Un singe contrôle les mouvements d’un cousin paralysé uniquement par la pensée. Cela ressemble à de la science-fiction, mais c’est pourtant bien réel et une équipe états-unienne vient de le prouver. L’application chez l’Homme est encore loin mais ces résultats devraient redonner de l’espoir aux nombreux paralysés incapables d’effectuer le moindre mouvement.

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    Logée au cœur de la colonne vertébrale, la moelle épinière fait circuler les messages nerveux entre le cerveau et le reste du corps. Son rôle est crucial et permet à l'organisme d'effectuer la plupart des gestes moteurs dont il a besoin. Lorsqu'elle est endommagée, les sensations et les mouvementsmouvements peuvent donc fortement diminuer, jusqu'à disparaître complètement.

    Les lésions de la moelle épinière sont responsables de paralysies chez des millions de personnes dans le monde. Malheureusement, il est aujourd'hui impossible de réparer cette précieuse moelle et de restituer la capacité de mouvement aux handicapés moteurs. Les scientifiques ne perdent cependant pas espoir et travaillent avec ardeur pour parvenir à cet exploit. Alors que certaines équipes étudient la possibilité d'utiliser les cellules souches contre la paralysie, d'autres se sont orientés vers la création d'interfaces cerveau-machine, afin de conférer à nouveau la mobilité par la pensée.

    Les personnes paralysées n’ont aujourd’hui aucun traitement à leur disposition. La création d’interfaces cerveau-machines pourrait un jour venir à leur secours. © zeevveez, Flickr, cc by 2.0

    Les personnes paralysées n’ont aujourd’hui aucun traitement à leur disposition. La création d’interfaces cerveau-machines pourrait un jour venir à leur secours. © zeevveez, Flickr, cc by 2.0 

    Dans ce domaine, la recherche est en pleine effervescence. L'année dernière par exemple, des scientifiques ont réussi à faire contrôler des bras virtuels à des singes. L'expérience était déjà sensationnelle. Des chercheurs de l'université Cornell dans l'état de New York (États-Unis) sont allés encore plus loin. Dans leur étude, publiée dans la revue Nature Communications, un macaque rhésusmacaque rhésus a pu diriger par la pensée le bras d'un autre primateprimate, paralysé provisoirement avec des anesthésiantsanesthésiants.

    Un bras paralysé capable de bouger

    Pour cette expérience, les chercheurs ont placé un singe devant un écran d'ordinateur sur lequel il pouvait apercevoir un curseur ainsi qu'un cercle vert mobilemobile. Le macaque avait une mission plutôt ardue : par la pensée, il devait guider le curseur à l'intérieur du cercle. Pour l'aider à y parvenir, les chercheurs ont enregistré son activité cérébrale grâce à des électrodesélectrodes. Ces dernières étaient connectées à un autre ordinateur capable de transformer les informations reçues en messages électriques utilisables par les neurones. De là, ils étaient envoyés à la moelle épinière d'un second macaque paralysé et dont le bras était accroché sur une manette connectée à l'ordinateur du premier primate. Les résultats sont prodigieux : grâce à la pensée, le singe « maître » peut diriger le bras paralysé et contrôler les mouvements du curseur sur l'écran. Pour l'encourager, les auteurs l'ont récompensé avec un jus de fruits à chaque fois que le curseur atteignait sa cible.

    Pour démontrer l'efficacité de leur méthode, les chercheurs ont ensuite inversé les rôles des deux primates, le maître devenant le disciple, et inversement. Dans 84 % des cas, la transmission des ordres par la pensée a été un succès ! « Notre étude démontre qu'il est possible de contrôler un bras paralysé uniquement par la pensée », s'enthousiasme Maryam Shanechi, la principale auteure de ces travaux.

    Deux singes valent mieux qu’un

    Mais pourquoi utiliser deux animaux plutôt qu'un ? Selon les auteurs, en connectant le cerveau et les muscles d'un seul animal, le mouvement obtenu aurait pu être faussé par des signaux sensoriels provenant de contractions musculaires préservées. Avec deux singes, le cerveau de l'un est complètement déconnecté des muscles immobilisés de l'autre ce qui simule mieux une paralysie totale.

    Cette découverte prometteuse pourrait aider les patients paralysés à retrouver le contrôle de leur corps. Dans le futur, les chercheurs voudraient tester cette technologie avec un animal véritablement paralysé et dont les muscles sont affaiblis faute d'avoir servi depuis longtemps. L'applicationapplication chez l'Homme n'est donc pas pour demain mais ces travaux s'en rapprochent.