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Les fluctuations quantiques avec l'énergie de point zéropoint zéro ne sont pas les seules manières d'obtenir une densité d'énergie dans le vide se comportant comme une constante cosmologique. On sait que le fameux mécanisme de Brout-Englert-Higgs (BEH), utilisé pour donner une masse aux particules, peut aussi contribuer à l'énergie du vide. Futura-Sciences a interrogé le chercheur théoricien Philippe BraxPhilippe Brax à ce sujet (interview complète dans les pages 3 à 9 de ce dossier).
Le champ de Brout-Englert-Higgs (BEH) est associé à une particule, le fameux boson de Higgs. L’existence de ce dernier a pu être confirmée en 2012 grâce au LHC, visible sur cette photo. © Cern
N’y a-t-il pas une direction de recherche à explorer avec le champ de Brout-Englert-Higgs (BEH) ?
Philippe Brax : En effet, on sait que le champ de Brout-Englert-Higgs Φ, celui du fameux boson de Peter HiggsPeter Higgs, François Englert et Robert Brout, se couple à lui-même. De ce fait, les équations qui décrivent son évolution dans le temps et l'espace font intervenir deux parties qui ressemblent à celle d'une particule se déplaçant dans une cuvette en forme de sombrero. Une partie est donc l'analogue de l'énergie cinétiqueénergie cinétique et l'autre celle de l'énergie potentielleénergie potentielle. On peut d'ailleurs se représenter les valeurs de cette énergie potentielle, qui correspond à une densité d'énergie V dans le vide, sous la forme même de la cuvette.
Les valeurs du champ de BEH Φ donnent alors un point sur la surface de la cuvette. Lorsque le champ de BEH est nul dans le vide, on se trouve au sommet du sombrero et l'énergie du vide associée au BEH est maximale. Par contre, au fond de la cuvette, autour du sommet précédent, l'énergie du vide est minimale, voire nulle, bien que le champ de BEH ne le soit pas.
Le potentiel de BEH, V, définit une densité d'énergie dans le vide qui dépend de l'intensité du champ de BEH Φ décrit par deux composantes en tout point de l'espace et pouvant varier dans le temps. Il prend la forme d'un sombrero, comme le montre le schéma ci-dessus. © Gerard ′t Hooft - Scholarpedia
Si l'on cherche à incorporer le mécanisme de BEH dans les équations de la relativité généralerelativité générale, cette énergie potentielle V apparaît alors comme une constante cosmologique dans les équations, à ceci près que maintenant cette densité d'énergie n'est plus forcément constante dans l'espace et dans le temps.
Ceci suggère de réinterpréter la constante cosmologique comme l'effet d'un ou de plusieurs champs scalaires ressemblant au BEH, dont les différentes contributions annuleraient ou presque celles des énergies de point zéro, de manière à ne plus laisser que la valeur de la constante cosmologique aujourd'hui observée. On peut aussi penser que la constante ne l'est pas vraiment et que de la même manière qu'une bille peut rouler du sommet du sombrero au fond de la cuvette, de tels champs scalaires sont en train de « rouler » lentement à l'échelle cosmologique vers le fond d'une cuvette de potentiel. Nous pourrions être d'ailleurs déjà au fond de cette cuvette.
Malheureusement, le champ de BEH du modèle standardmodèle standard ne nous permet pas de résoudre le problème de la constante cosmologique. Mais l'on pense que d'autres champs de type BEH, à des énergies bien plus élevées, doivent intervenir dans des extensions du modèle standard, comme dans le cadre des théories de grande unificationthéories de grande unification et surtout la supergravitésupergravité. Mais là encore, on retrouve des problèmes d'ajustements fins.