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Les néonicotinoïdes atteignent le système nerveux et modifient le comportement de certaines espèces. Des études ont récemment mis en relation la décroissance des naissances des reines, et les difficultés de navigation des abeilles avec l'utilisation de néonicotinoïdes. Aujourd'hui, des recherches menées en Nouvelle-Zélande suggèrent que ces mêmes pesticides modifient les interactions entre une espèce de fourmi invasive, et une indigèneindigène. Ces produits ont le pouvoir de modifier toute la structure des deux communautés.
Au pays des Kiwis, la fourmi indigène Monomorium antarcticum fait face à une invasion de fourmis d'Argentine (Linepithema humile). Ces dernières sont justement connues pour leur caractère invasifinvasif. Elles ont été introduites accidentellement en Afrique du Sud, en Australie, aux États-Unis, ou en Europe, et s'adaptent très bien à tous ces environnements, malgré des conditions pourtant différentes. Dans chaque site envahi, les fourmis d'Argentine se sont montrées particulièrement agressives envers les populations indigènes.
La fourmi d'Argentine (Linepithema humile) peut mesurer jusqu'à 4,9 mm de long. C'est l'espèce invasive la plus répandue dans le monde. En France, elle a été aperçue pour la première fois en 1906 dans les Alpes-Maritimes. Aujourd’hui, on la trouve dans tout le pourtour méditerranéen de France. © Alex Wild, AntWeb.org, cc by sa 3.0
Pas d’altération du comportement individuel
Les colonies se rencontrent tant dans les zones urbaines qu'agricoles et sont donc exposées aux pesticides. Une équipe d'écologuesécologues de la Victoria University of Wellington a cherché à comprendre comment réagissaient les deux espèces aux néonicotinoïdes et si leurs interactions intra-espèces en étaient altérées. D'après leurs résultats, détaillés dans la revue Proceedings of the Royal Society B, les fourmis d'Argentine, exposées à cette classe d'insecticidesinsecticides, deviennent encore plus agressives qu'en moyenne, et cela pourrait bien conduire à leur déclin.
L'équipe, menée par l'écologue Rafael Barbieri, a d'abord exposé les deux colonies séparément à de très faibles doses de néonicotinoïdes. Aucune n'a montré de changement de comportement alimentaire, ou de survie. Leur système nerveux ne semblait pas affecté, mais les couvéescouvées des fourmis d'Argentine ont tout de même réduit de moitié. Les relations inter-espèces n'ont pas changé, mais lorsque les deux espèces se sont rencontrées, il y a eu d'importantes modifications d'interaction.
La fourmi d’Argentine se bat jusqu’à la mort
À la rencontre de ses envahisseurs, la fourmi indigène s'est montrée moins agressive, ce qui augmente les probabilités de survie des fourmis d'Argentine. À l'inverse, lorsque celles-ci étaient exposées aux pesticides et rencontraient des fourmis indigènes, elles étaient si agressives qu'elles se battaient jusqu'à en mourir.
En somme, si les deux espèces sont exposées aux néonicotinoïdes, la fourmi endémiqueendémique de Nouvelle-Zélande devient moins agressive, tandis que la fourmi d'Argentine préfère mourir plutôt que perdre son combat. Dans ce contexte, l'espèce invasive a toutes ses chances de continuer à se développer et vaincre l'espèce néo-zélandaise. Mais si seuls les envahisseurs étaient exposés, alors les néonicotinoïdes pourraient être un moyen efficace de contrôler l'invasion. Ces pesticides réduisent par deux les couvées des fourmis d'Argentine, et les poussent au suicide en les rendant si agressives.
Quelque part ce n'est pas si étonnant qu'un insecticide serve d'insecticide. Mais ce que l'étude suggère, c'est qu'utilisés à bon escient, ces produits pourraient aider plus que détruire l'équilibre de la faunefaune. Elle montre cependant une fois de plus à quel point il est impératif de contrôler les utilisations de pesticides dans la nature.