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La mise au jour en 2008 de 250 fossiles d'organismes pluricellulaires complexes vieux de 2,1 milliards d'années dans un gisement sédimentaire proche de Franceville, au Gabon, une découverte publiée en 2010 dans Nature, a bouleversé le scénario de l'histoire de la vie sur Terre. Jusque-là, les plus vieux fossiles d'organismes complexes remontaient à 600 millions d'années (les vendobiontes d'Ediacara en Australie) et il était communément admis qu'avant cette période, la vie sur notre planète était constituée exclusivement d'organismes unicellulaires (bactériesbactéries, algues unicellulaires...). Avec la découverte de Franceville, la vie complexe a fait un bond de 1,5 milliard d'années en arrière.
Macrofossiles pyritisés montrant des morphotypes lobés avec des structures périphériques radiales (en haut à droite) et des morphotypes allongées. Les images obtenues par microtomographie à rayons X (micro-CT) sont en transparence ou en volume 3D. Barre d’échelle 1 cm. © CNRS, Abderrazak El Albani
De vrais fossiles de pluricellulaires
Les campagnes de fouilles successives menées depuis 2008 par l'équipe du professeur Abderrazak El Albani, géologuegéologue à l'Institut de chimiechimie des milieux et matériaux de Poitiers (CNRS/Université de Poitiers), ont permis d'extraire plus de 400 fossiles. Leur analyse détaillée par cette équipe, en collaboration, avec des équipes de l'université Lille 1, de l'université de Rennes 1, du Muséum national d'Histoire naturelleMuséum national d'Histoire naturelle et de l'Ifremer, vient d'être publiée le 25 juin 2014 dans la revue Plos One.
L'utilisation d'une sonde ionique destinée à mesurer les différents isotopesisotopes du soufresoufre a confirmé l'origine organique (biogénicité) des spécimens récoltés, tandis que leur analyse au microtomographe à rayons Xrayons X révélait leur structure aussi bien externe qu'interne et permettait de caractériser leur morphotype. La fossilisationfossilisation rapide des individus, grâce au phénomène de pyritisation (le remplacement de la matièrematière organique par de la pyritepyrite, du fait de l'activité bactérienne), a permis une conservation exceptionnelle de leur forme initiale.
Macrofossiles très peu ou pas du tout pyritisés montrant des morphotypes avec un aspect circulaire. Les images obtenues par microtomographie à rayons X (micro-CT) sont en transparence ou en volume 3D. Elles illustrent les différences entre les spécimens. Barre d’échelle 1 cm. © CNRS, Abderrazak El Albani
Un écosystème marin vieux de plus de 2 milliards d'années
Plusieurs nouveaux morphotypes ont été répertoriés par les chercheurs : circulaires, allongés, lobéslobés..., chacun regroupant des individus de tailles différentes. Leur analyse dévoile des organismes de texturetexture médusaire, molle et gélatineuse. Leur forme est lisse ou plissée, leur texture est uniforme ou grumeleuse, leur matière est massive ou cloisonnée.
La structure très organisée et les tailles variées des spécimens macroscopiques (jusqu'à 17 centimètres) suggèrent un mode de croissance extrêmement sophistiqué pour la période. Cet écosystèmeécosystème marin complet est donc composé d'organismes micro et macroscopiques de formes et de tailles extrêmement variées qui vivaient dans un environnement marin peu profond
Macrofossiles pyritisés montrant des morphotypes allongés partiellement sinueux (environ 17 cm pour le spécimen du haut), composés de deux parties connectées. Barre d’échelle 1 cm. © CNRS, Abderrazak El Albani
À l'instar du biota d'Ediacara en Australie, dont l'émergenceémergence coïncide avec la brusque augmentation du taux d'oxygène dans l'atmosphèreatmosphère il y a 800 millions d'années, l'apparition et la diversité du biota gabonais correspond au premier pic d'oxygène observé entre -2,3 et -2 milliards d'années. Cette biodiversitébiodiversité se serait vraisemblablement éteinte après que ce taux ait brutalement rechuté.
Le biota gabonais ouvre encore bien des questionnements sur l'histoire de la biosphèrebiosphère à l'échelle de notre planète. La diversité et la structure très organisée des spécimens étudiés suggèrent qu'ils sont déjà évolués. Il n'est pas non plus exclu que d'autres formes de vie aussi anciennes existent ailleurs sur la planète.