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Cette photographie a été prise sur le site de la découverte du Sciurumimus albersdoerferi juvénile. Il s'agirait de la première mise au jour d'un squelette complet de mégalosauridé. L'animal était conservé dans une roche calcaire. © Rauhut et al. 2012, Pnas
La découverte en Chine d'un sinosauroptéryx, en 1996, a profondément modifié notre vision sur les théropodes. En effet, cet animal ayant vécu 122 à 124 millions d'années possédait des filaments intratégumentaires (sortant de la peau), assimilés par de nombreux paléontologuespaléontologues à des plumes primitives. Depuis, près de 30 nouvelles espèces de dinosaures ont été décrites avec ce type de structure. Elles appartiennent majoritairement, tout comme le sinosauroptéryx, au groupe des cœlurosaures (grand ordre des saurischiens), qui inclut notamment les tyrannosaurestyrannosaures, les déinonychosaures (les raptors) et les oiseaux.
Cependant, des structures ressemblant à des plumes non ramifiées, des poils creux et tubulaires, ont également été trouvées au niveau de la queue chez des psittacosaures et des Tianyulong confuciusi. Or, ces deux espèces appartiennent au grand ordre des ornithischiens (dont ne descendent pas les oiseaux) et non aux saurischiens. Elles remettent donc en cause l'apparition des plumes au sein des cœlurosaures. Ce sujet fait l'objet de nombreux débats dans la communauté scientifique.
L'histoire évolutive des protoplumes (les filaments non ramifiés) et plumes vient de s'éclaircir grâce à la découverte en 2011 d'un nouveau fossilefossile exceptionnellement bien conservé en Allemagne, dans une carrière à Rygol en Bavière. Oliver Rauhut, de la Ludwig Maximilian University (LMU) à München, et ses collègues viennent de publier leur analyse du squelette dans la revue Pnas. Il semble que la présence de plumes chez les dinosauresdinosaures était plus répandue qu'on ne l'imagine actuellement.
Les filaments (fi, sur l'image), et leur follicule présumé (fo), sont situés sur la partie supérieure de la queue (les vertèbres sont indiquées par la lettre C) chez Sciurumimus albersdoerferi. Événement exceptionnel, des tissus mous (s) ont également été observés par les chercheurs. La barre d'échelle représente 1 cm. © Rauhut et al. 2012, Pnas
Les plumes aussi vieilles que les dinosaures
Le Sciurumimus albersdoerferi, un spécimen juvénile, a été découvert par des mineurs dans une couche de sédimentssédiments fins datant du Jurassique supérieur (150 millions d'années). Des filaments (2,5 fois plus longs que la hauteur d'une vertèbre caudale) ont été observés sur plusieurs régions de son corps, notamment à la base de la queue et sur la face ventrale des flancs de l'animal. Cette espèce appartiendrait au groupe des mégalosauroidés, un taxontaxon relativement primitif par rapport aux cœlurosaures, et serait un membre des saurischiens.
Les protoplumes trouvées seraient similaires, en structure, à celles observées chez les ornithischiens, mais aussi chez des tyrannosauridés (dilong), les thérizinosauridés (beipiaosaurus) et chez les compsognathidés (sinosauroptéryx) primitifs. La découverte de Sciurumimus albersdoerferi comble un trou dans l'histoire évolutive des plumes et démontrerait que ces structures ainsi que les protoplumes sont homologues. Leur apparition serait aussi vieille que celle des dinosaures, puisqu'elle se rencontre au sein des deux plus anciens groupes (ornithischiens et saurischiens).
Les dinosaures auraient pu tous posséder ce tégumenttégument (dit de type 1), mais pas forcément sur l'intégralité du corps ni durant toute leur vie (les plumes auraient pu, par exemple, être présentes pendant le stade juvénile et disparaître au-delà). Cette théorie souffre déjà de nombreuses critiques. Certains scientifiques avancent l'hypothèse d'un phénomène de convergence évolutive pour expliquer la présence de téguments similaires chez les ornithischiens et les saurischiens. Les plumes seraient apparues de manière indépendante dans les deux groupes sans qu'un éventuel ancêtre communancêtre commun en ait été pourvu. Seule la découverte de nouveaux fossiles, dans des sédiments fins permettant de conserver des empreintes de filaments, pourra mettre fin à ce nouveau débat.