Si l'exploration lunaire chinoise, marquée par ses missions emblématiques telles que Chang'e 4 et Chang’e 5, a permis des avancées technologiques et scientifiques, elle suscite des interrogations sur ses motivations et ses implications stratégiques. Alors que la mission Chang’e 6 est en cours, la Chine semble positionner son programme spatial dans une perspective de valorisation économique et technologique de la Lune. Cette nouvelle ère qui s’ouvre met aussi en lumière les enjeux diplomatiques et géopolitiques liés à la gouvernance spatiale et à la souveraineté des ressources lunaires.
au sommaire
En janvier 2019, la Chine a marqué l'histoire spatiale en réussissant le tout premier atterrissage sur la face cachée de la Lune avec la mission Chang'e 4mission Chang'e 4. Cette réalisation exceptionnelle a suscité un intérêt à l'échelle mondiale, démontrant ainsi le caractère innovant de la Chine dans le domaine de l'exploration lunaire.
L'année suivante, la Chine a de nouveau marqué les esprits avec la mission Chang'e 5mission Chang'e 5, un aller-retour express qui a permis de rapporter plus de 2 kilogrammes d’échantillons lunaires. Leur analyse a révélé la découverte d'un nouvel élément, le Changesite-(Y), ainsi que la présence de traces d'hélium-3, une ressource stratégique en tant que potentiel combustible pour les centrales de fusion nucléaire.
Pour saisir toute l'importance de cet élément, notons que, selon le Fusion Technology Institute de l'Université du Wisconsin, 40 grammes d'hélium-3 pourraient générer autant d'énergie que 5 000 tonnes de charboncharbon. Avec une estimation de plus d'un million de tonnes d'hélium-3 présent sous la surface lunaire, l'intérêt pour cet élément est manifeste et prometteur.
Chang'e 6 rapportera-t-elle des éléments inconnus ?
L'aventure scientifique chinoise sur la Lune se poursuit aujourd'hui avec Chang’e 6 qui vise à récupérer des échantillons de basaltesbasaltes lunaires sur la face cachée de la Lune. Ces échantillons devraient livrer des informations essentielles sur l'évolution géologique, la géomorphologiegéomorphologie et les processus volcaniques lunaires. Cette mission, qui a aussi pour objectif de découvrir des traces d'uranium à l'aide d'un instrument français, est attendue pour fournir de nouvelles avancées scientifiques précieuses pour mieux comprendre notre satellite naturel, notamment en ce qui concerne l'origine de la dichotomie entre les deux faces de la Lune.
Cela dit, des interrogations persistent sur les motivations derrière ces missions. Le lien indirect entre la CNSA (China National Space Administration) et l'Armée populaire de libération (APL) conduit à se demander si ces réalisations scientifiques ne révèlent pas une stratégie pour les ressources naturelles de la Lune, un aspect pour lequel la Chine n'a jamais dissimulé son intérêt. En particulier, les ressources ciblées pourraient inclure l'hélium-3, la glace d'eau, ainsi que des terres raresterres rares telles que le scandiumscandium et l'yttriumyttrium, cruciales dans le domaine de l'électronique. De plus, il n'est pas à exclure que la mission Chang'e 6 rapporte sur Terre des échantillons susceptibles de révéler de nouvelles sources d'énergie potentiellesénergie potentielles.
Il apparaît que l'exploration lunaire chinoise semble guidée par une vision stratégique qui va au-delà de la simple recherche scientifique, avec un intérêt manifeste pour l'extraction et l'exploitation des ressources lunaires à des fins économiques et technologiques. L'accès à ces matériaux précieux sur la Lune pourrait en effet offrir un avantage compétitif significatif pour la Chine, en termes de ressources naturelles rares et potentiellement vitales pour l'industrie et la technologie du futur. Il sera intéressant de suivre le développement de ces missions lunaires chinoises et leurs implications à long terme.
La question des droits miniers lunaires et de la souveraineté sur ces ressources
Dans ce contexte, il est indéniable que les enjeux géopolitiques liés à l'exploration et à l'exploitation des ressources lunaires sont susceptibles de déclencher une compétition internationale pour ces richesses. En tant que pionnier dans ce domaine, la Chine est en effet en train d'affirmer sa position d'acteur clé de cette nouvelle course à l'espace. Les implications diplomatiques et stratégiques de ses activités spatiales ne manquent pas d'attiser la curiosité et de nourrir des questionnements à l'échelle mondiale, notamment des discussions importantes sur le partage équitable des ressources lunaires. C'est un sujet à suivre de près pour comprendre les évolutions futures de l'exploration spatiale et de la collaboration internationale dans ce domaine.
Cette situation soulève des questions sur la gouvernance spatiale et l'exploitation des ressources lunaires. Alors que le Traité de l'espace extra-atmosphérique de l'ONU, signé en 1967, interdit à toute nation de revendiquer la souveraineté d'un corps céleste, l'absence d'un mécanisme d'applicationapplication convenu crée des incertitudes quant à l'exploitation future des ressources lunaires. Comment les droits miniers lunaires et les revendications territoriales fonctionneront-ils ? Cela reste flou. Le risque étant que la communauté internationale pourrait être contrainte un jour de réguler, voire limiter une ruée vers les ressources de la Lune similaire à la ruée vers l'or qu'ont connu les États-Unis.
Alors que la mission Chang'e 6 marque une étape importante dans le Programme d'exploration lunaire chinois, les missions à venir ouvriront la voie à l'exploitation des ressources lunaires et à l'établissement d'une présence chinoise sur la Lune. Il est crucial de rester attentif aux développements futurs dans le domaine de l'exploration spatiale et de la gouvernance des ressources lunaires afin de garantir une coopération internationale efficace et durable dans l'espace.
En conclusion, l'exploration lunaire chinoise représente un mélange complexe d'objectifs scientifiques, géopolitiques et économiques.