noirmoutier ».
Au début du XXe siècle, le trafic sur le Gois était de cent charrettes attelées par 24 heures, quatre voitures hippomobiles par jour, dix automobilesautomobiles par mois, 12 000 piétons, six cents vachesvaches, six cents chevaux et ânes par an !
La route est élargie et deux rampes d'accès sont aménagées. Le Gois est alors classé route nationale numéro 148 en 1932. En 1935, la chaussée est à refaire.
Louis Brien va utiliser des pavés mesurant 40 cm de côté et 12 cm d'épaisseur, pesant entre vingt et trente kilos. Le chantier va durer jusqu'en 1939. On observe encore aujourd'hui ce pavage caractéristique du Gois. Le pavage de palpanches et de béton est disposé de part et d'autre, stabilisant le fond sableux. Au-dessus, une couche de pierre puis une couche de sablesable servent de « matelas » aux pavés.
Une traversée au rythme des marées
Les balises sont un élément majeur du Gois, elles ont sauvé de nombreuses vies. Cependant, le Gois a toujours été le théâtre de drames, encore aujourd'hui. Depuis le 7 juillet 1971, la liaison entre le continent et Noirmoutier est également assurée par un pont, qui n'a jamais fait concurrence au Gois et à son charmecharme ! Il y a plus de mille ans, la rencontre des deux courants marins de la Baie se heurtent et donnent naissance à un hauts-fonds qui s'est stabilisé il y a un siècle.
Aujourd'hui, sa traversée représente certains risques si le voyageur ne respecte pas les horaires des marées de basses eaux. Il est convenu que l'on peut passer par beau temps et fort coefficient de 1 h 30 avant et après basse mer. Respectez donc les mises en garde et renseignez-vous !
Une course à pied, Les Foulées du Gois, y est organisée chaque année depuis le 20 juin 1987. Le signal de départ est donné lorsque les premières eaux montantes franchissent la route.
La pêche à pied
Lors des grandes marées, le lieu est réputé pour la pêchepêche à pied. Dans la baie autour du Gois, on peut récolter des palourdes, des coques ou des huîtres.
Le brouillardbrouillard peut devenir très dangereux pour les pêcheurs à pied qui perdent tout sens de l'orientation et peuvent se faire piéger par la marée montante.
De l’autre côté du Gois se trouve Noirmoutier
Pour lutter contre les invasions vikings et normandes, les seigneurs de la Garnache, propriétaires, ainsi que les moines, firent construire des fortifications à partir de 830. Le château y est construit au XIIe siècle. L'île de Noirmoutier, comme l'île de Bouin, dépendait de la seigneurie de la Garnache, tantôt poitevine au Moyen Âge, tantôt liée à la Bretagne (au IXe siècle). Au cours de son histoire, l'île eut à subir plusieurs tentatives d'invasions anglaises (1342, 1360, 1386), espagnoles (1524, 1588) hollandaises en 1674 par l'amiral Tromp. Dès le XVIIe siècle, la constructionconstruction de digues et de polders assécha des terres gagnées sur la mer qui permirent de créer des champs.
La Baie de Bourgneuf
Ce petit paragraphe n'est qu'un aperçu de la baie qui n'est pas, ici, notre sujet, mais qui est « la cause » du Gois : il faudrait un gros dossier entier pour parler de ce magnifique et magique endroit ! L'île de Noirmoutier à l'ouest et le continent à l'est, délimitent cette baie, qui est sous l'influence des eaux marines et des crues de la Loire.
Rôle des petits cours d'eau
Les apports de petits cours d'eau contribuent à la dessalure. Le marnagemarnage (moyenne 5,3 mètres) découvre à chaque marée de vastes vasières. La rive orientale est endiguée sur 30 km.
La baie reçoit les eaux douces de son bassin contrôlé par des éclusesécluses, source de conflits permanents avec les ostréiculteurs qui ne veulent pas trop d'eau douce, mais aussi avec les exploitants agricoles qui, eux, ne veulent pas voir leurs terres inondées trop longtemps. La nappe des calcairescalcaires lutétiens, en relation avec la baie est salée et riche en éléments nutritifs, entre autres les nitrates (zone vulnérable).
Qualité des eaux du bassin versant
Les eaux du bassin versantbassin versant continental, eutrophies, peuvent être de mauvaise qualité (matière organique, azote, phosphorephosphore). La qualité sanitaire des eaux conchylicoles est en général bonne, mais peut être sporadiquement détériorée. Les eaux de baignade et de pêche à pied ont une qualité moyenne à médiocre.
Il n'y a pas de signe de pollution chimique importante, mais des valeurs un peu élevées en cuivrecuivre, en pesticidespesticides et en HAP en certains endroits à cause des marées noires.
Activités économiques de la baie de Bourgneuf
La zone est largement couverte par les inventaires ZnieffZnieff et ZicoZico. Elle est très peu anthropisée, mais supporte une fréquentation humaine importante, résultant d'activités diverses : conchyliculture sur estranestran et en marais, saliculture, tourisme. Les vasières et les marais constituent une zone d'attrait pour l'avifauneavifaune.
La baie de Bourgneuf est un vaste arc maritime tiré depuis la Pointe Saint-Gildas (sud de l'estuaireestuaire de la Loire) jusqu'à Beauvoir-sur-Mer et fermé par l'île de Noirmoutier jusqu'à l'île du Pilier. Elle inclut la côte sud du pays de Retz, le littoral du Marais breton et la face est de l'île de Noirmoutier.
Baie de Bourgneuf ou Baie de Bretagne ?
Au Moyen Âge, elle se nommait Baie de Bretagne, le fond de la baie était plus vaste et s'étendait jusqu'à Machecoul et Challans avec plusieurs îles, dont Bouin. L'envasement, la création de polders et de marais salants ont créé le Marais breton, réduisant la superficie de la baie.
Le Marais breton fut le plus grand producteur de sel du XVe siècle au XVIIIe siècle et les navires de la Hanse venaient s'y approvisionner en sel gris. La prospérité cessa au XVIIIe siècle lors de l'envasement qui menaçait la navigation. L'envasement est toujours d'actualité, provoqué par des alluvions provenant de la Loire.
Bourgneuf en Retz, Machecoul, Challans, Beauvoir-sur-Mer, étaient les ports de mer de la baie de Bretagne. La ligne de rivage se devine encore par la séparationséparation entre bocagebocage et marais. Sous l'Ancien Régime, cette région fut le centre d'une contrebande importante opérée par les « coureurs de lunelune » qui trafiquaient, essayant sans cesse d'échapper au contrôle des gabelous. Ce trafic sévit partout et toucha directement ou indirectement l'ensemble de la population.
La contrebande, faux tabac, sel, « vins de mer », eau-de-vie et indiennes, à pied, à cheval ou à bord de « chattes », était opérée depuis les îles de Bouin, de Noirmoutier et d'Yeu, accentuée par la franchise insulaire. Une longue histoire racontée par Émile Boutin dans « La baie de Bretagne et sa contrebande : sel, vin, tabac, indiennes », aux éditions Siloë.
Les principaux ports actuels de la Baie de Bourgneuf
- Port de la Pointe Saint-Gildas.
- Port de la Noëveillard (Pornic).
- Le Vieux-port (Pornic).
- Port du ColletCollet (Les Moutiers-en-Retz).
- Port des champs (Bouin).
- Port du Bec (Bouin).
- Fromentine (La Barre-de-Monts).
- Port de Noirmoutier-en-l'île.
Les huîtres de la Baie de Bourgneuf
À l'époque gallo-romaine, on expédiait les huîtres assez loin. L'huître était ronde et plate, c'était « le pied de cheval ». Les moines mangeaient des huîtres et les commercialisaient. Pendant des années, il y a eu abondance, mais l'hiverhiver 1788-1789, glacial vit toutes les huîtres périr. Après la Seconde Guerre mondiale, des ostréiculteurs charentais viennent s'établir en Vendée. Le naissain provenait de Charente-Maritime. En 1972, l'huître japonaise remplace la portugaise et amène, probablement, avec elle l'alguealgue des Sargasses et Crepidula fornicata, deux envahisseurs dont la baie se passerait bien.
À l'âge de 18 mois, les coquilles forment un gros paquetpaquet ; on les ramène au port et elles sont séparées les unes des autres avant de retrouver leurs parcs. Ce travail, le détroquage, occupe une nombreuse main-d'œuvre. Le gros du chiffre se fait naturellement pour les fêtes de fin d’année et les vols sont fréquents à cette période.
Le pont de Noirmoutier-en-l'Ile
Le pont a enfin permis aux habitants et travailleurs de la région de se rendre indépendants des marées pour rejoindre l'île. Il fut longtemps payant d'ailleurs comme l'est encore le pont de l'île de Ré.
Il enjambe la baie au dessus du lieu-dit « La Fosse » qui voit passer tous les courants de marées et c'est un point de vue magnifique sur la Baie d'un côté et sur la mer et le deltadelta de marée de l'autre. (Pour d'autres données techniques de http://www.fr.structurae.de)
Construction du pont de Noirmoutier-en-l'Ile
- Achevé en : 1971
- Lieu : Noirmoutier-en-l'Ile, Vendée (85), Pays de la Loire, France
- Type de construction : Pont en poutrepoutre-caisson
- Fonction / usage : Pont-route
- Maître d'œuvreMaître d'œuvre : Direction Départementale de l'Equipement de la Vendée
- Construction Freyssinet International
- Matériaux de construction : tablier : béton précontraintbéton précontraint, piles : béton armébéton armé, culées : béton armé
Dimensions :
- portée principale : 88 m ;
- longueur totale : 583 m ;
- gabarit : 24 m ;
- longueurs des travéestravées : 55 m - 88 m - 55 m ;
- largeur de la poutre : 13,50 m.
Quantités des matériaux utilisés
- piles et culées :
- tablier :
- volume de béton : 4 800 m3 ;
- acier de précontrainte : 270 t ;
- aciers passifs : 4 000 t ;
- couche de sellement en bitumebitume : 6 000 m2.
- pieux, longueur totale :
- 1 800 m.
Remarques
Le tablier se décompose en :
- viaduc d'accès côté continent : 4 travées continues de 55 m de portée ;
- viaduc principal : 3 travées continues 55 - 88 - 55 m ;
- viaduc d'accès côté île : 3 travées continues de 55 m de portée.
Le tablier est constitué de deux poutres caissons en béton précontraint de 3,80 m de largeur avec des encorbellementsencorbellements de 1,32 m de portée.
Ils sont reliés par un hourdishourdis de clavage de 0,80 m de largeur coulé en place.
Les caissons sont préfabriquéspréfabriqués.
Les poutres caissons sont réalisées en 258 voussoirsvoussoirs. Ils sont mis en place grâce à un portiqueportique se déplaçant sur une poutre de lancement reposant sur trois appuis. Poids d'un voussoir préfabriqué : 50 t environ.
Pour aller plus loin
Articles à lire sur Futura... et autres sites et documentations à consulter.
Coquillages en péril ?
Autres sites à consulter :
Autres documentations :
- Pont de Noirmoutier, dans « Bulletin annuel AFPC », 1971- 1972 ;
- Serge Montens, Les plus beaux ponts de France, Bonneton, Paris, 2001.