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Vue d'artiste du système binaire - constitué d'une naine blanche et d'une géante rouge - où s'est produite l'explosion thermonucléaire
(Crédits : David A Hardy/PPARC)
Des explosions thermonucléaires récurrentes
Dans la nuit du 12 février 2006, des astronomesastronomes japonais annoncent qu'une étoile baptisée RS Ophiuchi connaît une « éruption lumineuse » de grande ampleur et devient extrêmement brillante dans la voûte céleste. Cette naine blanche, qui fait partie d'un système de deux étoiles, ne leur est pas inconnue, puisqu'elle s'est déjà illuminée de la sorte en 1898, 1933, 1958, 1967 et 1985.
Alerté, l'astronome Tim O'Brien de l'université de Manchester demande à ce que l'on pointe de toute urgence un réseau de 10 radiotélescopes déployés entre Hawaï et les Caraïbes, le VLBA (Very Long Baseline Array), en direction de RS Ophiuchi. Grâce à une réaction rapide de la communauté scientifique, l'explosion thermonucléaire peut être observée à un stade très peu avancé, et l'équipe avoir un aperçu inédit de cette nova. « Nos premières observations, menées seulement deux semaines après l'explosion, ont révélé la présence d'un souffle de la taille de l'orbite de SaturneSaturne. ». Cette onde de choc se propageait à plus de 1.700 kilomètres par seconde dans l'espace !
Dans quelles circonstances se produisent ces explosions récurrentes à la surface de RS Ophiuchi ? Cette étoile très dense, de la taille de la Terre, fait partie d'un système binairesystème binaire qui compte également une géante rougegéante rouge. Cette dernière présente un ventvent stellaire très prolifique, qui permet à la naine blanche de récupérer du gazgaz. Une fois qu'elle en a récolté suffisamment, une explosion thermonucléaire se produit, et éjecte des matériaux dans l'espace à plusieurs milliers de kilomètres par seconde. Les astronomes ont remarqué que l'onde ainsi formée se heurte ensuite à l'atmosphèreatmosphère de la géante rouge et engendre de nouvelles explosions qui accélèrent les électronsélectrons à des vitessesvitesses proches de celle de la lumièrelumière.
Les dix radiotélescopes du VLBA (Very Long Baseline Array)
(Crédits : NRAO / AUI / NSF & SeaWiFS Project NASA/GSFC & ORBIMAGE)
Un souffle qui change de forme
Les scientifiques ont eu la surprise de constater que les ondes radio indiquaient la présence d'un puissant champ magnétiquechamp magnétique dans le matériel éjecté. D'autre part, les observations menées dans les semaines suivantes par des télescopestélescopes européens, chinois et sud-africains, ont montré que la forme de l'onde de l'explosion se modifiait. Au bout de quelques mois, elle présentait l'aspect d'un cigare. Ceci permet aux astronomes d'affirmer que soit l'explosion thermonucléaire a produit deux jets de matièrematière opposés, soit l'atmosphère de la géante rouge a modifié le visage du matériel éjecté.
L'étude de cette explosion, dont les détails sont dévoilés dans l'édition du 20 juillet de la revue Nature, intéresse au plus au point la communauté scientifique. En effet, la physiquephysique de ce phénomène est analogue à celle des supernovaesupernovae, et son observation est plus aisée. « Dans les premiers jours qui ont suivi l'explosion, nous avons assisté à des changements dans la géométrie du souffle qui auraient pris des centaines d'années dans le cas d'une supernova », résume Jennifer Sokolsky, de l'Harvard-Smithsonian Center for Astrophysics de Cambridge.
L'explosion vue par le réseau VLBA, 14 jours après le début de l'événement
(Crédits : NRAO/AUI/NSF)
Bientôt une supernova ?
A partir des caractéristiques de l'onde de choc, l'équipe a pu calculer la massemasse de la naine blanche. Il semblerait qu'elle soit proche de la masse critique susceptible d'engendrer une supernova. L'une des principales questions que se posent les astronomes est de savoir si, à chaque explosion, RS Ophiuchi éjecte toute la matière qu'elle est a collectée de sa géante rouge compagnon, ou si elle en garde à chaque fois une partie et augmente ainsi sa masse.
Si la naine blanche conserve du gaz, elle pourrait rapidement dépasser le seuil critique et engendrer une supernova. Il s'agirait en quelque sorte du bouquet final, qui mettrait un terme au plus long feufeu d'artifice stellaire que les astronomes aient connu.