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Escherichia coli, ici à l'image, est la bactérie la plus célèbre de la flore intestinale. On trouve aussi des dizaines d'autres espèces qui profitent de notre système digestif pour se développer. En contrepartie, elles régulent nos taux de sérotonine, qui contribuent au bien-être ! © Janice Haney Carr, CDC, DP
L'union fait la force. Et si les milliards de bactéries qui colonisent notre tractus digestif profitent des aliments qu'on leur apporte, elles aussi nous seraient bénéfiques et à plus d'un titre. Elles nous aident à digérer et dans le cas où elles sont trop efficaces contribuent à nous faire grossir, mais, plus étonnant, elles nous préservent des allergies.
Ce n'est pas le seul impact sur notre organisme puisque des chercheurs de l'University College de Cork (Irlande) viennent de montrer qu'elles régulent également les taux de sérotonine, une moléculemolécule jouant aussi bien le rôle de neurotransmetteur que celui d'hormone et qui intervient dans le contrôle de l'humeur. Dans des situations de stress, d'anxiété ou de dépression, les concentrations de sérotonine sont altérées. C'est d'ailleurs à ce niveau que la plupart des antidépresseurs agissent afin de rétablir les niveaux normaux.
La flore intestinale, gardienne des taux de sérotonine
Cette expérience, publiée dans Molecular Psychiatry, fait appel à des souris ayant la particularité d'être dénuées de toute communauté bactérienne. Ainsi, les chercheurs ont reproduit artificiellement la situation extrême où un individu ne possède pas de flore intestinale pendant les premières phases du développement. Les résultats sont sans ambiguïté : cela a des répercussions nettes sur les taux de sérotonine... Et sur le comportement. Ces rongeursrongeurs manifestaient davantage d'anxiété. Les effets étaient d'ailleurs plus criants chez les mâles que chez les femelles.
Les troubles de l'humeur sont associés à une variation des taux de sérotonine circulant. À la base, on trouve les bactéries de la flore intestinale ! © Brian McEntire, Fotolia
Les auteurs ont ensuite injecté des bactériesbactéries à leurs cobayes pour reconstituer le microbiotemicrobiote (l'ensemble des micro-organismesmicro-organismes) intestinal. Les dommages semblent irréversibles dans la mesure où les taux de sérotonine ne sont pas revenus à un niveau basalbasal normal. Cependant, l'anxiété a manifestement diminué chez les souris. Les troubles de l'humeur ont reculé malgré une neurochimie toujours défaillante.
Une thérapie bactérienne contre les troubles de l’humeur
Un axe microbiomemicrobiome-intestin-cerveaucerveau avait déjà été mis en évidence par des recherches précédentes (le microbiome caractérisant le milieu de vie des germesgermes). Une étude de 2011 révélait également que les bactéries de la flore intestinale diminuaient l'anxiété et la dépression. Ce nouveau travail précise désormais que cet effet se manifeste au niveau neurologique, entraînant des variations dans les taux de sérotonine lorsque les communautés bactériennes d'un organisme sont dégradées.
Que peut-on retenir d'une telle découverte ? Tout simplement qu'il faut faire attention à son hygiène de vie pour limiter les risques de dépression, car le régime alimentaire influe sur la qualité de la flore intestinale. La consommation d'antibiotiques doit également être réduite au strict nécessaire. Mais il faut voir aussi le bon côté des choses. On a longtemps cherché à éliminer les microbes ; voilà l'occasion de les utiliser à notre profit et de développer une thérapiethérapie bactérienne contre les troubles de l'humeur.