C'est véritablement de "l'archéologie galactique" que vient de réaliser un astronome du Caltech, Carl Grillmair. En analysant des données concernant plus de 70 millions d’étoiles, obtenues lors de campagnes d’observations du Sloan Digital Survey, il a détecté les vestiges d’interactions entre notre Galaxie, des amas globulaires et une galaxie naine. Sous l’action des forces de marée exercées par la Voie Lactée, ceux-ci ont été démantelés et leurs étoiles forment aujourd’hui des anneaux encerclant très probablement notre Galaxie.

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Les courants de marée encerclant notre Galaxie avec la position du Soleil (Crédit : NASA/JPL-Caltech/R. Hurt (SSC)).

Les courants de marée encerclant notre Galaxie avec la position du Soleil (Crédit : NASA/JPL-Caltech/R. Hurt (SSC)).

De faibles arches, constituées d'étoiles et appelées des courants de marée avaient déjà été observées autour d'autres galaxies, comme celle d'Andromède. Aujourd'hui, on en détecte donc aussi autour de notre Galaxie. Leur étude est particulièrement importante car elles contribuent à la reconstitution de l'histoire passée des interactions entre galaxies. On a toutes les raisons de penser que les galaxies ont beaucoup évolué au cours de l'histoire cosmique, du fait de collisions et d'accrétions des galaxies naines par les plus grosses. En particulier, le modèle cosmologique standard   prévoit une plus grande quantité de galaxies naines qu'il n'en est observé, peut-être une part plus importante d'entre elles qu'on ne le soupçonne a en fait été cannibalisée.

Les courants d'étoiles encerclant notre Voie Lactée découverts par Carl Grillmair ont été détectés sur presque tout l'hémisphère nord. Ils représentent de vieilles étoiles situées entre 13 000 et 130 000 années lumières. Sur les 3 observés, deux sont visiblement les restes d'amas globulaires contenant de quelques dizaines de milliers à quelques millions d'étoiles, alors que le dernier est probablement le reste d'une galaxie naine. D'ailleurs, à l'intérieur de ce courant de marée, une zone plus riche en étoiles a été détectée, il s'agirait du reste du noyau de la galaxie naine fragmentée par les forces de marée de notre Galaxie. Un processus qui se poursuit de nos jours avec des galaxies naines récemment découvertes, comme celle du Sagittaire.

La technique de base pour effectuer ces découvertes a été la suivante. Il y a actuellement au moins 150 amas globulaires orbitant autour de la Voie Lactée et, à l'origine, il y en avait probablement des milliers. Ils sont constitués de vieilles étoiles de population II, âgées de 10 milliards d'années, et celles-ci forment des familles d'étoiles de couleurs et de luminosités caractéristiques. C'est en recherchant des groupes d'étoiles de ce type que les courants stellaires ont pu être mis en évidence. Alors qu'elles étaient concentrées dans un espace sensiblement sphérique de 50 à 300 années-lumière, dans lequel elles pouvaient éventuellement entrer en collision, ces étoiles sont maintenant largement séparées par des années-lumière.

Le courant de marée associé à ce qui semble être le vestige d'une galaxie naine est probablement le plus intéressant. Il y a environ 20 galaxies naines répertoriées autour de notre Galaxie mais d'après les modèles de matière noire, il devrait y en avoir plus. Les 9 courants aujourd'hui connus sont globalement compatibles avec l'idée d'un halo de matière noire entourant la Galaxie, mais certaines anomalies dans le mouvement et la répartition des étoiles observées laissent Carl Grillmair songeur. Toujours est-il que l'on soupçonne maintenant que l'environnement galactique proche pourrait bien ressembler à une boule de laine, avec de nombreux mais peu lumineux courants stellaires provenant d'amas et de galaxies naines aujourd'hui disparus.

Il y a donc tout un champ d'études sur la dynamique et l'histoire des galaxies qui vient de s'ouvrir et qui demande des études plus complètes sur ces courants de marée et les étoiles qui les constituent.