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Représentation d'un nanotube à double paroi en oscillation avec des atomes d'or (jaunes) se déposant sur lui. Crédit : Zettl Research Group, Lawrence Berkeley National Laboratory and University of California at Berkeley
Physicien connu, Alex Zettl possède son propre groupe de recherche à l'Université Berkeley. C'est un habitué des nanosciences reposant sur les nanotubes de carbone et il a même été l'un des premiers au monde à réaliser grâce à eux un poste de radio à l’échelle nanométrique.
Dans Nature Nanotechnology, lui et son équipe décrivent aujourd'hui un système nano-électromécanique, ou Nems (nanoelectromechanical system en anglais) capable de peser individuellement des atomes. Ce n'est pas la première fois qu'un tel dispositif est réalisé mais les systèmes existants imposaient jusque-là de se placer dans des conditions physiques extrêmes, à très basse température, afin de réduire au maximum l'agitation thermique perturbant les mesures. Ces Nems étaient basés sur le silicium mais, en utilisant des nanotubes de carbone avec une double paroi en graphène, les chercheurs ont non seulement atteint une excellente sensibilité mais surtout ils peuvent effectuer des mesures à température ambiante !
Minuscules, ces Nems peuvent tenir sur une puce. Grâce à eux, on peut envisager des analyses par spectroscopie de masse beaucoup plus simples et, surtout, effectuées avec un appareillage infiniment moins encombrant. Les spectromètresspectromètres classiques, en effet, exigent de produire un faisceau d'ionsions accélérés puis de le dévier à l'aide de champs électriqueschamps électriques et magnétiques. De tels systèmes peuvent alors occuper une pièce entière...
En outre, comme le mentionne un collègue de Zettl, Kenneth Jensen, dans le cas des moléculesmolécules, le dispositif devient particulièrement sensible. Comme il n'est pas nécessaire de les ioniser, cette balance permet de mesurer la masse des molécules intactes. Ce genre de Nems devrait donc être très bien adapté pour la spectroscopie de masse de protéinesprotéines et même d'ADNADN.
Alex Zettl (gauche) en compagnie de Kenneth Jensen. Crédit : Zettl Research Group, Lawrence Berkeley National Laboratory and University of California at Berkeley. Photo de Roy Kaltschmidt
Le principe à la base du fonctionnement de ces nanobalances n'est pas difficile à comprendre. Le nanotube est fixé sur son support par l'une de ses extrémités, l'autre étant libre. On commence par soumettre le nanotube de carbone conducteur à une tension continue, de sorte qu'il se recouvre d'une couche chargée négative sur sa partie supérieure. Puis, on ajoute à cette composante continue une tension alternative calée sur une certaine fréquencefréquence. Le nanotube de carbone se met à vibrer comme une poutrepoutre encastrée dans un murmur et une résonancerésonance apparaît à une fréquence dépendant des caractéristiques du nanotube.
Lorsqu'un atome ou une molécule se dépose sur le nanotube, la fréquence de résonance des oscillations n'est plus la même. Il suffit alors de la mesurer pour obtenir une estimation rapide et précise de l'objet posé sur le nanotube. C'est ainsi que les chercheurs ont mesuré la masse des atomes d'or individuels. En seulement une seconde, le Nems a fourni une mesure correspondant à une masse de 3,25 x 10-25 kg, ce qui signifie qu'il y a environ 32 millions de millions de millions de millions d'atomes dans un seul kilogrammekilogramme d'or. Le nanotube de carbone possède lui-même un diamètre d'un milliardième de mètre pour une longueur 200 fois plus grande.