Entre le Permien et le Trias, il y a un peu plus de 250 millions d’années, la Terre a subi une extinction ou une série d'extinctions la plus grave que l'on connaisse. Les causes sont encore controversées mais il semblerait bien que l’une d’entre elles soit une éruption basaltique massive dans ce qui est aujourd’hui la province d’Emeishan, en Chine, comme l’explique un article de Science.

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90 % des espèces marines, principalement des coraux, des brachiopodes, et des échinodermes, ainsi que 70% des espèces végétales et animales terrestres semblent disparaître subitement il y a 251,4 millions d'années. C'est le fameux Great Dying, l'extinction massive séparant le Permien du Trias.

En fait, à y regarder de plus près il pourrait y avoir eu plusieurs phases d'extinction dont les causes seraient différentes et qui en s'additionnant seraient responsables de cette grande crise biologique qu'a subi la biosphère. On invoque souvent les gigantesques épanchements basaltiques des trapps de Sibérie comme l'une des causes probables de cet événement et l'on n'écarte pas non plus l'influence partielle de la chute d'une météorite.

Il semble de plus en plus clair cependant qu'une autre éruption basaltique massive mais de moins grande intensité avait déjà commencé à réduire la diversité biologique sur la planète il y a de cela 260 millions d'années environ. Il s'agirait des trapps de la province d'Emeishan, au sud-est de la Chine, et qui correspond à l'émission d'un demi million de kilomètres cubes de basalte.

Cliquer pour agrandir. Cette image prise à Hawaï montre l'une des éruptions du Pu‘u ‘O‘o–Kupaianaha entre 1983 et 1997. Il s'agit d'une cascade de lave. Crédit : <em>J. Judd, Hawaii Volcano Observatory, U.S. Geological Survey</em>

Cliquer pour agrandir. Cette image prise à Hawaï montre l'une des éruptions du Pu‘u ‘O‘o–Kupaianaha entre 1983 et 1997. Il s'agit d'une cascade de lave. Crédit : J. Judd, Hawaii Volcano Observatory, U.S. Geological Survey

Des coulées de lave bien datées

Il n'est pas facile d'associer chronologiquement de façon très précise une éruption volcanique et une extinction massive mais dans le cas des éruptions d'Emeishan, la présence d'une mer proche et peu profonde est venue en aide aux géologues, paléontologues et géochimistes étudiant ce qui est connu comme l'extinction du Permien moyen ou encore de la fin du Guadalupien.

En effet, comme l'explique des chercheurs comme Paul Wignall, un paléontologue de l'Université de Leeds, des flots de basalte fluide et peu visqueux ressemblant à ceux émis lors des éruptions de Hawaï se sont écoulés de larges et longues fissures éruptives en directions de la mer. Des dépôts sédimentaires ont ensuite recouvert les couches des basaltes refroidies avec des signes non ambigus d'une extinction massive des formes biologiques.

Les couches de sédiments marins prenant en sandwich les coulées de basalte contenant des formes de vies aisément identifiables et faciles à dater, un lien clair et indiscutable entre les trapps d'Emeishan et une grande crise biologique est maintenant établi selon toute probabilité.

Cliquer pour agrandir. Les gorges basaltiques de la <em>Columbia River Basalt</em> font partie d'une grande province recouverte de vastes coulées de basaltes similaires à celles des trapps et qui recouvrent les états de Washington, Oregon et Idaho aux Etats-Unis. Crédit : Andrew Alden

Cliquer pour agrandir. Les gorges basaltiques de la Columbia River Basalt font partie d'une grande province recouverte de vastes coulées de basaltes similaires à celles des trapps et qui recouvrent les états de Washington, Oregon et Idaho aux Etats-Unis. Crédit : Andrew Alden

Pour s'en convaincre, on peut ajouter que la pénétration de ces flots massifs de lave dans la mer a dû s'accompagner de la vaporisation d'une grande quantité d'eau de mer à laquelle se sont mêlées des émissions de dioxyde de soufre. En plus de causer des pluies acides peu favorables aux espèces vivantes, ce gaz aurait conduit à la formation d'une grande quantité de nuages réfléchissant la lumière du Soleil et conduisant à un refroidissement de la planète.

Cette découverte apporte du poids aux tenant de la théorie de Vincent Courtillot selon laquelle des trapps volcaniques sont les acteurs majeurs des grandes crises biologiques.