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À deux kilomètres au nord de Forcalquier, dans le Luberon, se dresse le paysage spectaculaire des rochers des Mourres. Ils ponctuent la colline comme autant de champignonschampignons - morilles géantes - posés sur un sol grisâtre et blanchâtre. L'endroit est pour le moins insolite et quelque peu désertique, ponctué de touffes éparses de végétation. Il fait très chaud au cœur des Mourres quand le soleil inonde le site de sa lumière estivale.
Les Rochers des Mourres à Forcalquier, Alpes de Haute Provence, France. © Apitux CC BY-SA 4.0
Description des rochers de Mourres
Les Mourres forment un ensemble de rochers isolés les uns des autres et classés selon cinq types de formes différentes :
- ondulations ;
- monticules ;
- meules de foin ;
- cylindres ;
- vasques.
Autant de masses calcairescalcaires dégagées par l'érosion et dont la silhouette n'est pas quelconque mais se décrypte à la lumière de leur mode de formation. Alors que les reliefs karstiques résultent d'une dessiccation ruiniforme d'une couche calcaire ou dolomitique selon des fissures balafrant la roche, les rochers des Mourres correspondent chacun à une masse rocheuse jadis édifiée par le double jeu d'une sédimentationsédimentation liée à une activité biologique. Ce sont des rochers issus d'un processus de constructionconstruction et non le résultat hasardeux du seul phénomène de destruction. Ils correspondent à des structures préexistantes aujourd'hui dégagées par l'érosion qui leur restitue approximativement leur forme d'origine.
Les impressionnants rochers des Mourres. © François Michel
Consitution des Mourres
Les rochers des Mourres s'inscrivent dans la partie supérieure d'une couche calcaire, dite calcaires de Reillanne. Il s'agit de calcaires massifs, légèrement crayeux et marneux, et localement fossilifères qui datent de la fin de l'OligocèneOligocène, il y a de cela environ 25 millions d'années.
Dans les bancs de calcaires auxquels appartiennent les rochers on peut observer des fossilesfossiles de planorbes et de limnées, gastéropodesgastéropodes d'eau douceeau douce dont la présence traduit une formation de la roche en milieu lacustrelacustre. À cette époque la région du Luberon, comme le traduisent de nombreuses autres formations rocheuses, était occupée par de grands lacs et le secteur des Mourres se situait non loin d'une zone deltaïque en bordure du lac. Le décor est campé, il ne suffit plus que d'imaginer le processus de « croissance » des rochers !
Formation des Mourres
Les rochers des Mourres se seraient formés, en milieu marécageux, à partir de massifs d'herbiers aquatiques se développant à la surface de l'eau. L'édification d'un rocher vient du fait que son herbier constructeur accumulait du calcaire en le capturant et le stabilisant dans son « feuillage », l'indurationinduration du rocher en voie de construction étant aussi vraisemblablement favorisée par la précipitation du calcaire suite à l'activité photosynthétique des herbes. Lors de l'élévation du niveau d'eau du lac, les herbiers se développaient vers le haut, provoquant la croissance verticale du rocher qui s'indurait progressivement en partie basse, les herbiers étant à la poursuite de la surface et à la recherche de la lumière.
Les différentes formes des rochers proviennent des différents régimes de développement des « herbiers - parents », la nécrose de leur partie centrale provoquant une croissance périphérique et la formation d'une vasque, par exemple.
Autour des « rochers » en gestationgestation s'accumulaient sensiblement les mêmes sédimentssédiments, mais non indurés par les herbiers, ce qui explique qu'ils sont aujourd'hui plus facilement décapés et rapidement évacués par l'érosion, nous laissant ce décor étonnant et très local des rochers des Mourres.