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Ce pneu usé a été trouvé par 868 m de fond dans la baie de Monterey, au large de la Californie, où il sert désormais de support pour des organismes qui ne devraient pas vivre là. © Mbari, 2009
Il est actuellement aisé d'étudier la présence de déchets dans des eaux superficielles, puisque de simples filets suffisent pour les récolter. En revanche, faire de telles inspections dans les grands fonds océaniques, à plusieurs centaines de mètres de profondeur, est plus complexe, car les moyens techniques à mettre en œuvre sont conséquents et coûteux. Ainsi, peu d'informations existent sur la pollution dans les profondeurs océaniques.
Dans cette vidéo en anglais, le Monterey Bay Aquarium Research Institute (Mbari) présente en image l'étude menée par Kyra Schlining, ainsi que différents objets découverts au fond de la baie de Monterey en Californie. © Mbari, YouTube
Interloquée par une étude, Kyra Schlining, du Monterey Bay Aquarium Research Institute (Mbari, États-Unis), a trouvé une solution abordable pour s'attaquer au problème : exploiter la base de donnéesbase de données Video Annotation and Reference System (ou VARS) créée et alimentée par son organisme de rattachement. De quoi s'agit-il ? Ce fichier répertorie tous les êtres vivants et les objets qui ont été observés sur les 18.000 heures d'enregistrements vidéo réalisés par des ROV (des robotsrobots sous-marins) du Mbari depuis 22 ans, entre Vancouver et le golfe de Californie, ainsi qu'à Hawaï.
Dans un premier temps, la chercheuse s'est uniquement intéressée à la situation rencontrée dans la baie de Monterey, au large de la Californie. Avec l'aide de plusieurs collaborateurs, elle vient de présenter ses résultats dans la revue Deep Sea Research Part I. Le message est clair : la pollution des grands fonds ne doit plus être ignorée, car elle est bien réelle et souvent sous-estimée.
Ces grands fonds qu’affectionnent les déchets de l'Homme
Pas moins de 1.149 débris d'origine anthropique ont été repérés dans la baie, entre 25 m et 3.971 m de profondeur. Dans 33 % des cas, il s'agit d'objets en plastique, dont la moitié se compose de sachets. Les objets métalliques, dont les deux tiers sont en aluminiumaluminium ou en acieracier, représentent pour leur part 27 % des détritus recensés. Enfin, le reste se compose notamment de cordes, de filets de pêche, de bouteilles en verre, de papier et de textiles. Selon la chercheuse, « ce qui est frustrant, c'est que la plupart des déchets sont recyclables ».
Un autre point l'a particulièrement surprise : les polluants s'amoncellent principalement à plus de 2.000 m de profondeur, selon une distribution qui ne doit rien au hasard. En effet, les débris ont été trouvés sur des sites où les courants marins sont perturbés par la topographie des fonds : sur les pentes abruptes bordant le canyon sous-marin, ou à proximité d'obstacles au fond de ce dernier. La découverte de bois et de déchets naturels bien précis en ces lieux prouverait un dernier fait important, à savoir que les polluants proviennent principalement du continent, et non de navires.
Une aubaine pour les espèces sessiles, mais pour les autres ?
Ces déchets, qu'il s'agisse de sachets en plastique ou de canettes, impactent directement l'environnement, et pour longtemps. Dans un milieu marqué par l'absence de lumièrelumière, une faible température et une concentration en oxygène réduite, les bactéries à même de les décomposer se développent moins rapidement que dans d'autres milieux, ce qui augmente la duréedurée de vie des déchets.
Par ailleurs, certains détritus offrent parfois des substrats solidessolides au milieu de fonds sableux, ce qui favorise la fixation d'organismes sessiles exogènesexogènes. La composition en espèces de l'écosystèmeécosystème incriminé s'en trouve ainsi modifiée, au risque de voir certains organismes disparaître.
Il est inenvisageable de nettoyer les grands fonds. Ainsi, en publiant cette étude, Kyra Schlining espère que certaines personnes prendront conscience du problème et qu'elles agiront à sa base, en limitant au mieux l'arrivée de déchets en mer.