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Les prédispositions génétiques et le mode de vie influencent le risque de cancer. Mais combien de cancers sont dus à des facteurs environnementaux, combien à la génétique et combien au hasard ? C'est la question à laquelle ont voulu répondre un professeur d'oncologie de l'université Johns Hopkins et un biomathématicien.
Dans leur article, les scientifiques ont utilisé le raisonnement mathématique suivant : si on considère le nombre de cellules d'un organe et le pourcentage de cellules souches, on peut calculer combien de fois ces cellules souches se divisent au cours de la vie. À chaque division cellulaire, il existe un risque de mutation cancérogène. Une mutation dans une cellule souche risque plus de causer des problèmes qu'une mutation dans une cellule à duréedurée de vie limitée ; c'est pourquoi les chercheurs ne se sont intéressés qu'aux cellules souches.
Si l'on suit ce raisonnement, les tissus qui ont le plus grand nombre de divisions de cellules souches devraient donc être les plus vulnérables vis-à-vis du cancer. Les chercheurs ont analysé les statistiques portant sur 31 types de cancers. Ils ont ainsi montré que le risque de cancer dans de nombreux organes était fortement corrélé avec le nombre de divisions cellulaires qui y avaient lieu au cours de la vie.
Le cancer du côlon est un exemple de cancer pouvant être dû au grand nombre de divisions cellulaires, et donc au hasard des mutations. © Blausen Medical Communications, Inc., Wikimedia Commons, cc by 3.0
Beaucoup de divisions et de cancers dans le côlon
Sur les 31 cancers étudiés, 22, soit les 2/3, seraient surtout dus au hasard des mutations aléatoires lors des divisions cellulaires. Le raisonnement mathématique des chercheurs fonctionnait en particulier pour le cancer du côlon. Ce cancer qui touche le gros intestingros intestin est plus courant que celui du duodénum (situé dans l'intestin grêleintestin grêle). Si on compte le nombre de divisions cellulaires de cellules souches dans ces organes, il y en aurait 1012 dans le côlon au cours de la vie, contre 1010 dans le duodénum. Chez les souris, en revanche, il y a plus de divisions dans l'intestin grêle (et plus de cancers) que dans le côlon.
Cependant, l'étude ne portait pas sur deux des principaux cancers qui touchent les pays occidentaux : les cancers du seincancers du sein et de la prostate. De plus, rappelons que lorsqu'une mutation apparaît, celle-ci ne conduit pas nécessairement à un cancer. Tout d'abord, il existe des systèmes de réparation de l'ADNADN. Ensuite, si la mutation conduit bel et bien à rendre une cellule cancéreuse, l'organisme peut, grâce à son système immunitairesystème immunitaire, reconnaître et éliminer de telles cellules ; un système immunitaire défaillant peut favoriser l'apparition d'un cancer.
Ces résultats suggèrent donc que la majorité des cancers seraient dus au « manque de chance », à savoir des mutations aléatoires ayant lieu lors de la réplicationréplication de l'ADN dans des cellules souches non-cancéreuses. Cependant, il ne faudrait pas voir dans ces résultats une incitation à prendre des risques pour sa santé, à savoir en fumant et en mangeant mal, le mode de vie restant un facteur de risquefacteur de risque du cancer.