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Il suffit de le voir pour le comprendre. Depuis les travaux de Duchenne et de Darwin dans la seconde moitié du XIXe siècle, il a été établi (peut-être à tort) six grandes émotions humaines qu'on peut lire sur le visage d'une personne par leurs caractéristiques propres : la peur, la joie, la tristesse, le dégoût, la surprise et la colère.
Prenons deux exemples bien différents : la peur et le dégoût. Cette première émotion se manifeste par des yeux ouverts en grand, une accélération des mouvementsmouvements oculairesoculaires, des narines élargies associées à une augmentation du débitdébit d'airair passant par le nez, le tout améliorant l'acuité sensorielle de manière à mieux voir arriver le danger.
À l'inverse, le dégoût se caractérise par un abaissement des sourcils et une fermeture importante des yeuxyeux, avec l'apparition de rides au niveau du nez. Ce comportement est associé à une diminution des capacités sensorielles.
L’odorat, important chez l’animal… Et chez l’Homme ?
Si visuellement, il nous est possible de discriminer ces émotions entre elles, ne pourrions-nous pas nous servir de nos autres sens ? Dans le monde animal, notamment chez les mammifèresmammifères, l'odorat joue un rôle très important dans la communication sociale. Les odeurs laissées par les chienschiens en sont une des preuves. Le nez de l'Homme en revanche est loin d'être aussi performant. Mais est-il inutile pour autant ?
La peur se lit sur son visage. C'est d'ailleurs avec le caractère universel de l'expression faciale des émotions que les acteurs et comédiens nous paraissent crédibles. Mais pour l'être encore plus, il faudra désormais prendre en compte l'odeur... © Pink Sherbet Photography, Flickr, cc by 2.0
Des scientifiques de l'université d’Utrecht, aux Pays-Bas, ont voulu le vérifier. Leur hypothèse de départ était que certains composés chimiques produits par le corps, comme la sueur, pouvaient porter un message sur l'état émotionnel de l'émetteur qui serait interprété par un récepteur, de manière à synchroniser l'état émotionnel de ces deux personnes. Dit autrement, un individu qui émet des signaux chimiques de peur, entraîne un état de peur chez son voisin. Il en va de même pour le dégoût.
Les émotions passent aussi par le nez
Pour l'expérience, publiée dans Psychological Science, des hommes ont été recrutés. Ceux-ci étaient soumis à un mode de vie strict les deux derniers jours avant le début des expérimentations. Ils ne devaient ni fumer, ni boire d'alcool, ni faire d'exercice physiquephysique intense et devaient éviter la nourriture odorante. De la même façon, ils ne pouvaient qu'utiliser des cosmétiques sans odeur, de manière à ne pas perturber le cours de la recherche. Ces volontaires assistaient alors à un film : soit une séquence effrayante, soit un extrait dégoûtant. Au terme de la projection, des échantillons de sueur étaient collectés.
Ensuite, les femmes entraient en jeu. On leur demandait de participer à une tâche visuelle mais on les soumettait au même moment à l'odeur de sueur récupérée dans la phase précédente. Le mouvement de leurs yeux ainsi que leur visage étaient scrutés de près. Comme ils l'avaient supposé, les auteurs ont remarqué que les participantes soumises à des émanations de peur manifestaient les expressions faciales associées à l'émotion. Même résultat pour celles ayant senti l'odeur du dégoût. Preuve que la communication émotionnelle passe aussi par le nez.
Quel est l'impact réel de l'odorat dans le quotidien de l'Homme ? Difficile d'en juger. Il ne s'agit peut-être que d'un vestige de nos ancêtres qui prêtaient beaucoup d'attention aux signaux chimiques de leur environnement. Ou bien ce sens a davantage d'influence sur nos vies que ce que l'on pense...