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L'effet Mössbauer ou le canon sans recul
On a tous appris, par l'expérience quotidienne ou par la connaissance académique de la conservation de l'impulsion (quantité de mouvement), que quand on va d'une extrémité à l'autre d'une barque sur un lac, la barque se déplace en sens contraire, ce que le vocabulaire usuel désigne par effet de recul. Ce faisant, on donne à la barque une certaine vitesse, donc un peu d'énergie (cinétique).
Rudolf Mössbauer a découvert en 1957 (dans sa thèse) que s'agissant du monde de l'infiniment petit (comme on dit), il n'en va pas toujours ainsi : il existe des phénomènes lors desquels un transfert d'énergie semble s'effectuer sans recul. La loi de conservation de l'impulsion serait-elle violée ? Non, heureusement, mais une fois rassuré sur ce point, la question demeure : comment est-ce possible ?
Rudolf Mössbauer, prix Nobel de physique en 1961, a découvert l'effet portant son nom qui a été utilisé pour tester la théorie de la relativité générale. C'était un grand enseignant. © DP
La réponse tient à cette diabolique quantificationquantification de l'énergie, inventée par Planck en 1900 dans ce qu'il présenta comme « un acte de désespoir » pour sauver la physiquephysique à tout prix, également responsable de la chute à basse température de la capacité calorifique de certains solidessolides, alors que la loi classique de Dulong et Petit (1819) affirme qu'elle est constante, et de mille autres effets pour lesquels seule la théorie quantique est capable de fournir une explication. Le point crucial est que si un système veut bien recevoir un peu d'énergie à condition que ce soit au moins par un quantum insécable, et si vous ne pouvez lui donner qu'une fraction de ce quantum, il n'en veut pas du tout, parce qu'il ne peut pas le prendre et son énergie reste constante : pas de transfert d'énergie, donc pas de recul apparent !