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La jolie Eleutherodactylus audanti, montagnarde habitant les sommets haïtiens, a certainement des ancêtres navigateurs... Crédit : S. Blair Hedges
Dans les forêts tropicales du nord de l'Amérique du sud, d'Amérique centrale et de toutes les Antilles, vivent de petites grenouilles, entièrement adaptées à la vie sur terre. De leurs œufs sortent des grenouilles et non pas des larves. Toutes sont apparentées et les zoologisteszoologistes les ont regroupées dans un même genre, les éleuthérodactyles.
Comment ont-elles peuplé les îles des Antilles ? Facilement, expliquait-on jusque-là. Cette colonisation a dû se produire au Crétacé supérieur, entre 80 et 70 millions d'années avant le présent, à l'époque où le niveau de l'océan était plus bas. La mer des Antilles (ou mer des Caraïbes) n'était pas ce qu'elle est aujourd'hui et toutes les actuelles Antilles étaient reliées au continent américain.
Mais cette histoire simple ne colle pas avec la génétiquegénétique... S. Blair Hedges et son équipe de l'université de Pennsylvanie se sont attaqués à ce vaste groupe des éleuthérodactyles. Avec 801 espècesespèces, il est le plus diversifié de tous les vertébrésvertébrés. Un peu trop, sans doute pour constituer un groupe vraiment homogène. L'analyse de l'ADNADN de différentes espèces a montré que ces éleuthérodactyles se répartissent en trois sous-groupes qui correspondent à une répartition géographique nette : les grenouilles d'Amérique du sud, celles d'Amérique centrale et celles des Antilles.
Hardies navigatrices
D'après les différences entre les gènesgènes, ces trois sous-groupes (les scientifiques préfèrent dire cladesclades) ont divergé il y a seulement 50 millions d'années environ. Or, à cette époque, la mer des Antilles séparait déjà les îles des côtes américaines. Les espèces insulaires descendent donc d'une population ancestrale qui a dû prendre la mer d'une manière ou d'une autre, non seulement entre la côte et les îles mais aussi entre les îles.
Ces amphibiensamphibiens navigateursnavigateurs étaient-ils des marins ou des nageurs ? La réponse est sans ambiguïté, expliquent les chercheurs. Mettez une de ces grenouilles dans l'eau salée et elle se dessèche jusqu'à en mourir, comme un poissonpoisson d'eau douceeau douce. Il faut par conséquent imaginer des grenouilles juchées sur des boisbois flottés ou des débris végétaux, emportées par les courants et jouant les naufragées sur des îles qu'il leur fallait ensuite peupler de descendants.
De quoi réviser l'idée selon laquelle les amphibiens ont du mal à franchir les barrières océaniques...