Extrêmement rare, mais bien réel : un type particulier de cancer de la peau est capable de se guérir spontanément en l'absence de tout traitement. Son origine génétique vient d’être identifiée, ce qui pourrait aider la recherche à découvrir de nouvelles thérapies anticancéreuses.


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    Certains cancers de la peau, très rares, peuvent guérir spontanément. © XenonR, Wikimedia, CC by-sa 2.0

    Certains cancers de la peau, très rares, peuvent guérir spontanément. © XenonR, Wikimedia, CC by-sa 2.0

    Une tumeur qui se déclare est souvent synonyme du début d'un long combat contre le cancer, à base de chirurgie, de chimiothérapie, de radiothérapie... C'est pourquoi l'idée même d'un cancer qui se guérit tout seul est pour le moins originale... mais il existe bel et bien ! Il s'agit d'un cancer de la peau, très rare, appelé kératoacanthome de Ferguson-Smith ou encore épithéliome squameux multiple spontanément curable (MSSE).

    Caractérisé par l'apparition soudaine d'une tumeur au niveau de la peau, ce cancer est constitué de cellules squameuses kératinisantes, celles-là mêmes à l'origine de la formation des couches supérieures de l'épiderme. Il apparaît généralement au cours de l'enfance ou de l'adolescenceadolescence, voire chez le jeune adulte, généralement sur la tête. S'il guérit progressivement, laissant des cicatricescicatrices plus ou moins visibles, de nouvelles tumeurs réapparaissent souvent périodiquement.

    Quelque part sur le chromosome 9…

    Ce cancer était déjà connu pour être d'origine génétiquegénétique, à caractère dominant. Porté par le chromosomechromosome 9, le gènegène responsable n'avait pas encore été identifié, avant les travaux d'une équipe internationale de chercheurs. Basés à l'Institut de biologie médicale à Singapour, à l'université Dundee au Royaume-Uni et à l'Université de Californie Los Angeles aux États-Unis, les scientifiques ont désormais associé la maladie à des mutations de la protéineprotéine TGFBR1.

    Le récepteur cellulaire TGFBR1 interagit avec un dimère de molécules TGFß, grâce à son association avec an autre récepteur, TGFBR2 (a). Des mutations empêchent le bon fonctionnement de cette interaction ou de la transmission du signal (b). © Nature Genetics

    Le récepteur cellulaire TGFBR1 interagit avec un dimère de molécules TGFß, grâce à son association avec an autre récepteur, TGFBR2 (a). Des mutations empêchent le bon fonctionnement de cette interaction ou de la transmission du signal (b). © Nature Genetics

    Celle-ci est un récepteur cellulaire de surface, qui intervient dans la transmission du signal donné par des hormoneshormones du type TGFß (« facteur de croissancefacteur de croissance transformant »). L'interaction des deux protéines entraîne un ensemble de modifications à l'intérieur de la cellule, ce qui a pour conséquence de réguler la croissance, la prolifération et la différenciation cellulaire, mais aussi l'apoptoseapoptose ou mort cellulaire programmée. Il est donc en quelque sorte un contrôleur permettant d'éviter toute dérive pouvant mener au développement de tumeurs.

    Onze mutations sur un même gène

    C'est le séquençageséquençage de 24.200 paires de bases autour du locuslocus chromosomique préalablement identifié comme associé à la maladie qui a permis de mettre en évidence la présence de 11 mutations différentes dans le gène TGFBR1, parmi 18 familles touchées par la maladie, selon l'article paru dans la revue Nature Genetics. Les mutations identifiées, ponctuelles (menant par exemple au codagecodage d'une prolineproline en leucineleucine) ou de délétiondélétion (menant à la disparition de plusieurs acides aminésacides aminés) sont situées dans les régions du gène codant pour le domaine d'interaction avec l'hormone, ou dans le domaine kinasekinase qui a pour but de transmettre le signal dans la cellule.

    Dans ces conditions, la régulation cellulaire est mise à mal puisque l'hormone TGFß ne peut plus jouer son rôle de contrôle... ce qui explique la multiplication anormale des cellules. D'ailleurs, le dysfonctionnement de ce récepteur cellulaire est déjà connu pour être la première cause génétique du développement de cancers colorectaux. Mais si la prolifération cellulaire a lieu, pourquoi le phénomène s'arrête-t-il spontanément ?

    C'est sur ce point que les scientifiques peinent toujours à trouver une réponse. Cependant, la découverte de l'origine moléculaire de la tumeur est déjà une avancée en soi, qui permettra peut-être de comprendre sa guérisonguérison. Même si la maladie ne concerne qu'une poignée de personnes dans le monde, l'obtention de nouvelles informations dans le domaine des mécanismes cancéreux peut potentiellement ouvrir la voie vers le développement de traitements dirigés contre un ensemble plus large de cancers.