Bien que l'Agence spatiale européenne et Roscosmos n'aient pas encore officiellement sélectionné sur quel site d'atterrissage se posera le rover ExoMars 2020, tout indique que ce sera Oxia Planum. Ce bassin peu profond, possédant des argiles susceptibles de conserver des biosignatures datant de la période aqueuse il y a un peu moins de quatre milliards d’années, a été choisi par l'Agence spatiale britannique et l'université de Leicester. Toutes deux participent à la réalisation de cette mission sous la maîtrise d'œuvre de Thales Alenia Space. Nos explications.

Alors que l'Agence spatiale européenne doit se prononcer à la mi-2019 sur lequel des deux sites encore en compétition doit atterrir le rover ExoMars 2020, l'Agence spatiale britannique et le Centre de recherche spatiale de l'université de Leicester ont fait leur choix. Ce sera Oxia Planum. Cette vaste plaine datant de 4 milliards d'années a été préférée à un site distant de seulement quelques centaines de kilomètres de là, dans Mawrth Vallis, un grand chenal d'écoulement, avec d'épaisses couches de sédiments sur les plateaux alentour.

Scientifiques et ingénieurs ont donc déterminé qu'Oxia Planum était le meilleur site d'atterrissage pour le rover construit par les Britanniques d'Airbus Defence and Space. Graham Turnock, directeur général de l'Agence spatiale britannique, a déclaré qu'après la « Terre, Mars est la planète la plus habitable du Système solaire. C'est donc une destination idéale pour explorer la possibilité de la vie sur d'autres planètes, ainsi que l'histoire de notre propre planète ».

Carte d’<em>Oxia Planum</em> avec ses caractéristiques de texture. L’ellipse d’atterrissage, dont la localisation reste à fixer précisément, sera située dans la zone délimitée en rouge. © Nasa/JPL-Caltech/Arizona State University / Analyse : IRSPS/TAS-I

Carte d’Oxia Planum avec ses caractéristiques de texture. L’ellipse d’atterrissage, dont la localisation reste à fixer précisément, sera située dans la zone délimitée en rouge. © Nasa/JPL-Caltech/Arizona State University / Analyse : IRSPS/TAS-I

Que ce soit le site d'Oxia Planum ou celui de Mawrth Vallis, ces deux sites sont évidemment d'un très grand intérêt scientifique et ont le potentiel de faire avancer de façon significative la connaissance de l'histoire de la vie sur Mars. Les scientifiques s'accordent à dire aujourd'hui qu'elle a existé il y a quelque 4 milliards d'années. Comme l'explique Jorge Vargo, le responsable scientifique de la mission ExoMars à l'ESA, il y a un « fort sentiment que si la vie a jamais existé sur Mars, ces deux sites d'atterrissage pourraient être le genre d'endroit qui conserverait des indices et des preuves de sa présence ».

Du point de vue scientifique, le site de Mawrth Vallis est peut-être le site qui présente le plus grand intérêt. Riche en argile, ce site a pu conserver des traces de vie apparue il y a 4 milliards d'années. Mais, le choix d'un site se fait aussi sur des considérations techniques. Et de ce point de vue, le site de Mawrth Vallis est bien plus « challenging » que celui d'Oxia Planum.

Oxia Planum, le site le plus approprié

Cela dit, Oxia Planum est aussi un site prioritaire pour rechercher d'éventuelles traces de vie éteinte ou actuelle à la surface, mais aussi dans les deux premiers mètres de son sous-sol. Comme le souligne le professeur John Bridges, du Centre de recherche spatial de l'université de Leicester et, membre du groupe de travail sur la sélection du site d'atterrissage, « Oxia Planum a été recommandé après plus de 4 ans d'étude approfondie à l'aide notamment des images fournies par HiRise (MRO) et la caméra CaSSIS de la sonde TGO de l'ESA ».

Ce site a notamment été choisi parce que les scientifiques sont convaincus que « les sédiments à grains fins, déposés pendant l'ancienne époque noachienne, ont pu conserver la preuve de l'existence de micro-organismes dans ce milieu favorable et qu'ils sont aussi adaptés à la foreuse du rover ExoMars 2020 ». À cela s'ajoute que les spectromètres infrarouges de Mars Express et Mars Reconnaissance Orbiter ont montré la présence d'argiles et d'autres minéraux qui sont autant d'indices sur le passé humide de la planète.


Les raisons du choix d’Oxia Planum expliquées par celles et ceux qui ont défendu ce site et prennent part à la mission ExoMars 2020. © CNRS

ExoMars 2020 recherchera des traces de vie dans Oxia Planum

Article de Xavier Demeersman publié le 23/07/2016

Prévu pour s'élancer vers Mars initialement en 2018, le rover ExoMars, développé par les agences spatiales européenne (Esa) et russe (Roscosmos), partira finalement en août 2020, soit à la même période que le rover Mars 2020 de la Nasa, à la faveur d'une fenêtre de tir qui minimise le temps de voyage. Leurs missions principales à chacun ? Rechercher des traces de vie passée qui aurait pu être conservée dans le sol martien à l'abri des radiations cosmiques.

Le site d'atterrissage du successeur de Curiosity n'est pas encore connu mais celui d'ExoMars 2018, pardon d'ExoMars 2020, a été définitivement arrêté. Ce sera Oxia Planum, conformément aux recommandations que l'équipe ERC e-Mars dirigée par Cathy Quantin-Nataf du Laboratoire de géologie de Lyon : Terre, planètes et environnement, LGL-TPE (CNRS/INSU, université Lyon 1) en collaboration avec John Carter de l'Institut d'astrophysique spatiale, IAS (CNRS/INSU, université Paris Sud) a fait à l'Esa sur les quatre sites candidats qui étaient en lice : Aram Dorsum, Hypanis Vallis, Mawrth Vallis et donc Oxia Planum.

En octobre 2015, la géologue spécialiste des surfaces des planètes avait expliqué à Futura-Sciences les principales raisons de ce choix. Le site semble en effet tout avoir pour plaire. Sur le plan technique, il répond aux contraintes qui obligent que le rover soit déposé dans un milieu peu accidenté, à basse altitude dans une région proche de l'équateur de Mars, dans une ellipse d'incertitude de 104 km de longueur sur 19 km de large. Sur le plan scientifique, il présente aussi un réel intérêt.

Vue 3D d'une image prise par la caméra HRSC (<em>High Resolution Camera</em>) de MarsExpress. Les parties apparaissant en rosé correspondent aux dépôts argileux. Ils ont été découverts grâce au spectro-imageur Omega de la sonde européenne. Les restes du delta ont été cartographiés en bleu. © CNRS

Vue 3D d'une image prise par la caméra HRSC (High Resolution Camera) de MarsExpress. Les parties apparaissant en rosé correspondent aux dépôts argileux. Ils ont été découverts grâce au spectro-imageur Omega de la sonde européenne. Les restes du delta ont été cartographiés en bleu. © CNRS

Un site qui a pu conserver des traces de vie

Situé à 18,20° de latitude nord et 335,45° de longitude est, Oxia Planum se trouve entre Mawrth Vallis et Ares Vallis, à quelques centaines de kilomètres chacun et des plateformes Viking 1 et Pathfinder, qui ont débarqué il y a 40 ans, pour la première, et il y a près de 20 ans pour la seconde.

Au printemps 2021, le rover doté d'un foret qui lui permettra de sonder le sol martien jusqu'à 2 mètres de profondeur, arpentera durant environ 218 sols (jours martiens) un bassin peu profond à l'embouchure de Coogoon Valles, âgé de 3,9 milliards d'années qui fut vraisemblablement une mer ou un lac d'eau liquide, recouvert a posteriori d'une couche de lave volcanique dont le mérite est d'avoir pu longtemps protéger les argiles des rayonnements ultraviolet et cosmique.

Plusieurs vallées larges et longues de quelques centaines de kilomètres traversent l'aire d'atterrissage de l'astromobile de 300 kg. Selon les experts, elles semblent être le résultat d'écoulements massifs.

« L'histoire aqueuse de ce site est ancienne et diverse ce qui en fait un site prioritaire scientifiquement pour avoir hébergé et conservé des traces de vie » indiquait le CNRS lors de l'annonce officielle en novembre 2015, rappelant que la présence des argiles a été identifiée par le spectro-imageur Omega de la mission de cartographie Mars Express et complétée en haute résolution par MRO (Mars Reconnaissance Orbiter).

Les sédiments à grains fins ont pu conserver la preuve de l'existence de micro-organismes dans ce milieu favorable, au même moment où la vie fleurissait sur Terre. Les roches riches en phyllosilicates ont été exposées relativement récemment, depuis quelque 100 millions d'années. Probablement qu'elles sont une extension vers le sud-ouest de Mawrth Vallis. Ce dernier, sélectionné comme une destination candidate de Curiosity, deviendra peut-être celle de son successeur...

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