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Un décollage en arrière, une manœuvre efficace pour échapper à un danger... © Gwyneth Card et Michael H. Dickinson, Current Biology 18 (9 septembre 2008)
Est-il futile de s'intéresser au décollage de la mouche ? Assurément pas. La manière dont un insecte peut contrôler son vol avec si peu de neuronesneurones (100.000 dans le cas de la drosophile) reste un mystère dont la résolutionrésolution pourrait faire progresser la physiologie animale mais aussi la robotiquerobotique. C'est sûrement l'avis de l'équipe de Michael Dickinson dont le laboratoire du Caltech (California Institute of Technology) est tout entier tourné vers l'étude du comportement des insectes et en particulier de leurs techniques d'envol.
L'une des étudiantes, Gwyneth Card, a utilisé une caméra ultrarapide filmant à 5.400 images par seconde pour saisir les quelques millièmes de seconde que dure l'envol d'une mouche, plus précisément Drosophila melanogaster, la drosophile au ventre noir (dite aussi mouche du vinaigremouche du vinaigre), collaboratrice coutumière des biologistes. L'animal est installé sur une surface et filmé de côté. Un objet est alors vivement approché. Pour s'échapper, la mouche doit donc décoller dans la direction opposée. Tous ceux qui tentent parfois d'attraper les mouches savent que ces insectes en sont capables, même lorsqu'il leur faut partir vers l'arrière. Mais comment font-ils ?
Durant les séquences de cent millisecondes enregistrées par la chercheuse, le décollage est précisément visible, même s'il se déroule très rapidement, en une grosse dizaine de millisecondes.
Cent millisecondes de la vie d'une mouche... Un objet, non visible sur le film est brusquement approché face à l'insecte, à gauche sur les images. Observez bien les pattes du milieu et concentrez-vous sur les toutes dernières millisecondes. © Gwyneth Card et al.
La découverte concerne le mouvementmouvement des pattes (trois paires comme chez tous les insectes). Selon l'origine du danger, la mouche commence par les bouger de sorte de déplacer son centre de gravitégravité à l'opposé. Sur le film présenté ici, on voit nettement la drosophile avancer sa paire de pattes médianes jusqu'à faire pencher son corps vers l'arrière. Elle peut alors sauter brutalement avant de mettre en marche ses deux ailes. Son corps commence à basculer vers l'arrière, comme si l'insecte s'apprêtait à voler sur le dosdos. Mais simultanément, la mouche pivote autour de son axe antéro-postérieur (comme un demi-tour d'un méchoui). L'animal se retrouve alors en bonne position et s'évade sans souci.
Les aviateurs ont redécouvert cette manœuvre beaucoup plus tard. Appelée Immelmann, elle doit son nom à Max Immelmann, pilote allemand de la Première guerre mondiale et consiste en une demi-boucle (une moitié de looping), qui laisse l'avion sur le dos, suivie d'un retournement sur le ventre selon un axe avant-arrière (un demi-tonneau disent les voltigeurs). Cette figure, réalisée dans les compétitions de voltige aérienne, est aussi, pour un pilote de chasse, une manière, comme pour la mouche, de faire demi-tour rapidement face à un danger. Mais aucun avion ne permet aujourd'hui de l'effectuer au décollage...