Le système d’élimination des déchets du cerveau est encore très mal connu. Certains scientifiques pensent que de nombreuses maladies neurodégénératives, comme Alzheimer ou Parkinson, caractérisées par une accumulation anormale de protéines, seraient dues à une défaillance du « camion-poubelle » du cerveau.

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    Le cerveau aussi doit éliminer ses déchets. Le jour où l'on comprendra mieux ce mécanisme, on pourra peut-être élaborer de nouveaux traitements contre la plupart des maladies neurodégénératives. © Heidi Cartwright, Wellcome Images, Flickr, cc by nc nd 2.0

    Le cerveau aussi doit éliminer ses déchets. Le jour où l'on comprendra mieux ce mécanisme, on pourra peut-être élaborer de nouveaux traitements contre la plupart des maladies neurodégénératives. © Heidi Cartwright, Wellcome Images, Flickr, cc by nc nd 2.0

    Le cerveau est bel et bien un organe à part. Étant donné son rôle de chef d'orchestre, il bénéficie d'un traitement de faveur de la part de l'organisme. À la différence des autres régions du corps, le sang ne peut l'atteindre directement : il est filtré par la barrière hémato-encéphalique, sorte de douves d'une forteresse voulue imprenable, qui détermine quelles moléculesmolécules peuvent entrer ou sortir. L'objectif étant d'éviter d'ouvrir les portesportes à des intrus néfastes qui détruiraient la structure de l'intérieur, tels des toxines, virus ou bactéries.

    Mais ce filtre implique d'autres conséquences. En effet, toutes les cellules vivantes produisent des déchetsdéchets, celles du cerveau ne faisant pas exception. À l'échelle de l'organisme, les éléments encombrants et inutiles rejoignent le système lymphatique, ensemble de canaux occupés par un liquideliquide, pour rejoindre le foie, où ils seront découpés en petits morceaux. Cependant, ce système lymphatique ne s'étend pas jusqu'au cerveau. La question de l'élimination des déchets de notre ordinateurordinateur central est longtemps demeurée en suspens.

    L'une des hypothèses avance que les molécules les plus grandes, celles trop imposantes pour passer la barrière hémato-encéphalique sont recyclées par les cellules cérébrales. Cette théorie a cependant été mise à mal en août dernier, dans un article publié dans Science Translational Medicine. Les auteurs y décrivaient pour la première fois un réseau complexe d'évacuation des déchets, qu'ils ont appelé système « glymphatique », qui permet de « laver le cerveau ».

    Un camion-poubelle dans le cerveau

    Si ce système n'a pas été explicité plus tôt, c'est parce qu'il ne se repère pas lors des prélèvements de tissu cérébral. Pourtant, grâce à une technique d’imagerie sophistiquée, la microscopie biphotonique, ces scientifiques de l'université de Rochester (États-Unis) ont montré dans le cerveau de souris le fonctionnement du réseau d'élimination des déchets.

    Le cerveau est entouré de méningesméninges protectrices, parmi lesquelles on trouve une couche appelée arachnoïde. C'est à ce niveau que coule le liquide céphalorachidienliquide céphalorachidien (LCR, aussi appelé fluide cérébrospinal). Ces scientifiques ont monté que le LCR circule dans les espaces entre les vaisseaux sanguins et les cellules cérébrales. Ces tuyaux sont sous le contrôle des cellules glialescellules gliales (d'où le « g » de glymphatique), plus précisément des astrocytes.

    Ce schéma en anglais représente les différentes couches des méninges. L'arachnoïde se trouve entre la dure-mère (<em>dura mater</em>) et la pie-mère (<em>pia mater</em>), et c'est à ce niveau que coule le liquide céphalorachidien qui, entre autres fonctions, emporte avec lui les déchets pour évacuation. © Mysid, Wikipédia, DP

    Ce schéma en anglais représente les différentes couches des méninges. L'arachnoïde se trouve entre la dure-mère (dura mater) et la pie-mère (pia mater), et c'est à ce niveau que coule le liquide céphalorachidien qui, entre autres fonctions, emporte avec lui les déchets pour évacuation. © Mysid, Wikipédia, DP

    Dans ces tubes, le LCR circule vite et récupère les protéines, les débris cellulaires, et autres molécules à jeter à la poubelle. Ceux-ci sont finalement éliminés par des canaux appelés aquaporines, puis s'ensuivent les étapes classiques de dégradation avant élimination.

    Améliorer l’efficacité des éboueurs du cerveau contre Alzheimer ?

    Désormais, l'un de ces chercheurs, Maiken Nedergaard, publie dans Science un article sur les perspectives à venir si l'on poursuit les recherches dans cette voie. Selon lui, un ralentissement du système glymphatiquesystème glymphatique avec l'âge pourrait expliquer bon nombre de maladies neurodégénératives, les deux principales étant Alzheimer ou Parkinson.

    En effet, ces deux désordres neurologiques, au même titre que d'autres, se caractérisent par l'accumulation anormale de protéinesprotéines dans ou à la surface de neuronesneurones. Dans le cas d'AlzheimerAlzheimer, il s'agit des bêta-amyloïdesbêta-amyloïdes et de la protéine Tau, et pour ParkinsonParkinson, c'est l'alpha-synucléine. Le scientifique souligne donc l'intérêt de trouver un moyen d'améliorer le système d'élimination des déchets chez les personnes atteintes par ces troubles pour les soigner.

    Cette piste est complètement nouvelle et demande encore à être creusée, avant de déterminer comment l'exploiter efficacement. Elle ouvre la voie à une autre façon de prendre en charge des maladies neurodégénérativesmaladies neurodégénératives, alors qu'aujourd'hui les traitements proposés ne permettent pas de les soigner. Or, ces troubles sont amenés à augmenter en nombre dans les décennies à venir du fait du vieillissement de la population. Comme quoi, même ce qui est à jeter à la poubelle dans le corps humain est à prendre en compte...