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Emboîtant le pas à l'industrie automobileautomobile, l'industrie nautique se lance dans la propulsion hybride et électrique, mais l'offre reste encore étroite, avec une quinzaine de bateaux exposés cette année au Salon nautique de Paris. « On est sorti du concept-boat. On commence à avoir de vrais produits qui correspondent à une vraie utilisation », explique Alain Pichavant, le commissaire général du Salon nautique de Paris.
« Mais les marchés en sont encore à un stade embryonnaire », reconnaît-il. Peu de bateaux électriques ou hybrides sont fabriqués en série, pour des raisons de technologie, un peu, d'autonomieautonomie trop faible, bien sûr, et de coût, beaucoup. Les chantiers navals attendent que les formidables investissements consentis par l'industrie automobile portent leurs fruits, notamment pour réduire le coût des batteries, expliquent les professionnels.
La tendance la plus originale est sans doute celle de la motorisation hybride. La grande star du salon est le Greenline 33, une vedette de 10 mètres de long, construite en Slovénie et vendue à 220 exemplaires dans le monde, dont une douzaine en France. Ce bateau confortable, aux grandes baies vitrées, utilise son moteur thermiquemoteur thermique pour se propulser et recharger ses batteries lithium-ion. En mode tout électrique, le bateau dispose de deux heures d'autonomie à 5 nœudsnœuds (moins de 10 km/h), une allure de promenade tranquille. Xavier Fiche, l'importateur en France de cette unité vendue environ 200.000 euros, promet une consommation en gazole « équivalente à celle d'un voilier de même taille ». « Mais on n'achète pas ce bateau par calcul financier » car, « sauf à faire vraiment énormément d'heures de navigation », le surcoût de l'hybride (30.000 euros environ) dépasse les économies attendues sur le gazole, explique-t-il.
Le Greenline 33, à motorisation hybride, joue les stars high-tech. © Greenline
Du 220 volts à bord
Sur un bateau, il est vrai, une motorisation hybride n'apporte pas les mêmes avantages que sur une voiture. Un navire ne peut pas recharger sa batterie au freinage ou dans les descentes... Et il n'y a pas d'embouteillages, c'est-à-dire de fréquents moments où le véhicule immobile fait inutilement tourner son moteur thermique au ralenti.
Cependant, l'hybride - qui existe depuis longtemps, en fait - présente tout de même quelques avantages appréciables. Si les clients sautent le pas, confirme Xavier Fiche, c'est pour « le plaisir de la navigation électrique » et un parc de batteries qui permet d'avoir en permanence du 220 voltsvolts à bord. Le moteur Dieselmoteur Diesel fait tourner une génératrice qui produit en effet une quantité appréciable d'électricité, débitée en 220 volts. Aujourd'hui, les navigateursnavigateurs aiment, en général, retrouver à bord le confort d'une maison avec de multiples ustensiles électroniques, voire électroménagers. Sur un voilier de croisière, par exemple, il n'est pas rare de devoir lancer le Diesel même s'il y a du vent, dans le simple but de recharger les batteries...
Ensuite, la petitesse d'un moteur électrique permet de concevoir le bateau autrement, avec la génératrice d'un côté et le moteur plus loin, près de l'hélice, avec, entre les deux, une liaison par câble électrique et non par un encombrant arbre moteur. On peut ainsi plus facilement, par exemple, intégrer un propulseurpropulseur d'étrave pour faciliter les manœuvres d'accostage. Enfin, on peut apprécier le silence et l'absence de pollution lorsque l'on navigue aux alentours du port.
Batteries trop chères
Bénéteau, le géant mondial du nautisme, présente au salon le Boat, un tout nouveau bateau de croisière fluviale de 14 mètres, à motorisation hybride, qui permet de glisser silencieusement sur les canaux. Mais le constructeur se refuse à donner une date pour la commercialisation de voiliers à moteur hybride, échaudé par l'échec du Lagoon 420, un catamaran de croisière lancé il y a quelques années. Sur 100 bateaux vendus, seuls 30 ont conservé l'hybride, le constructeur réinstallant du thermique classique sur les autres.
La motorisation hybride efficace, pour tous, est technologiquement prête « à 95 % », explique Bruno Belmont, directeur du développement voile chez Bénéteau. Mais « il nous faut faire encore les 5 % les plus difficiles » et le prix des batteries reste pour l'instant trop élevé pour un usage de massemasse, souligne-t-il. Le lithium-ion est bien plus léger que le plombplomb, en effet, mais bien plus cher...
Une autre solution, plus classique, est d'utiliser l'hybride le plus vieux du monde : la voile plus un petit moteur ! Si, en plus, on accepte de vivre à bord sans réfrigérateur, ni congélateur, ni machine à laver, ni téléviseur, alors, la consommation d'énergie fossile tombe à peu de chose...
Pour les bateaux électriques, les évolutions restent sans doute à venir. Actuellement, PlanetSolar, ce navire dont le moteur est alimenté par énergie solaire, boucle son tour du monde. En 2008, Kenichi Horrie, sur son Suntory Mermaid II, traversait les océans à la seule énergie des vaguesvagues...
Mais pour l'instant, le marché du tout électrique reste cantonné sur la promenade pour plans d'eau intérieurs. Le tout jeune chantier lorientais E3H a toutefois livré à plus de 20 exemplaires son Costo, un tout-électrique de 5,50 mètres, une embarcation à tout faire conçue notamment pour les écoles de voile et homologuée pour naviguer en mer (14.500 euros).
Huit heures d'autonomie, capacité de 10 passagers, vitessevitesse d'exploitation comprise entre 4 et 8 nœuds (entre 7 et 15 km/h), et recharge complète pour 80 centimes, selon E3H, constructeur adossé au groupe de distribution automobile Schuller.
Entrant à peine sur le marché (deux exemplaires vendus pour l'instant), l'Aequus 7, une vedette électrique de 7 mètres équipée de panneaux solaires, a reçu jeudi le prix Bateau Bleu de la Fédération des industries nautiques. Ce bateau homologué pour la mer, partiellement autonome énergétiquement, est vendu autour de 72.000 euros.