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    Le barrage d'Assouan, en Égypte, ou Sadd el-Ali, de son nom égyptien, est un ouvrage colossal. Épais de 980 mètres à la base, de 40 mètres au sommet, il fait 3.600 mètres de long. Il a créé un lac artificiel, le lac Nasser, alimenté par les eaux du Nil.

    Le but avoué du barrage d'Assouan, en Égypte, était la promesse de nouvelles terres, la fourniture d'eau aux collectivités, une agricultureagriculture hydraulique, la protection contre les crues, la navigation fluviale, les ressources énergétiques... bref que des bonnes intentions.

    Son but secret était plus politique : donner au régime une image de marque, rivaliser avec la tradition pharaonique des grands ouvrages pour faire oublier la misère du présent, répondre à l'explosion démographique...

    Le lac Nasser est un lac artificiel créé suite à la construction du barrage d'Assouan, en Égypte. Il est alimenté par les eaux du Nil. © Nasa, DP

    Le lac Nasser est un lac artificiel créé suite à la construction du barrage d'Assouan, en Égypte. Il est alimenté par les eaux du Nil. © Nasa, DP

    Plusieurs aménagements ont été réalisés avant ce barrage situé à 11 km d'Assouan et mesurant 114 m de haut et 3.600 m de long. Conçu par les Soviétiques, commencé en 1962, il fut terminé en 1971.

    Le lac Nasser

    Quant au lac artificiel qu'il a créé, le lac Nasser, avec 500 km de long dont 150 appartiennent au Soudan, sur une largeur allant de 10 à 30 km (soit une superficie de 5.000 km2 et une profondeur de 70 m), il est, par sa capacité de retenue (157 milliards de m3), le second du monde après celui du Zambèze.

    Carte du lac Nasser. © DR

    Carte du lac Nasser. © DR

    Le barrage d'Assouan et ses conséquences : avantages et inconvénients

    Les bénéfices sont nombreux : 2,1 millions de KW/an, des inondationsinondations jugulées, une sécheressesécheresse annulée, une navigation améliorée, des surfaces cultivées accrues, trois récoltes au lieu d'une...

    Les conséquences négatives sont encore plus nombreuses. En voici quelques-unes dans le désordre :

    • Le déplacement de 500.000 Nubiens.
    • La fragilisation des berges du fleuve jusqu'à plus de 100 km en aval.
    • L'absence de limonlimon fertilisant qui constituait l'apport principal pour le deltadelta qui, depuis, recule beaucoup.
    • La disparition corrélative des sardines.
    • La perte par évaporation colossale (10 milliards de m3/an).
    • L'utilisation d'engrais chimiques pour compenser les apports perdus du limon.
    • La pollution agricole qui s'en suit.
    • La pollution industrielle parce que de nombreuses industries se sont installées au bord du fleuve.
    • La disparition des jachères, donc une surexploitation du sol.
    • L'absence de drainagedrainage du sel qui était emporté par la crue.
    • La poussée démographique importante due à cette fausse sécurité d'approvisionnement en eau.
    • La remontée de la nappe phréatiquenappe phréatique qui engorge les sols et menace les agglomérations et les monuments.
    • Le développement foudroyant des schistosomiasesschistosomiases endémiquesendémiques.
    • Les nouvelles variétés de poissonspoissons et de planctonplancton dont on ne connaît pas les effets à long terme sur le milieu...

    Personne n'a encore envisagé le coût du nettoyage du barrage qui se remplit des limons du fleuve qui ne sont plus distribués lors de la crue et la capacité du barrage diminue d'autant chaque année...

    La construction du barrage d'Assouan, source de conflits

    La constructionconstruction du barrage d'Assouan dans les années 1960 a menacé d'engloutir des monuments et des temples de l'ancienne Nubie, vieux de 3.000 ans. L'Unesco a lancé une campagne internationale en 1960, invitant la communauté des nations à élargir son assistance financière et son expertise technique pour sauvegarder ces temples.

    En vingt ans, six groupes de monuments de la Nubie égyptienne et soudanaise ont été démontés pierre par pierre, transportés et assemblés de nouveau sur d'autres sites. L'envergure du projet et l'immense défi technologique que celui-ci a représenté étaient sans précédent : au total, les 22 monuments et complexes architecturaux ont nécessité l'assistance de 40 missions techniques venues des cinq continents.

    Mais le barrage se trouve « à cheval » sur deux pays, l'Égypte et le Soudan, et le fleuve concerne plusieurs pays, neuf au total. Ceci ne manque pas de susciter quelques tensions et ce depuis plusieurs années...

    Photo du lac Nasser. © DP

    Photo du lac Nasser. © DP

    L'Égypte, le Soudan et la guerre de l'eau

    Article paru dans l'édition du 22 janvier 1997 du Monde :

    « L'Égypte a demandé des explications au Soudan au sujet de "menaces" que l'éminence grise du régime islamiste, le président du Parlement, Hassan El Tourabi, aurait brandies contre l'approvisionnement de l'Égypte en eau du Nil. Selon la presse, M. El Tourabi aurait averti que, face à l'offensive militaire de l'opposition, les autorités pourraient retirer une grande partie des troupes cantonnées au sud du pays pour les envoyer à l'est, "ce qui met en danger les sources du Nil", et les "intérêts stratégiques" de l'Égypte.

    Le président Hosni Moubarak a affirmé, lundi 20 janvier, que l'Égypte n'interviendrait pas dans les combats entre le gouvernement soudanais et l'opposition qui sont une "affaire intérieure" ce qui constitue un soutien implicite à l'opposition, mais il a réaffirmé que son pays était opposé à toute division du Soudan. Le quotidien officieux El Ahram estimait, il y a quelques jours, que le compte à rebours pour la chute du régime soudanais avait débuté. Le Caire a par ailleurs commencé à s'intéresser aux Soudanais du Sud animistes et chrétiens. Quatre-vingts bourses d'études à l'université égyptienne ont été accordées à des étudiants de cette région. »

    La conférence des pays riverains du Nil, à Khartoum, au Soudan

    Article paru dans l'édition du 5 août 2000 du Monde :

    « Les pays riverains du Nil devaient tenir, vendredi 4 et samedi 5 août, une conférence ministérielle à Khartoum consacrée aux "progrès réalisés jusqu'ici dans l'initiative des pays riverains du bassin du Nil pour l'utilisation équitable des eaux" de ce fleuve. Les discussions porteront également sur "les préparations en cours en vue de la réunion du consortium international pour la coopération sur le Nille Nil", prévue début 2001, d'après un communiqué officiel. Outre l'Éthiopie, les pays riverains du Nil sont l'Ouganda, le Kenya, la Tanzanie, le Burundi, la République Démocratique du Congo (RDC), le Rwanda, l'Érythrée, le Soudan et l'Égypte. - (AFP) » 

    De la Tanzanie à l'Égypte, au moins 200 millions d'habitants vivent aujourd'hui sur le bassin du Nil. Les neuf pays riverains s'accordent sur la nécessité d'aménager le grand fleuve mais cette belle unanimité part en pièces dès qu'il s'agit de savoir comment. C'est ce qui s'est passé à Arusha, en Tanzanie, à l'occasion d'une autre conférence ministérielle des pays riverains du Nil. Du côté du Nil Blanc (Tanzanie, République démocratique du Congo, Rwanda, Burundi, République centrafricaine, Kenya et Ouganda), l'intérêt portait surtout sur la production d'énergie.

    Puis, en 2015, un accord a été signé entre le Soudan, l'Égypte et l'Éthiopie, ouvrant la voie à la construction du barrage « Grande renaissance » par l'Éthiopie sur le Nil bleu, réconciliant Le Caire et Addis-Abeba.