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Entre 4 et 8 % des cancers pourraient avoir une origine professionnelle. Mais beaucoup ne sont pas considérés comme tels, pour diverses raisons. © Stephen Dicker, Hollywood Pimp, Flickr, cc by nd 2.0
N'en déplaise à Henri Salvador, le travail ce n'est pas toujours la santé. Dans certaines professions, les salariés sont soumis à des produits, processus ou tâches qui entraînent, même bien des années après, une maladie. Celle-ci peut se caractériser par un mal de dos, mais peut aussi se révéler mortelle et se développer en cancer.
Ces derniers représenteraient un nombre non négligeable dans la part totale des cancers. Selon le Centre international de recherche sur le cancer (Circ), ils compteraient pour 4 % des cancers des hommes et 0,5 % de ceux des femmes. En tout, 10 % des salariés seraient exposés durant leur carrière à au moins un agent cancérigène, le bâtiment (32 %) et l'industrie (17 %) figurant en tête.
En 2004, on a reconnu en France 1.942 cas de cancers liés à l’activité professionnelle, alors que des estimations de 2003 considéraient qu'il y en avait au moins 11.000. En 2011, les chiffres devraient se situer autour de 1.800, selon les calculs exposés durant le congrès Eurocancer par Amélie Massardier-Pilonchéry, médecin du travail aux Hospices de Lyon et à l'Umrestte. Pourtant, tous ne sont probablement pas reconnus comme tels. Mais pourquoi ?
L’exposition a un produit, et 30 ans après, un cancer ?
Comme souvent avec le cancer, le lien de cause à effet n'est jamais simple à établir. D'une part, ils n'ont rien de spécifique, de nombreux organes pouvant être touchés (poumon, vessie, larynx, etc.). Ensuite, la maladie peut se déclarer 20 ou 30 ans après l'exposition à un agent cancérigène. Si certains sont bien caractérisés, comme l'amiante, la poussière de boisbois, le PVCPVC ou le formaldéhydeformaldéhyde, tous les cancérigènes ne sont pas forcément connus.
L'amiante est l'un des cancérigènes les plus connus. Aujourd'hui, les fibres d'amiante sont autant que possible retirées pour éviter les problèmes. © Brunolaon, Flickr, cc by nd 2.0
Lors des entretiens avec le médecin, le salarié doit dérouler l'intégralité de sa carrière (postes occupés, tâches effectuées, produits manipulés) afin de déterminer une éventuelle cause plausible. Cependant, lui-même ignore parfois le nom des substances avec lesquelles il a été en contact. Difficile donc d'établir un lien direct. De plus, dans certains cas, il faut déterminer la « part professionnelle » d'un cancer. En effet, quel rôle a joué l'amianteamiante chez un fumeur régulier atteint d'un cancer du poumon ? Là aussi on fait face à un nouvel écueil.
Pour simplifier le travail, il existe des tableaux professionnels, dans lesquels sont répertoriés un certains nombres de maladies professionnelles consécutives à l'exposition à certains agents, comme ceux disponibles sur le site de l'Institut national de recherche et de sécurité (INRS).
Limiter les risques d’occurrence de cancers professionnels
Dans le meilleur des cas, l'association est vite faite. En revanche, certains cancers peuvent ne pas rentrer dans les cases du tableau. Ce n'est pas peine perdue pour autant. Le salarié doit alors monter un dossier qui sera envoyé au Centre régional de reconnaissance des maladies professionnelles (CRRMP) et étudié, pour déterminer si oui ou non le cancer est lié à l'activité professionnelle passée.
Cette démarche est intéressante à plusieurs titres. D'une part au niveau personnel, car le malade est reconnu et indemnisé pour le préjudice subi. D'autre part au niveau collectif, car il permet d'apporter de nouvelles connaissances sur les cancers et une meilleure prise de conscience. De quoi favoriser une nouvelle politique de prévention, aboutissant à l'élimination de substances nocives ou à une diminution des niveaux d'exposition. Les mauvaises expériences des premiers peuvent au moins éviter que d'autres se tuent à la tâche...
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Parce que le monde de la recherche est parfois un peu obscur, Futura-Sciences veut être l'un des relais entre l'universunivers des spécialistes et le grand public. C'est à ce titre que nous nous sommes rendus au congrès Eurocancer, les 25 et 26 juin au Palais des congrès de Paris, le plus grand congrès francophone sur le cancer. Et nous ne sommes pas revenus les mains vides...