L’intense rayonnement lumineux dégagé par les étoiles lors de leur fin de vie fait tournoyer les astéroïdes jusqu’à ce qu’ils se brisent en fragments. Un phénomène appelé « effet Yorp ». C’est ce qu’il adviendra sans doute des astéroïdes de notre Système solaire lorsque le Soleil sera transformé en géante rouge.
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Dans le classique jeu d'arcades Asteroids, le vaisseau spatial doit détruire les astéroïdes à l'aide d'un rayon laser. Lorsqu'il est touché, l'astéroïde se divise en deux blocs, lesquels peuvent à leur tour être détruits. Remplacez le rayon laser par la lumière d'une étoile, et vous obtenez ce qui se passe pour de vrai dans l'univers.
Deux chercheurs américains viennent de décrire avec précision ce scénario, dans la revue Monthly Notices of the Royal Astronomical Society. Voici comment cela se passe. Lorsqu'une étoile arrive à court d'hydrogènehydrogène, son carburant principal, elle se dilate jusqu'à devenir des centaines de fois plus grosse avant de s'effondrer en naine blanchenaine blanche. Durant cette phase de « géante rouge », sa luminositéluminosité est multipliée par 10.000 et son rayonnement est tellement intense qu'il est absorbé par les astéroïdes aux alentours. Cette énergieénergie lumineuse est redistribuée à l'intérieur de l'astéroïde, créant un déséquilibre de couple entre la gravitationgravitation et la force centrifugeforce centrifuge qui met l'astéroïde en rotation. D'abord très lente, la vitesse de rotationvitesse de rotation s'accélère de plus en plus jusqu'à atteindre une rotation complète toutes les deux heures (par comparaison la Terre met 24 heures à tourner sur elle-même). Ce phénomène est connu sous le nom d'effet Yorp, du nom de quatre scientifiques (Yarkovsky, O'Keefe, Radzievskii, Paddack) qui l'ont découvert.
Plus de 10 divisions successives
L'effet de couple devient alors tellement puissant que l'astéroïde finit par se briser en deux sous l'action de sa propre force centrifuge. Chaque morceau restant est ensuite soumis au même phénomène, jusqu'à ce qu'il n'en reste plus que des débris suffisamment petits pour ne pas être affectés. D'après les calculs des chercheurs, il peut se produire ainsi plus de 10 fissionsfissions successives. Au final, il ne reste plus que des débris métalliques, formant un disque de poussières autour de la naine blanche. « Plus d'un quart des naines blanches contiennent des débris métalliques observables provenant de la désintégration des astéroïdes », décrit Dimitri Veras, physicienphysicien à l'université de Warwick.
Un effet ultra-puissant qui s’étend jusqu’à 100 unités astronomiques de distance
Ce destin est celui qui attend notre propre ceinture d'astéroïdesceinture d'astéroïdes, située entre Mars et JupiterJupiter. Bien que tournant à une distance comprise entre 300 et 500 millions de kilomètres du SoleilSoleil, ils seront pourtant irrémédiablement pulvérisés par la lumière de ce dernier, lorsqu'il sera transformé en géante rouge dans 6 milliards d'années. Mais des astéroïdes encore plus lointains seront touchés. « L'effet Yorp peut briser des astéroïdes à des centaines d'UA (unités astronomiquesunités astronomiques), bien au-delà de NeptuneNeptune ou PlutonPluton, atteste Dimitri Veras. C'est un phénomène très violent et très rapide, de l'ordre d'un million d'années. Il devient quasi inexistant une fois que l'étoile est devenue une naine blanche ». Seuls seront épargnés les plus petits astéroïdes (entre 1 et 100 mètres de diamètre) et les très grandes planètes comme Jupiter dont la cohésion interne est suffisamment forte pour résister au couple infernal s'exerçant sur les objets.
L'effet Yorp a été observé à de rares occasions, comme pour l'astéroïde 2000 PH5 (Lire ci-dessous). Il pourrait aussi être à l'origine des « fausses comètescomètes », comme dans le cas de l'astéroïde P/2010 A2 : l'accélération de sa rotation lui fait perdre une partie de sa surface qui s'étale derrière lui sous forme de queue.
Quand la lumière accélère la rotation des astéroïdes : l'effet Yarkovsky
Article de Laurent SaccoLaurent Sacco publié le 10/03/2007
AOn l'avait déjà observé par des mesures radars avec l'astéroïde 6489 "Golevka", l'effet Yarkovskyeffet Yarkovsky vient d'être directement mis en évidence, avec des télescopestélescopes optiques cette fois, dans le cas de l'astéroïde 2000 PH5 ! La confirmation de cet effet sur un petit corps céleste proche de la Terre devrait aider à prévoir les risques présentés par les géocroiseursgéocroiseurs.
Découvert il y a 7 ans, l'astéroïde 2000 PH5 est de petite taille, seulement 114 m, mais il tourne si rapidement sur lui-même qu'un "jour" sur lui ne dure que 12 minutes ! Il n'a pas fallut longtemps aux astronomesastronomes pour réaliser qu'ils tenaient là un candidat idéal pour vérifier une théorie datant du tout début du XX ième siècle.
Les observations
Pendant plus de quatre ans Stephen Lowry, Alan Fitzsimmons et leurs collègues ont surveillé très attentivement les variations de luminosité et de trajectoire de 2000 PH5. Plusieurs télescopes de part le monde ont été mis à contribution , le VLTVLT de l'ESOESO, Calar Alto en Espagne, Hawaï etc... Parallèlement, Patrick Taylor et Jean-Luc Margot de l'Université Cornell se sont servis des radiotélescopes d'Areciboradiotélescopes d'Arecibo à Puerto Rico, et de Goldstone en Californie, pour reconstruire précisément la forme de 2000 PH5. Les mesures ont donné exactement ce qu'ils attendaient, la vitesse de rotation sur lui-même de l'astéroïde ne cesse de s'accélérer, comme on peut le voir sur le schéma ci-dessous.
Ils était partis à la recherche de l'effet Yarkovsky et l'avaient trouvé !
Mais qu'est-ce que cet effet ?
Déjà il faut savoir que la lumière, tout comme la matièrematière en mouvementmouvement, possède une impulsion. Ce qui veut dire que lorsqu'un corps reçoit ou émet de la lumière, cela peut le mettre en mouvement. L'effet est très faible, bien sûr, mais néanmoins il existe. Si donc on considère un corps céleste, et en rotation, éclairé par le Soleil, son sol sera plus chaud en fin de "journée" qu'en début de "matinée". La quantité de lumière émise ne sera pas la même partout à sa surface et le calcul montre que sa rotation peut alors être lentement, mais sûrement, accélérée.
C'est en fait à proprement parler l'effet Yarkovsky-O'Keefe-Radzievskii-Paddack ou effet YORP. Le terme effet YarkovsKy désignant l'influence générale sur le mouvement d'un petit corps céleste de la quantité de lumière émise par sa surface avec des différences de températures.
En étudiant la réflectivité et la forme de 2000 PH5, l'équipe d'astronomes a pu construire un modèle informatique intégrant l'effet YORP. L'évolution de la vitesse de rotation a été exactement ce à quoi ils s'attendaient, validant ainsi leur modèle.
En utilisant celui-ci, ils ont arrivés à la conclusion que, dans 35 millions d'années, ce n'est pas en douze minutes mais en 20 secondes que l'astéroïde tournera sur lui-même ! Cette vitesse est critique pour un tel objet, il pourrait alors se fragmenter en deux parties sous l'action de sa propre force centrifuge ! C'est une bonne façon d'expliquer les cas d'astéroïdes en couple.
Plus généralement, sur de longues périodes, des conséquences de l'effet Yarkovsky devraient se faire sentir sur l'orbiteorbite même de l'astéroïde. Appliqué à d'autres corps, de tailles similaires et orbitant entre Mars et Jupiter, il pourrait même les transformer en géocroiseurs !
Ce qu’il faut
retenir
- Le rayonnement lumineux dégagé par les géantes rouges est suffisamment puissant pour les détruire.
- Soumis à un puissant effet de couple, l’astéroïde se met à tourner de plus en plus vite sur lui-même jusqu’à ce qu’il se brise en deux sous l’action de sa propre force centrifuge.
- Dans notre système solaire, ce phénomène appelé effet Yorp pourrait toucher des astéroïdes distants de 100 unités astronomiques.