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La vie sur Terre fonctionne au rythme de l'alternance jour-nuit, liée à la rotation de notre planète. Les êtres vivants, y compris l'Homme, possèdent une horloge biologique, ou horloge interne, qui leur permet de s'adapter à ce rythme. Mais comment fonctionne-t-elle ? C'est ce champ de recherche qu'ont exploré les trois chercheurs américains lauréats du prix Nobel 2017 de physiologie ou de médecine.
Ces derniers ont utilisé la mouche du vinaigremouche du vinaigre, ou drosophile, comme organisme modèle. En 1984, ils ont isolé le gène period qui contrôle le rythme biologique circadien. Jeffrey Hall et Michael Rosbash ont mis en évidence la protéine PER, codée par le gène period, qui s'accumule dans la cellule la nuit et est dégradée le jour.
Les trois Américains Hall, Rosbash et Young récompensés
En 1994, Michael Young a découvert un deuxième gène, timeless, qui code la protéine TIM, nécessaire à un rythme circadienrythme circadien normal. Il a aussi montré que TIM se lie à PER ; les deux protéines entrent dans le noyau de la cellule et bloquent l'activité du gène period grâce à un rétrocontrôle négatif.
Ces mécanismes ne sont pas spécifiques à la drosophile : l'horloge biologiquehorloge biologique fonctionne selon les mêmes principes chez de nombreux organismes pluricellulaires, dont les Hommes. Ces recherches ont des applicationsapplications en santé car l'horloge biologique aide à contrôler de nombreuses fonctions : sommeil, comportement alimentaire, hormones, pression artériellepression artérielle, température corporelletempérature corporelle. Lorsque l'horloge interne est en décalage avec l'environnement extérieur, par exemple lors d'un voyage à l'autre bout du monde, l'organisme est mis à l'épreuve : c'est le jetlag.
Un régime trop gras perturberait l'horloge biologique
Article de Jean EtienneJean Etienne paru le 7 janvier 2009
Si une alimentation riche en graisses est souvent cause de surpoidssurpoids, ce n'est pas seulement dû à son excès calorique. Elle entraînerait aussi une perturbation du rythme circadien de production d'une hormone, l'adiponectine, qui influence le stockage des graisses.
Avec 9 kilocalories par gramme, les graisses représentent à la fois la forme la plus concentrée d'énergieénergie et le candidat idéal pour guider l'organisme dans la voie de l'obésitéobésité. A ces effets premiers s'en ajouterait un autre, portant sur une perturbation des rythmes circadiens, c'est-à-dire des variations du métabolismemétabolisme à l'échelle de l'alternance jour/nuit. C'est ce qu'affirment Oren Froy et ses collègues de l'université de Jérusalem dans une publication récente.
Nos rythmes circadiens organisent une bonne part de notre métabolisme, notamment la production d'hormones. Un des meilleurs exemples est le cortisolcortisol, dont le pic de sécrétionsécrétion survient en début de matinée afin de préparer notre organisme au réveil.
Parmi les facteurs exerçant l'action la plus significative sur nos rythmes circadiens figure la lumièrelumière. L'industrie en profite pour promouvoir divers traitements à base de luminothérapieluminothérapie. Mais il en est un autre, résidant dans l'alimentation qui peut, elle aussi, affecter l'horloge biologique. Cela vient d'être vérifié sur des souris, et la transposition de ces effets sur l'être humain semble évidente pour les auteurs de cette étude.
En cause, l'adiponectine, une hormone jouant un rôle décisif dans la régulation du poids. Produite et fixée au sein du tissu adipeuxtissu adipeux, elle a pour fonction de favoriser la combustioncombustion des graisses et surtout d'augmenter la sensibilité à l'insulineinsuline, ce qui tend à réduire le stockage des graisses. L'adiponectine agit dans notre corps comme un véritable messager modulant son action en fonction de l'état de réplétion de nos réserves graisseuses.
Chez la souris, un régime sans excès de graisse favorise un bon rythme circadien. © e3000, Flickr, CC by-nc-sa 2.0
Un régime gras perturbe le rythme circadien de l'adiponectine
Afin de mieux cerner le fonctionnement de l'adiponectine et sa répercussion sur l'organisme, les chercheurs ont soumis des souris à divers régimes, modulés selon la quantité de nourriture et leur saturation en graisses. L'administration d'un régime pauvre en graisses induit chez ces mammifèresmammifères un rythme circadien de l'adiponectine normal. En revanche, un régime riche en graisses entraîne une nette perturbation de ce rythme, dont les phases sont prolongées à l'excès et entraînent inévitablement un retard de l'activité régulatrice de l'hormone. Un jeûne ou une alimentation insuffisante provoquent l'effet inverse.
La conclusion est logique : il existe bien un lien direct entre graisses, horloge biologique et sommeil, ce qui confirme que la consommation excessive de graisses, quelles qu'elles soient, et temps de sommeil insuffisants sont facteurs d'obésité.
Il est à noter que d'autres expérimentations, conduites cette fois directement chez l'Homme, avaient déjà permis d'établir que le manque de sommeil induisait diverses modifications hormonales entraînant une diminution de la sensation de satiété et une augmentation de l'attrait pour le gras, effets peu favorables sur le maintien du poids.