Pour expliquer la rapidité avec laquelle l’Arctique semble vouloir se réchauffer, les scientifiques invoquent, entre autres, un phénomène qu’ils ont baptisé atlantification. Un phénomène par lequel des eaux chaudes de l’Atlantique pénètrent les eaux froides de l’Arctique. Et des chercheurs nous apprennent aujourd’hui que le phénomène a débuté bien plus tôt qu’ils ne l’avaient imaginé.
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Quelque part au nord de la Scandinavie, il est une région, dans la mer de Barents, où l'océan Atlantique entre en contact avec l'océan Arctique. En contact ou même, en collision, pourrait-on dire. Car les scientifiques y ont observé une pénétration de l'eau chaude et salée venue de l'océan Atlantique dans les eaux froides de l'océan Arctique. Un phénomène suffisamment significatif pour que les chercheurs lui donnent un nom. Ils parlent d'atlantification.
Un phénomène qu'ils pensaient assez récent. Mais une équipe de l’université de Cambridge (Royaume-Uni) avance aujourd'hui que l'océan Arctique se réchauffe en réalité par atlantification déjà depuis le début du XXe siècle. Montrant ainsi une connexion entre les deux océans bien plus étroite que les scientifiques ne l'avaient imaginée. Avec des conséquences probables sur le recul de la glace de mer et sur l'élévation du niveau des océans.
Rappelons que tous les océans du monde se réchauffent actuellement sous l'effet du changement climatique anthropique. L'océan Arctique, plus petit et moins profond, se réchauffe plus rapidement. Plus de deux fois plus rapidement, estiment les chercheurs. Notamment depuis ces vingt dernières années. Et ce que l'équipe de l'université de Cambridge a voulu faire, c'est inscrire ce réchauffement dans un contexte historique plus long.
Des modèles climatiques à revoir
Malheureusement, les données satellites ne remontent pas à plus de quarante ans. Alors, les chercheurs se sont tournés vers des données géochimiques et écologiques inscrites dans les sédiments océaniques du côté du détroit de Fram, entre le Groenland et le Svalbard. Ils ont ainsi pu révéler les changements de température et de salinitésalinité intervenus tout au long des 800 dernières années. Et observer une certaine constance de ces valeurs. Jusqu'au tout début du XXe siècle ! Les chercheurs notent ainsi que la température de l’océan Arctique a augmenté d'environ 2 °C depuis 1900.
Ils ignorent toutefois encore le mécanisme qui se cache derrière de cette atlantification rapide. Ils soulignent simplement une forte corrélation avec un ralentissement de la circulation méridienne de retournement atlantique (Amoc) dans la seconde partie du XIXe siècle. Or si le réchauffement climatique anthropique se poursuit et avec lui, le dégel de la calotte glaciairecalotte glaciaire du Groenland, la circulation profonde dans cette région devrait encore ralentir. Avec pour conséquence possible, donc, une nouvelle accélération de l'atlantification.
Les chercheurs attirent également l'attention sur le fait qu'aucun modèle climatique ne reproduit l'atlantification précoce qu'ils ont mis au jour. Le signe d'une compréhension au moins incomplète des mécanismes à l'origine du phénomène. Le signe, peut-être, que l'océan Arctique est encore plus sensible au réchauffement climatique anthropique que les scientifiques ne l'avaient imaginé. Et certainement aussi le signe de la nécessité de réviser les prévisions. D'autant qu'à mesure que cet océan se réchauffe, la glace fond et le niveau de la mer monte. La glace fond et expose aussi un océan qui reflète moins bien les rayons du soleilsoleil. Faisant encore un peu plus monter la température. La glace fond et lorsque le pergélisol se mettra finalement à fondre lui aussi, il libérera une quantité de gaz à effet de serregaz à effet de serre qu'il avait stockée. Des gaz à effet de serre qui alimenteront encore un peu plus le réchauffement climatique.
L'océan Arctique se réchauffe
L'océan Arctique continue de se réchauffer. A l'ouest du SpitzbergSpitzberg, la température de la couche d'eau supérieure atteignant 500 mètres de profondeur est actuellement de 0.6 degrés supérieure aux valeurs mesurées en 2003.
Article de ADIT BE Allemagne paru le 05/09/2004
On a pu constater un réchauffement jusque des profondeurs de 2.000 mètres, comme en témoigne l'Institut Alfred WegenerAlfred Wegener pour la Recherche Polaire et Marine de Bremerhaven.
Les mesures ont été effectuées à bord du bateau de recherche "Polarstern". Ce signal est extrêmement significatif. Pour rendre compte de façon encore plus fine des événements climatiques, le satellite "CryosatCryosat" devrait scruter continuellement dès mars 2005 l'épaisseur de la calotte glaciaire polaire sur 700 kilomètres.